Aujourd'hui, il n'y a plus une action politique décidée en France par l'Etat qui ne fasse appel aux collectivités territoriales. Ce constat est plus vrai hier qu'avant-hier, plus aujourd'hui qu'hier, et plus demain qu'aujourd'hui. Dans quelques années, une dizaine tout au plus, la somme des budgets des collectivités territoriales dépassera le budget de l'Etat.
Est-ce que nos concitoyens souhaitent que la décision nationale soit indépendante de toute préoccupation locale ? Est ce qu'ils mesurent les conséquences d'une telle décision ? Je ne sais pas. Il n'y a pas eu de grands débats sur les conséquences que peut avoir la fin du cumul des mandats. Nous sommes sénateurs, et je doute que demain les élus regardent le Sénat et les sénateurs de la même façon si l'ensemble de ces mesures était appliqué. Ce que je constate, c'est que si les citoyens avaient décidé qu'ils ne souhaitaient pas de cumuls, il n'y en aurait pas. Mais cela n'a jamais été fait. Au contraire, souvent dans leurs votes personnels, l'on peut percevoir une préoccupation inverse.
Deuxièmement, on ne peut pas considérer, en ce qui concerne les relations entre communes et intercommunalités, ou même entre un département et le syndicat mixte auquel il appartient, que les options proposées sont sans conséquence. Voici l'un des problèmes qui risque de se poser. On parle de mutualisation entre les services de la ville-centre et l'intercommunalité. Mais si ces services ont deux patrons, le fonctionnement peut s'avérer plus difficile. Selon l'heure de la journée, le directeur, ou le chef de service, devra changer de casquette, voire la couleur de la casquette. Nous devons être prudents sur ces questions. Ce n'est pas neutre qu'une ville-centre, qui a construit les équipements historiques - lesquels profitent à tous - et les finance, puisse avoir un rôle plus important à jouer dans l'intercommunalité que celui de simple témoin. Un autre exemple : le département de Haute-Saône finance 70% du budget du SDIS. Or, le président du conseil général ne pourrait plus être président du SDIS et avoir ainsi son mot à dire. Il est facile d'aller promettre de nouveaux équipements aux pompiers et d'envoyer ensuite la facture aux voisins... Ce sont des questions concrètes qui vont se poser. Il en est de même pour les SEM.
Troisièmement, je suis en faveur d'un plafonnement étroit des indemnités, et même en-dessous du plafond actuel. C'est en fait ce point qui est attendu par l'opinion.
De manière plus générale, la réforme du cumul des mandats propose un changement majeur et irréversible du système actuel. Aussi, à titre personnel, je souhaite que ce soit le peuple qui en décide. Si le peuple souhaite mettre fin à la possibilité de cumuler, qu'il l'exprime, mais il devra ensuite assumer l'ensemble des conséquences. Pour moi, la situation actuelle revient à prendre les parlementaires en otage.