Intervention de François Zocchetto

Réunion du 28 février 2013 à 15h00
Vote blanc — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de François ZocchettoFrançois Zocchetto :

Cette assimilation des bulletins blancs et des bulletins nuls dans le décompte des suffrages est attestée au moins depuis le XIXe siècle et a été confirmée depuis lors.

Je ne reprendrai pas le rappel historique qu’a dressé à l’Assemblée nationale M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Je rappelle seulement que le principe consistant à admettre le vote blanc posé par la loi du 18 ventôse an V, c’est-à-dire du 6 mars 1798, fut finalement renversé, en 1839, sous la monarchie de Juillet, par la Chambre des députés.

Depuis cette date, l’assimilation des bulletins blancs et des bulletins nuls est demeurée une règle constante pour les opérations de vote en France. La seule exception notable concerne, et ce n’est pas anodin, les machines à voter qui doivent permettre d’enregistrer très facilement un vote blanc.

Aujourd’hui, l’état du droit est simple : les bulletins blancs et nuls sont intégrés pour le calcul du taux de participation du scrutin, mais sont exclus du décompte des suffrages exprimés.

La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui est limitée dans son objet, ce qui justifie le nombre restreint de ses articles. À l'article 1er, qui est l'article principal du texte, ne sont adjoints que des articles de conséquence.

L’article 1er modifie en effet l’article L. 65 du code électoral pour assurer, lors de chaque scrutin, la comptabilisation des bulletins blancs de manière séparée des bulletins nuls. La part de votes blancs serait ainsi formellement distinguée des votes considérés, aux termes de l’article L. 66 du code électoral, comme nuls.

L’Assemblée nationale, lors de l’examen en séance publique d’un amendement de la commission, a précisé qu’une enveloppe vide équivalait à un vote blanc. C’est le moyen de ne pas obliger le maire à mettre à disposition des électeurs des bulletins blancs dans les bureaux de vote.

La commission des lois du Sénat a adopté cette proposition de loi en la modifiant sur un point : le moyen de voter blanc.

Sur le principe, la commission a souhaité prolonger la réflexion entamée à l’Assemblée nationale en distinguant, lors du décompte, les bulletins blancs des bulletins nuls, considérant que la logique entre un vote blanc et un vote nul pouvait être différente.

Le bulletin nul peut s’analyser comme un vote irrégulièrement émis ou comme une opération de défoulement, si j’ose dire ; on peut donc supposer que ladite irrégularité résulte d’une erreur de l’électeur ou de la volonté de ce dernier d’exprimer son souhait de voir « exploser le système », ce qui ne s’inscrit pas dans le processus démocratique électoral.

En revanche, il ne fait aucun doute que le vote blanc relève d’une démarche volontaire et d’un choix assumé ; il est donc le fait d’électeurs politisés. Comme le soulignait dans son rapport M. François Sauvadet, auteur de la proposition de loi et rapporteur à l’Assemblée nationale, on constate que « le taux de votes blancs et nuls est presque systématiquement plus élevé au second tour qu’au premier », ce qui correspond à un resserrement de l’offre politique susceptible de conduire certains électeurs à choisir volontairement de ne pas choisir.

Je ne suis cependant pas sourd aux objections qui se sont exprimées au sein de la commission. Nous avons en effet eu des débats assez longs sur le sujet, parfois plus longs que prévu d'ailleurs, certains faisant valoir que la distinction entre vote nul et vote blanc était avant tout sémantique – un point qui reste à vérifier.

Cependant, le décompte séparé des bulletins blancs devrait avoir le mérite de rendre justice aux électeurs qui font l’effort de se déplacer au bureau de vote, en respectant la procédure électorale, même s’ils préfèrent, pour des motivations qui leur sont propres et qui diffèrent d’un électeur à l’autre, ne pas choisir parmi l’offre politique qui leur est proposée. Il n’en reste pas moins qu’ils ont voté par un acte positif.

De surcroît, vous l’avez souligné, monsieur le ministre, la fin de cet amalgame entre bulletins blancs et bulletins nuls devrait également permettre de connaître enfin l’ampleur du vote blanc, plus précisément sa mesure, lors des opérations électorales, ce qui permettrait de parler de ce phénomène en connaissance de cause. En effet, d’aucuns se croient autorisés à remettre en cause la légitimité de certaines décisions issues du processus électoral sur la base de simples spéculations.

Au sein de la commission, le débat a également porté sur une question connexe, mais importante : faut-il reconnaître le bulletin blanc comme un suffrage exprimé ?

De même que l’Assemblée nationale, la commission des lois du Sénat s’est exprimée, par-delà les clivages partisans, pour maintenir le principe existant. À l’Assemblée nationale, cette position a résulté de l’adoption en séance publique de deux amendements identiques du rapporteur UDI, M. François Sauvadet, et du groupe socialiste majoritaire, ce qui a rendu possible un vote du texte à l’unanimité.

La commission des lois du Sénat a pris en compte les arguments en défaveur de la reconnaissance du bulletin blanc comme un suffrage exprimé.

M. le ministre a rappelé les modalités de l’élection présidentielle : aux termes de la Constitution, « le Président de la République est élu à la majorité absolue des suffrages exprimés. »

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