Intervention de Yann Sourisseau

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 14 mars 2013 : 1ère réunion
Prostitution et proxénétisme — Audition de M. Yann Sourisseau commissaire de police chef de l'office central pour la répression de la traite des êtres humains ocrteh à la direction centrale de la police judiciaire dcpj

Yann Sourisseau, commissaire de police, chef de l'Office central pour la répression de la traite des êtres humains (OCRTEH) à la Direction centrale de la Police judiciaire (DCPJ) :

Pas nécessairement, mais j'y reviendrai.

Lorsque les rendez-vous sont donnés dans un hôtel, on parle de réseau mobile. Il y a aussi, notamment à Paris, des réseaux dits fixes, où les clients rencontrent les prostituées dans des appartements.

Sur l'ensemble du territoire, les réseaux qui pratiquent la prostitution sur Internet recrutent principalement dans les pays d'Europe de l'Est, en Hongrie, en Roumanie - mais pas dans la communauté tzigane -, dans les républiques baltes.

Les jeunes femmes recrutées arrivent en France avec un visa touristique. Elles sont prises en charge dès leur descente d'avion. Quand elles sont envoyées en province, elles vont dans des hôtels et en changent tous les trois ou quatre jours. La brièveté du séjour dans chaque hôtel évite d'attirer l'attention, notamment des services de police, et empêche aussi qu'un contact direct puisse s'établir avec des clients : aucun client ne doit en effet pouvoir prendre rendez-vous sans passer par le réseau.

Dans ce genre de réseau, les prostituées conservent 50 % de leurs gains. C'est une différence notable avec la prostitution sur la voie publique, où les proxénètes conservent la quasi intégralité du produit des passes, et cela peut représenter des sommes importantes. C'est un travail très pénible, il faut faire jusqu'à dix passes par jour, mais une prostituée peut ramener chez elle, au bout de son séjour de trois mois, quelque 40 000 euros « en cash ». Les victimes de ces réseaux sont donc souvent peu désireuses de collaborer avec la police. Certaines demandent même à prolonger leur séjour : elles sont alors envoyées dans un autre pays, en Italie ou en Allemagne par exemple.

Enfin, il y a aussi un proxénétisme de luxe, qui perdure. Le mode opératoire est le même que celui des réseaux sur Internet mais les hôtels sont des hôtels de luxe et les tarifs sont aussi beaucoup plus élevés : 400 euros la demi-heure, 2 000 euros la nuit, 4 à 5 000 euros le week-end. Les prostituées viennent le plus souvent de Russie ou d'Ukraine, mais il y a aussi des Marocaines, dont les clients sont de riches ressortissants du Moyen-Orient qui viennent en vacances à Paris ou dans des lieux de villégiature réputés.

Nous estimons à 20 000 environ le nombre de prostituées en France, mais c'est une évaluation inévitablement approximative et qui ne fait pas consensus au sein des associations qui viennent en aide à ces personnes.

De la même façon, nous évaluons autour de 3 milliards d'euros les bénéfices tirés chaque année de la prostitution.

Je puis en outre vous préciser qu'en matière de répression du proxénétisme nous avons démantelé 45 réseaux en 2011 et 52 en 2012.

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