Intervention de Pierre Bordier

Commission d'enquête sur la lutte contre le dopage — Réunion du 20 mars 2013 : 1ère réunion
Audition de M. Pierre Bordry ancien président de l'agence française de lutte contre le dopage

Photo de Pierre BordierPierre Bordier :

C'est assez simple : au mois de septembre, le climat était assez compliqué. J'avais prévenu le ministre des sports qu'une enquête importante était engagée aux États-Unis à propos de Lance Armstrong. Je lui avais dit qu'il fallait en informer le Président de République. Cela n'a pas empêché le Président de la République -et c'est son droit- de recevoir Lance Armstrong et de dire qu'il était un modèle pour la jeunesse française...

L'entourage de Lance Armstrong s'est par ailleurs répandu dans les médias pour expliquer qu'il avait demandé mon départ au Président de la République. De la part de Lance Armstrong, c'est vraiment prendre la France pour un pays sous-développé ! C'est totalement scandaleux ! J'en veux donc plus à Lance Armstrong qu'à d'autres, et j'ai répondu à l'époque que je n'imaginais pas un sportif français aller déjeuner avec le Président des États-Unis et lui demander de renvoyer le Président de l'Agence antidopage ! Je trouve ce comportement absolument scandaleux !

J'ai essayé de prendre contact avec l'Elysée pour avoir un démenti. Je ne l'ai pas eu ! Il est très difficile de conduire la lutte antidopage si on a l'impression qu'il n'y a pas un consensus politique général des pouvoirs publics. Le Président d'une autorité indépendante n'est qu'un haut fonctionnaire : il ne peut tout faire !

D'autre part, le secrétaire général et moi-même avons été reçus par le directeur de cabinet de Mme Bachelot, qui nous a fait comprendre que la ligne budgétaire pour 2011 serait la même que celle de 2010 et que nous avions de la chance qu'elle ne soit trop rabotée ! On ne devait nous en verser que la moitié en janvier, la seconde moitié devant être prise sur le fonds de roulement. J'ai trouvé cela excessif. Je pense que c'était un moyen de diminuer le nombre des contrôles et de mettre ainsi l'Agence en difficulté.

Nous avions certes un fonds de roulement assez significatif -de l'ordre de 3 millions d'euros si mes souvenirs sont exacts- mais tout le monde savait que cet argent était destiné à la modernisation du LNDD, qui connaissait des problèmes d'implantation et de développement.

J'ai pensé que ma politique n'était pas soutenue et j'ai préféré me retirer plutôt que de faire semblant de faire de la lutte antidopage. C'est ce que j'ai exprimé dans Le Monde d'octobre 2010.

J'ai ensuite été convoqué par les procureurs américains de Californie pour savoir si j'avais des choses à dire à propos du cas de Lance Armstrong. Nous avons eu des entretiens approfondis, au cours desquels j'ai découvert qu'ils en savaient plus que moi. Nous avons ensuite accompagné le Président de l'Agence américaine, Travis Tygart, dans la mise en place de son rapport, devenu célèbre aujourd'hui, et avons maintenu de bonnes relations avec lui.

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