Intervention de Sylvie Banoun

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 3 avril 2013 : 1ère réunion
Financement privé des associations — Audition de Mme Sylvie Banoun sous-directrice de la vie associative et de l'éducation populaire et M. François Vareille secrétaire général du haut conseil à la vie associative hcva sur les travaux d'évaluation et les propositions du hcva

Sylvie Banoun, sous-directrice de la vie associative et de l'éducation populaire :

Personne n'envisage de toucher à la loi de 1901, tout simplement parce que nous ne serions peut-être pas en mesure de concevoir une loi aussi lumineuse aujourd'hui. Il y a, en revanche, peut-être des nécessités de toilettage car certaines dispositions sont désormais obsolètes, telles l'interdiction de rédimer - c'est-à-dire de racheter des cotisations par avance - ou celle de biens de main morte relative aux biens immobiliers qui ne seraient pas destinés à l'utilisation normale de l'association.

La question des évolutions n'a pas été posée. En revanche, celle de la définition de la subvention légale ferait l'objet d'un des premiers articles de la loi sur l'économie sociale et solidaire.

Sur l'articulation entre règles communautaires et nationales, on peut dire de façon très schématique que notre droit prévoit un seuil de 23 000 euros au-dessus duquel une convention est nécessaire, et une règle d'autorisation des subventions dès lors que l'initiative du projet provient de l'association. Dans le cas contraire, on se trouve dans le cadre de la commande publique. Il y a parfois un co-diagnostic ; il convient donc d'envisager une procédure adaptée à ce cas de figure. Le droit communautaire ne s'intéresse pas à la distinction entre subvention et commande publique, le seul critère à prendre en compte étant la nature du financement : en cas d'utilisation de l'argent public, il faut justifier a priori les dépenses. Ce sont donc des logiques orthogonales et l'on note une grande complexité des outils à disposition.

Un bon nombre de collectivités ont recours à une convention même lorsque le seuil de 23 000 euros n'est pas atteint, car c'est un outil de dialogue précieux. Je souhaite insister sur un point : bien sûr le contrôle est nécessaire mais il faut aussi une évaluation de ce qu'on a fait ensemble. Des critères partagés doivent donc être définis.

Vous avez insisté sur un malentendu, relatif aux collectivités qui financent de façon très importante des services mis en place par des associations. Cela conduit certaines d'entre elles à opter pour la commande publique pour que les élus locaux puissent afficher leurs choix de manière transparente. Mais il faut rappeler l'intérêt à long terme de la subvention, lié à la capacité des associations à innover. C'est le cas des centres sociaux subventionnés, qui sont d'autant plus pertinents localement qu'ils reçoivent des subventions à long terme.

Sur la question des marchés et appels d'offres, je rappelle que si l'initiative vient de l'association mais que l'on opte pour la commande publique, alors cela revient à une privation de propriété, de spoliation. Les appels à projets sont différents de la commande publique, car les propositions enrichissent l'action initialement envisagée. Ainsi, par exemple, une telle procédure visant à aborder le cas de violences conjugales permettrait de faire émerger des propositions de foyer pour femmes battues, de service périscolaire, etc.

La question que vous soulevez sur les communes périurbaines ou rurales est l'une des plus difficiles à résoudre. La politique conduite par l'État va dans le bon sens mais on constate des insuffisances. Il existe 170 centres de ressources et d'information pour les bénévoles. Une carte des différents lieux d'information est en train d'être dressée : notre maillage n'est pas ridicule, ce qui ne signifie pas qu'il est parfaitement efficace ou connu.

Ensuite, un certain nombre d'associations s'inscrivent dans des « trous » de l'action publique. Mais, on peut retourner le problème. Un certain nombre de politiques publiques sont nées d'initiatives d'associations. Aujourd'hui, la puissance publique doit faire des choix et certains choix sont particulièrement déchirants.

Dans certains pays, à partir du moment où la puissance publique s'empare de ces sujets, ils deviennent suspects. En France, il n'y a pas cette méfiance radicale à l'égard de la puissance publique.

Concernant l'association qui fait de l'action humanitaire et du micro crédit, on est sur des questions très techniques, même si l'enjeu humain est perceptible. L'administration fiscale considère que cette association entre dans le jeu économique dès lors qu'elle fait du micro crédit. Je considère que le micro crédit en Haïti après le tremblement de terre n'a pas d'enjeu économique et n'a pas la même signification que le micro crédit en Bretagne qui lui n'a pas de vocation humanitaire. Il faut s'intéresser au cas d'espèces.

Sur l'instruction fiscale mise à la consultation en février 2012, il y a eu des frictions sur la définition de ce que l'on entend comme action éligible à l'étranger. Il n'y a pas de contestations sur l'objet. La question de la territorialité des dons renvoie à une image de l'action publique, de la société.

Concernant les associations culturelles complémentaires agréées par l'éducation nationale, le rôle de la puissance publique est très différent selon les secteurs et selon la place qu'elle occupe dans le secteur. Ainsi, en matière d'administration pénitentiaire et de justice, l'État est un acteur dominant et il reste peu de place pour les associations qui agissent dans les conditions qu'on leur a défini. À l'autre bout du spectre, on trouve, par exemple, le secteur du loisir éducatif. Ici, les pouvoirs publics apportent un soutien aux projets des associations. Entre les deux, se situe le monde de l'action sociale où l'État fixe les normes d'intervention et les associations se trouvent comme prestataires de service avec un contrôle important de la puissance publique sur le respect des normes et l'utilisation des fonds.

Sur les tendances des engagements des entreprises, nous n'avons pas de chiffres avérés. Le mécénat est à 85 % le fait de PME et ce n'est pas pris en compte. Mais, il ne diminue pas. En revanche, dans les grandes entreprises, leur conception est plus axée sur le retour sur image. C'est d'autant plus vrai si les règles fiscales sur le mécénat sont restrictives. Si le mécénat est hors objet social de l'entreprise, ce n'est plus considéré comme du mécénat, c'est une opération extra-comptable et donc une malversation.

Concernant la déviation des associations, ça arrive. Elles ne sont pas plus vertueuses que le reste de la population.

Sur la valorisation des locaux, le principe est que la petite association de quartier a besoin d'un local mis à disposition par la collectivité qui l'a construit dans un endroit accessible, mis aux normes, l'entretient et le gardienne. Si vous deviez le valoriser comme vous le considérez dans une immobilisation, cela devient une subvention très confortable. Après, il y a plusieurs choix : certaines collectivités décident d'une valorisation dans leurs comptes ou bien d'autres proposent la mise à disposition exclusive et il faut trouver une valeur de marché comparable. C'est comme une location. Quel que soit le choix, cela doit apparaître dans la convention.

Enfin, sur la complexité croissante des dossiers, il faut se méfier des fausses bonnes idées de présenter un dossier unique. La simplification passe parfois par la diversité des supports.

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