Je ne sais pas si les services fiscaux en ont évalué le coût. Vous parlez de compensation, mais on peut considérer que les aides à la presse sont une forme de compensation, même s'il est vrai que des 1,2 milliard d'euros des aides à la presse, seule une faible part est consacrée à la transition numérique. De même peut-on considérer que le fonds Google est une compensation, puisque ce sont des moyens supplémentaires. Les conclusions de la commission Lescure sont attendues fin mars, la TVA en fera partie, c'est pour bientôt.
Madame Morin-Desailly, je me couvre la tête de cendres... je regrette de n'avoir pu vous rencontrer plus tôt, pour des raisons d'agenda et je tiens bien sûr à vous voir pour évoquer ces sujets qui m'intéressent et vous passionnent. Vous avez parfaitement raison d'évoquer un problème de souveraineté à propos de l'accord Google-presse. Une procédure fiscale est en cours, menée par les services fiscaux. Il y a un problème de données personnelles. Le G20 a très récemment émis de sérieuses critiques sur le traitement de ces données par Google. La commission européenne s'interroge sur l'existence d'un abus de position dominante de la part de Google, tant la firme domine les moteurs de recherche en Europe. Aux États-Unis, il en va différemment puisque sa part de marché n'est que de 60 %, en raison de l'importance de Yahoo ! et de Bing. Une procédure a été engagée aux États-Unis devant la FTC (Federal Trade Commission), qui s'est conclue par une transaction, comme aime à le faire Google. J'espère que la Commission européenne ne transigera pas. La procédure européenne en cours est portée par sept ou huit acteurs français. L'algorithme de Google, sous brevet, est secret. Il semble qu'il favorise systématiquement les sites de shopping et de voyages en ligne de Google, qui apparaissent immanquablement en tête des résultats de recherche. Cette entreprise mène une stratégie méthodique de captation de la valeur, verticale et horizontale. Je m'en suis entretenue avec Voyages-Sncf.com et avec Voyageurs du Monde, dont le déploiement opérationnel en ligne a été handicapé par cette façon de procéder de Google, qui modifie ses algorithmes pour avantager ses propres offres et profite de sa position dominante comme moteur de recherche pour prendre position sur les marchés adjacents. Elle mène aussi une stratégie de remontée de valeur verticale, en investissant dans la fibre, les réseaux électriques, voire des aéroports aux États-Unis. Bref, cet acteur tentaculaire a bien réfléchi sur le déplacement de la valeur à l'échelle internationale et compris la façon de maximiser son profit en absorbant l'ensemble de la chaîne de valeur. C'est pourquoi l'angle fiscal est très important...