Intervention de Michel Magras

Réunion du 5 avril 2013 à 14h30
Motion référendaire sur le projet de loi relatif au mariage pour couples de personnes de même sexe — Explications de vote

Photo de Michel MagrasMichel Magras :

Ces enquêtes montrent la contradiction qui existe dans l’opinion : bien que le mariage soit lié à l’adoption, les Français sondés veulent bien du premier, mais non de la seconde.

Ces deux chiffres soulèvent une question : le débat a-t-il été suffisant pour que le lien entre mariage et adoption soit parfaitement perçu ? II faut croire que non !

De même, la présence de ces 1 400 000 Français dans les rues de Paris, le 24 mars dernier, témoigne d’une demande d’expression.

Certes, l’article 11 de la Constitution ne prévoit pas expressément qu’un référendum puisse être organisé sur une question sociétale. Cependant, de par leur caractère systémique, les questions sociétales englobent plusieurs domaines, y compris la politique sociale visée par le même article 11.

Je vous ai tous écoutés, mes chers collègues. De manière unanime, vous reconnaissez qu’il s’agit d’un profond changement de société. J’irai personnellement plus loin : ce projet est une véritable révolution copernicienne, qui ne devrait pas être adoptée alors que subsiste, dans la société, le doute que révèlent les chiffres que je viens de citer.

Pour ces raisons, un référendum ne semble pas anticonstitutionnel et encore moins antidémocratique. Je ne doute pas que nous soyons tous, dans cet hémicycle, profondément respectueux de la Constitution et unanimement attachés à la démocratie, même si nos opinions divergent sur de nombreuses questions.

L’ouverture du mariage aux personnes de même sexe était une des propositions du programme de celui qui a été élu Président de la République. Pour autant, la Constitution ne dit pas que l’élection présidentielle soit incompatible avec le référendum ni que cette dernière vaille référendum. Et surtout, on ne peut que se réjouir de la vivacité de la démocratie chaque fois que l’on donne la parole aux électeurs.

C’est d’ailleurs ce que réclament ceux qui, nombreux, ont manifesté le 24 mars dernier. Le débat a été diffus ces dernières années, depuis le PACS. Il serait exagéré de considérer que la campagne présidentielle a été l’occasion d’un véritable débat.

De plus, si les Français avaient approuvé le mariage des couples de même sexe à travers l’élection présidentielle, la tenue d’un référendum ne viendrait alors que confirmer l’adhésion d’une majorité d’entre eux à cette réforme.

L’organisation d’un référendum aurait également le mérite de permettre à ceux qui n’y sont pas favorables de s’exprimer autrement que dans la rue, autrement que par les centaines de courriels que nous recevons depuis plusieurs semaines, et d’ouvrir enfin un débat. La démocratie doit permettre à tous de s’exprimer. Pouvons-nous transiger sur ce principe ?

La suspicion d’homophobie a largement occulté le sujet de fond et a cristallisé les récents débats. Ainsi, ceux qui n’étaient pas favorables à l’ouverture du mariage aux couples de même sexe ou défavorables à l’adoption, ont été autant, voire davantage contraints de se défendre de toute forme d’homophobie que d’expliquer en quoi ils étaient attachés à la famille, à un repère culturel fort.

En réalité, c’est là que se situe l’enjeu du mariage. C’est bien pour cela que la Cour européenne des droits de l’homme, renvoyant à la souveraineté des États le sujet de l’ouverture du mariage aux personnes de même sexe, rappelle que le mariage est profondément enraciné dans la culture de chaque pays.

L’ouverture du mariage aux couples de même sexe n’est pas qu’un changement de « périmètre » ; c’est un projet qui touche à un repère culturel profond et qui nous renvoie, nous, législateurs, à une dimension essentielle de notre fonction.

En effet, si l’on considère que l’ouverture du mariage est inéluctable parce qu’elle correspond à une évolution de la société, cela signifie-t-il que Parlement devient une chambre d’enregistrement des mœurs ? Pourtant, l’une des missions essentielles des législateurs que nous sommes est de définir des limites à la société.

En résumé, ce texte repousse les limites souhaitées par la société car, si les Français sont favorables à l’union des couples de même sexe, ils ne le sont majoritairement que si elle ne s’accompagne pas de l’adoption : seuls 44 % d’entre eux expriment une opinion totalement favorable. Or le projet de loi n’entend pas cette nuance.

Pour cette raison, à titre personnel, je voterai en faveur de la motion référendaire. Je pense, mes chers collègues, que nous ne devrions pas rater l’occasion qui nous est offerte de consulter le peuple français. §

2 commentaires :

Le 06/02/2022 à 20:01, aristide a dit :

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Ils s'en foutent pas mal du peuple français, et ils se disent socialistes en plus, ces hypocrites...

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

Le 06/02/2022 à 20:04, aristide a dit :

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C'est d'ailleurs pour cela que les extrêmes progressent : la mascarade a ses limites, et le peuple est poussé vers la violence, puisque la pensée rationnelle n'existe plus.

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

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