La clé de répartition choisie est présentée comme purement démographique : le nombre de conseillers consulaires serait déterminé par l’importance de la communauté française dans la circonscription.
Je voudrais souligner qu’il serait quelque peu absurde d’appliquer ce principe aveuglément ; cela conduirait à doter les grandes métropoles concentrant les expatriés d’un nombre important d’élus, alors que des communautés plus dispersées, notamment dans des pays « difficiles », se retrouveraient sans représentant.
Il m’aurait semblé utile de prévoir un système panachant les exigences de représentation démographique et le souci d’amélioration du maillage géographique des élus.
Autant le critère démographique fait sens sur un territoire restreint comme celui de la France, autant il ne peut être satisfaisant pour assurer la représentation des milliers de communautés françaises dispersées de par le monde. La multiplication des élus dans de grandes métropoles concentrant un nombre très important de Français n’améliore en rien le service rendu aux résidents de la circonscription, tous les élus ayant les mêmes prérogatives. Elle mobilise un budget qui serait mieux employé s’il permettait l’installation d’un conseiller consulaire résident dans des circonscriptions émergentes ou difficiles, lesquelles, pour l’instant, demeurent rattachées à une grande métropole, parfois malgré d’immenses distances.
Alors qu’il y aurait neuf élus dans les seules villes de Genève, de Londres ou de Bruxelles, trois malheureux élus auraient à couvrir l’ensemble de la Russie et de la Biélorussie ! De même, il n’y aurait que trois conseillers consulaires pour huit pays d’Asie centrale particulièrement difficiles : l’Iran, l’Irak, le Pakistan, l’Afghanistan, le Turkménistan, le Kazakhstan, le Tadjikistan et l’Ouzbékistan.
L’exigence du Conseil constitutionnel que chaque élu représente un « poids démographique » comparable ne fait sens que quant au rôle de grand électeur sénatorial des conseillers consulaires, non pour leur fonction d’élu local. Il suffirait donc de désigner davantage de grands électeurs complémentaires dans ces métropoles pour corriger le déséquilibre démographique.
Du reste, pour ma part, j’aurais souhaité que le nombre d’élus par circonscription soit plafonné à sept.
Comme l’avait démontré le rapporteur de la commission des lois de l’Assemblée des Français de l’étranger, un découpage électoral plus respectueux des conditions locales et de la variété d’implantation des électeurs était possible, à nombre constant de conseillers consulaires. Mais l’opération politique de redécoupage ne souffre pas de telles considérations. C’est ainsi que des pays aux tensions aussi vives que l’Arménie et l’Azerbaïdjan auront à partager les mêmes conseillers consulaires ; c’est ainsi que la Croatie constituera à elle seule une circonscription, alors que l’Albanie, la Bulgarie, la Bosnie, le Kosovo, la Macédoine et le Monténégro seront, eux, regroupés.
Enfin, concernant les conditions de mise en œuvre du suffrage universel direct dans le cadre des circonscriptions consulaires, je trouve dommage que soit éludé le débat sur les conditions d’inscription sur les listes électorales. Le très fort taux d’abstention à l’étranger est largement dû à la présence sur les listes électorales de compatriotes ayant déménagé ou de binationaux n’ayant jamais été en France, voire ne parlant pas français, et n’étant pas intéressés par les rendez-vous électoraux.
Plutôt que d’établir une durée maximale d’expatriation au-delà de laquelle les expatriés perdraient leurs droits civiques – solution retenue en Grande-Bretagne, par exemple –, il me semblerait normal de conditionner l’inscription sur les listes électorales à une démarche volontaire à répéter régulièrement, par exemple tous les trois ans. La citoyenneté resterait ainsi ouverte à tous les Français, mais seuls ceux qui démontrent un intérêt minimal pour les élections seraient intégrés aux listes électorales consulaires. Toutefois, je réalise que c'est un vœu pieu.