Mes chers collègues, il y a certains jours des magies de calendrier. C’est le cas aujourd’hui. Alors même que nous discutons cette proposition de loi – je remercie les collègues qui en ont pris l’initiative –, le conseil des prud’hommes de Compiègne a entamé l’examen des dossiers des 680 salariés de Continental qui demandent l’invalidation de leur licenciement pour absence de motif économique.
Déjà, le 22 février dernier, le tribunal administratif a annulé le licenciement des salariés protégés pour absence de motif économique.
Tout le monde a encore présent à l’esprit l’affaire Continental. En réalité, il y a plusieurs affaires Continental. Je vous épargnerai la longue histoire de ce dramatique dossier, et n’évoquerai que quelques faits qui sont en lien avec notre discussion.
Je veux tout d’abord rappeler les conditions dans lesquelles les salariés de Continental ont vécu la fermeture de leur entreprise. C’est alors que les salariés qui étaient postés hors de l’entreprise étaient rentrés chez eux pour la pause du déjeuner qu’ils ont appris, par la radio, la fermeture totale du site.
On a beaucoup parlé de violence, d’actes inciviques, de faits relevant de l’amnistie. Je ne connais pas pire violence que celle de laisser ces salariés apprendre par voie de presse que le site sur lequel ils travaillent depuis des années, et leurs pères avant eux, sera fermé définitivement et que tous perdront leur emploi.
Ce dossier, aux conséquences économiques et sociales extrêmement douloureuses, a abouti, à force de mépris, de maltraitance des salariés, à la mise à sac – c’est le terme qui a été retenu et, après tout, pourquoi pas – de la sous-préfecture de Compiègne par les salariés de cette entreprise. Ils ont bien entendu été poursuivis pour ces faits. Ils ont fait appel. L’un d’entre eux, Xavier Mathieu – tout le monde le connaît pour l’avoir vu à la télévision – a été poursuivi pour refus de se soumettre à un prélèvement d’empreintes génétiques. En effet, il estimait qu’il était un syndicaliste qui défend son entreprise, ses collègues et non un délinquant sexuel et qu’il ne devait donc pas relever du fichier des empreintes génétiques. Cette affaire est pendante devant la Cour de cassation.
Mes chers collègues, de retour à Compiègne, demain, je serai heureuse de pouvoir annoncer aux salariés de Continental que le Sénat a voté l’amnistie pour l’expression de leur légitime colère. Parce que eux se répètent tous les jours que les vrais violents, les vrais criminels sociaux n’ont pas été poursuivis, que ce sont des délinquants qui ne seront même jamais amnistiés puisqu’ils ne passeront pas devant nos tribunaux. §