Cet amendement tend à rétablir le vote par correspondance sous pli fermé pour l’élection des conseillers consulaires. Ce mode de votation est actuellement autorisé par la loi pour l’Assemblée des Français de l'étranger et pour les élections législatives à l’étranger.
Les pourfendeurs du vote par correspondance sous pli fermé mettent en avant – je cite le rapport de la commission – les « possibilités d’altération de la sincérité du scrutin ».
Je ferai remarquer que ce risque existe dès que l’on s’écarte du vote à l’urne.
Le vote par procuration, lui aussi, peut altérer la sincérité du scrutin, car il oblige le mandant à dévoiler son vote au mandataire, sans que ce dernier lui apporte, en retour, de garantie quant au respect effectif de son choix.
Le vote électronique, quant à lui, fait l’objet de critiques récurrentes, notamment de la part du parti pirate. Outre les problèmes de sécurité informatique, il présente exactement les mêmes déficiences que le vote par correspondance sous pli fermé : risque qu'une personne autre que l'électeur ne vote, risque de pressions sur l'électeur par des membres de son entourage, etc.
Ces limites n'ont pas empêché le Conseil constitutionnel de valider, dans sa décision du 15 février 2013, le principe du vote par correspondance sous pli fermé et du vote électronique. Je ferai remarquer d'ailleurs que, pour sa part, la Cour constitutionnelle fédérale allemande, dans un arrêt du 3 mars 2009, avait conclu que le vote par ordinateur était spécifiquement anticonstitutionnel. Elle avait en effet considéré que l'utilisation d'ordinateurs empêchait les électeurs et les scrutateurs de vérifier le bon déroulement du scrutin et le dépouillement des votes.
Si le vote électronique, bien plus risqué pour la sincérité du scrutin que le vote par correspondance sous pli fermé, est jugé conforme à la Constitution en France, il n'y a pas lieu de mettre en avant la menace d'une altération de la sincérité du scrutin pour supprimer la possibilité du vote par correspondance.
Le second argument allant à l'encontre du vote par correspondance est son coût. Je ferai toutefois remarquer que celui-ci est sans commune mesure avec le coût du vote par internet.
Pour les seules élections législatives de 2012, le coût du vote électronique est, au bas mot, de 1, 5 million d'euros. Dans le budget pour 2011, un million d'euros a été consacré à l'adaptation des outils de vote par internet ; dans le budget pour 2012, près de 500 000 euros ont été nécessaires pour financer les ressources humaines spécifiquement allouées aux évolutions logicielles et à la gestion des opérations de vote électronique, ainsi qu’aux différents tests. Et je ne comptabilise pas ici les centaines de milliers d'euros consacrés à la refonte du portail GAEL – le guichet d'administration électronique –, largement motivée par la nécessité d'utiliser cette plateforme pour le vote électronique.
On m'objectera que certains de ces coûts sont liés à la nouveauté de l’organisation d'un tel mode de votation. Je n'en suis pas si sûre, car l'évolution des technologies informatiques obligera l'administration à mobiliser pour chaque élection de coûteux experts, à acquérir de nouveaux logiciels et à effectuer différents tests.
D'ailleurs, les projections budgétaires de l'étude d'impact montrent que, après la réforme, le vote électronique coûtera environ 3 millions d'euros par année d'élection.
En comparaison, le coût du vote par correspondance est minime. Certes, il a nécessité l'expédition du matériel de vote aux électeurs en ayant fait la demande. Toutefois, cet envoi postal n’est pas plus coûteux que l'envoi par courrier des identifiants pour le vote par internet.
Le principal argument brandi contre le vote par correspondance est le faible nombre d'électeurs qui y ont recouru lors des dernières élections législatives. Là encore, l'argument est fallacieux. Si seulement 2 % des électeurs ont utilisé le vote par correspondance, cet échec est en partie imputable à la nouveauté du vote par internet, très médiatisé, puisque seuls les Français de l'étranger y ont eu accès, ce qui a poussé de nombreux votants à l'expérimenter.