Intervention de Dominique Baudis

Délégation sénatoriale à l'Outre-mer — Réunion du 3 avril 2013 : 1ère réunion
Audition de M. Dominique Baudis défenseur des droits

Dominique Baudis, Défenseur des droits :

Le Médiateur de la République n'existe plus, le Défenseur des droits ayant repris ses compétences et ses équipes. L'éventail de nos modes d'action juridiques est large : de l'accord amiable jusqu'à une intervention dans un contentieux devant une juridiction civile, pénale, administrative, y compris au plus haut niveau judiciaire. Nous sommes habilités à déposer des observations devant un tribunal. Nous ne sommes pas partie au procès, mais nous apportons officiellement notre contribution à l'élaboration de la décision de justice. Nous choisissons le mode d'action en fonction de l'intérêt du réclamant et de la nature du dossier.

Le Défenseur des droits a des moyens d'enquête et d'investigation étendus : il peut procéder à une vérification sur place dans des locaux publics et privés ; aucun secret, à l'exception du secret défense, ne peut lui être opposé ; les personnes ne peuvent se soustraire à ses convocations ; il ne peut pas infliger d'amendes, mais a la faculté de publier, le cas échéant au Journal officiel, un rapport spécial sur une affaire qui ne se serait pas conclue selon ses observations. En général, notre préférence va à la médiation, ce qui est le cas le plus fréquent (80 %). Mais une centaine de fois par an, nous allons au tribunal, représentés par un avocat. 90 % des jugements vont dans le sens de nos observations.

Les problèmes de Mayotte sont indissociables de ceux des Comores, où je me rendrai dans un mois, dans un contexte non gouvernemental, la francophonie. Les Comores viennent de créer une institution de défense des droits de l'homme, qui n'a pas de moyens et qui demande une aide. Je vais essayer d'amorcer avec eux des relations qui permettraient de déboucher sur un dialogue politique, et d'aborder des sujets comme celui des enfants.

À Mayotte, rien ne va... mais des actions peuvent être réalisées rapidement. C'est le département français le plus concerné par l'immigration. Or, l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'a pas d'antenne à Mayotte ! De même, les problèmes concernant les enfants sont innombrables, alors qu'il n'y a pas d'union départementale des associations familiales. Il existe environ 3 000 à 4 000 mineurs isolés étrangers, la plupart des Comoriens, dont les parents ont été reconduits aux Comores et ont abandonné leurs enfants à Mayotte. Pour la France entière, ce chiffre est de 6 000 ! 800 de ces enfants isolés à Mayotte n'ont aucun référent et vivent dans les forêts à la lisière des agglomérations. Ils se nourrissent sur les décharges publiques et sont les auteurs d'une petite délinquance de survie. Ils ont aujourd'hui de 12 à 15 ans ; que se passera-t-il quand ils en auront 20 ? Si ce problème n'est pas traité aujourd'hui dans l'urgence, on se prépare un avenir terrible. Il n'existe aucun foyer d'accueil pour l'enfance en danger. Le seul foyer qui existe à Mayotte relève de la protection judiciaire de la jeunesse et ne comptait en 2012 que sept places... Il faut beaucoup plus de moyens qu'ailleurs, alors qu'il y en a beaucoup moins. Dans la perspective des crédits européens qui seront alloués à Mayotte en 2014, les Mahorais devront présenter très vite des projets structurés : il faut affecter ces crédits au traitement de l'enfance en danger !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion