Nous arrivons au terme de l’examen de cette proposition de loi, sur laquelle des positionnements différents se sont exprimés au sein de notre assemblée.
Nous avons entendu que cette amnistie posait une véritable question de société. La façon dont une démocratie fait œuvre de justice est toujours un indicateur de bonne santé d’une civilisation.
Certains de nos collègues semblent ne pas comprendre ce qu’ils appellent un « régime d’exception » que nous souhaiterions mettre en place, et toujours selon leurs propos, pour des personnes qui auraient calomnié, séquestré, qui n’auraient pas respecté la loi.
Je leur répondrai sur plusieurs points.
Quand j’évoque le chef d’une entreprise, je ne parle pas des petits patrons de PME ou des chefs artisans qui font vivre notre économie. Je pense aux chefs des grandes entreprises, à ceux qui peuvent annoncer en quelques secondes des milliers de licenciements. Ce sont alors des milliers de familles qu’ils enferment dans la précarité et parfois même la misère.
Il n’est pas besoin de remonter à 1948 pour décrire ces événements, parce que, aujourd’hui, tous les indicateurs le montrent, la crise et ses conséquences pour certaines familles sont telles que l’on en revient à des situations sociales désespérantes que nous n’avions pas vues depuis de nombreuses années dans notre pays.
Lorsque ce même chef d’entreprise le fait sous couvert de chiffres fallacieux, afin de délocaliser l’activité dans des pays où il n’y a pas ou peu de réglementation du travail pour augmenter ses profits, c’est de la calomnie… Or, l’absence de raison de ces chefs d’entreprise entraîne parfois la déraison, le désespoir des salariés.
Permettez-moi de revenir sur l’exemple des « cinq de Roanne ». Je suis sénatrice du département de la Loire et je les ai accompagnés. Ils ont été pris pour l’exemple, je ne reviendrai pas sur leurs actes. C’est l’expression de la colère du peuple quand des assemblées, des gouvernements refusent de l’entendre et le méprise.
C’est ce qui s’est passé pendant le mouvement contre la réforme des retraites, mes chers collègues. Des millions de Français se sont exprimés, au départ respectueusement, ont manifesté, sollicité des rendez-vous, demandé à être pris en compte, et chaque fois la réponse qu’ils ont reçue a été le mépris.
S’il est évident que ce n’est ni à la rue de gouverner ni à la violence de régner dans les entreprises, quand on pousse les gens dans l’excès en les méprisant, à un moment donné, il faut le comprendre, on obtient des réactions, qui peuvent parfois heurter certains, mais je ne sais pas de quel côté est la raison.
Cette proposition de loi va dans le bon sens. Nous regrettons évidemment l’ajout de quelques mesures restrictives, mais c’est le jeu de la démocratie représentative, qui s’est exprimée ici et qui se poursuivra au cours de la navette parlementaire. Par conséquent, j’invite celles et ceux qui seraient déçus de certains reculs à aller convaincre l’ensemble de nos collègues députés pour redonner de la force à ce texte.
Enfin, je tiens à vous remercier, madame la garde des sceaux, de vos positionnements et des arguments que vous avez apportés afin que nous puissions déboucher sur un texte juste pour les salariés de notre pays, les responsables associatifs – je ne les oublie pas –, dans le respect de l’indépendance de la justice, car chacun, dans notre République, doit pouvoir trouver sa place. §