Intervention de Marie-George Buffet

Commission d'enquête sur la lutte contre le dopage — Réunion du 20 mars 2013 : 1ère réunion
Audition de Mme Marie-George Buffet députée ancien ministre de la jeunesse et des sports

Marie-George Buffet :

Ma seule question porte aujourd'hui sur le fait de savoir si l'on peut en rester au contrôle ou s'il faut élargir la lutte contre le dopage par un processus policier. C'est vraiment là ma question.

Je crains que ce processus policier n'entraîne des dénonciations abusives, des suspicions permanentes, etc. C'est extrêmement risqué, mais les événements ont hélas montré que c'était parfois nécessaire pour démonter des systèmes de dopage très perfectionnés et très sophistiqués...

Les pressions, quant à elles, sont de plusieurs ordres. Il y a tout d'abord la pression de l'opinion publique elle-même. Pendant le Tour de France de 1998 -certains d'entre vous, ici, l'ont vécu en direct- des élus me disaient que je ne tiendrais pas, me prédisant que l'opinion publique allait se retourner contre moi. Ce sont là des pressions générales.

J'ai subi des pressions plus précises. Vous parlez de l'équipe de France de football. Lorsque nous déclarons un contrôle sur l'équipe de France de football, alors en stage de préparation à Tignes, tous les médias me tombent dessus de façon très violente : j'empêchais l'équipe de France de se préparer dans de bonnes conditions ! Un déferlement médiatique a alors lieu. Nombre d'émissions de télévision y ont été consacrées et il faut voir la façon dont on a alors parlé de ce contrôle inopiné !

J'avoue avoir flanché dans les heures qui ont suivi, me demandant si je n'avais pas commis une erreur. J'ai eu le sentiment que nous étions complètement isolés et condamnés par l'opinion publique pour avoir perturbé l'équipe de France de football dans sa préparation à la Coupe du monde !

Les autres pressions ont eu lieu au moment des candidatures pour les Jeux olympiques. Elles émanaient de M. Verbruggen, Président de l'UCI et membre du CIO, qui dirigeait la délégation pour les Jeux olympiques de Paris 2008, mais également de MM. Killy et Drut, qui s'en étaient entretenus avec le Premier ministre, demandant que je rédige un courrier indiquant que la loi française ne s'appliquerait pas dans sa totalité au moment de la tenue des Jeux...

J'ai été convoqué à Matignon, pour discuter du contenu de ce courrier ; nous sommes convenus que la France, si l'AMA était mise en place, y adapterait sa législation ce que nous avons fait sous M. Lamour. Cette pression était une pression extrêmement forte.

Nous avons remis ce courrier à M. Verbruggen, lorsque nous avons reçu la délégation en haut de la tour Eiffel mais, pendant l'audition de la délégation française à Moscou, le Premier ministre, Lionel Jospin a été interrogé à trois reprises sur cette même question. La pression s'est donc exercée sur la France jusqu'au bout...

Lorsque Paris a posé sa candidature pour organiser les Jeux olympiques de 2012, un représentant a estimé, dans une interview, que Paris 2012 se présentait mieux que Paris 2008, qui avait connu le problème de la lutte antidopage. Nous avons vu que c'était moins la lutte antidopage que les intérêts des sponsors qui faisait que telle ou telle candidature était retenue ou non par le CIO, la candidature de Paris pour 2012 ayant été battue, comme celle de 2008.

Oui, des pressions ont existé. Je trouve que l'opinion publique, durant toute cette période, a plutôt bien réagi ; j'ai même pu retourner sur le Tour de France sans me faire éconduire. Cette lutte connaîtra toujours la pression, tant est forte aujourd'hui, au-delà des problèmes financiers, l'instrumentalisation politique du sport !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion