Ce choix conduira nécessairement à un déploiement plus rapide de la fibre optique sur les territoires à forte densité de population, les départements ruraux étant, à l’inverse, délaissés.
Ce mécanisme induit donc une réelle inégalité des débits de connexion disponibles au sein d’une même agglomération, les opérateurs privés n’ayant pas le souci de l’aménagement du territoire, mais étant uniquement préoccupés par la rentabilité.
En ce sens, nous partageons les conclusions sévères des rapporteurs, qui démontrent que ce schéma n’est pas adapté, qu’il est inefficace et contraire à l’équité.
Selon nous, pour atteindre ces objectifs, il faudrait que la puissance publique reprenne en main le déploiement des réseaux afin de garantir une nécessaire stabilité, tant en termes d’environnement juridique qu’en termes financiers.
Les collectivités territoriales, qui ont la charge d’assurer la cohérence des déploiements et, en dernier recours, doivent prendre l’initiative d’engager des projets sur les territoires qui ne seraient pas concernés par l’investissement d’opérateurs privés, sont en première ligne. L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, recensait 215 projets de réseaux d’initiative publique, dont 111 couvrant chacun plus de 60 000 habitants. À cet égard, l’Auvergne fait figure, vous le savez d’ailleurs, madame la ministre, de premier de la classe.
En termes de tarifs, comme le souligne le Conseil économique, social et environnemental, cette intervention a permis d’aller au-delà des offres proposées par les opérateurs privés, et de faire bénéficier les particuliers et les entreprises de tarifs moins élevés.
Pourtant, l’action des collectivités territoriales reste contrainte par la priorité donnée aux opérateurs de déployer leurs offres dans les zones rentables, mais aussi par l’impossibilité d’intervenir dans ces zones. Ainsi, les opérateurs privés peuvent aller là où ils veulent et, comme l’a souligné mon collègue Hervé Maurey, « geler » la situation par leurs annonces de déploiement. Cela nuit à l’organisation d’une véritable péréquation.
De plus, l’action des collectivités territoriales est encadrée par une législation multiple – nationale et européenne – et complexe. Cette action ne s’inscrit pas dans l’anticipation, mais est seulement une réaction à une situation de retard, ce qui ne permet pas de soutenir une stratégie pérenne de long terme.
Enfin, je dirai un mot sur l’aide de l’État relative à l’établissement d’un réseau par un opérateur privé. De nombreuses collectivités souhaitent être associées au processus de décision. Elles se positionneraient ainsi dans un véritable rôle de codécision des politiques publiques nationales à l’échelle locale.
Nous prônons donc la pertinence d’un opérateur de réseau unique ayant la capacité de procéder à un aménagement progressif de l’ensemble du territoire. L’application de règles complexes et la présence de multiples acteurs ne permettent pas d’avoir une vue globale du secteur numérique. La mise en place de réseaux publics est préférable à l’octroi de subventions à des opérateurs privés, qui défendent leur seul intérêt individuel. Une telle mise en place est nécessaire si l’on veut éviter les gâchis engendrés par la concurrence, notamment dans les zones rentables, où se superposent d’ailleurs pléthore de réseaux.
Les milliards de profits du secteur démontrent qu’une autre répartition des richesses favorable à l’investissement productif est possible et permettrait un financement propre des infrastructures de réseau.
Nous appelons de nos vœux la résurgence d’un État stratège qui pilote, coordonne et soutienne réellement l’action des collectivités territoriales…