Intervention de Nicolas About

Délégation sénatoriale à la prospective — Réunion du 13 mars 2013 : 1ère réunion
Réunion de la délégation : Audition du conseil supérieur de l'audiovisuel csa sur les travaux relatifs au développement de la télévision sociale

Photo de Nicolas AboutNicolas About, conseiller au CSA :

Je tiens tout d'abord à remercier le président Bourdin pour cette invitation à présenter devant vous cette étude sur la télévision sociale, que nous avons rapportée il y a moins d'un mois devant l'assemblée plénière du CSA.

Un rapport complet vient de vous être distribué. Néanmoins, comme celui-ci est assez volumineux, nous allons nous concentrer sur sa synthèse.

Le terme de « télévision sociale » ou « social TV » est utilisé pour désigner des technologies qui apportent un enrichissement des contenus, ainsi qu'une interaction aussi bien entre les spectateurs et le contenu qu'ils regardent ou qu'ils souhaitent regarder - cette notion est importante -, qu'entre les spectateurs eux-mêmes autour de ce contenu. Le terme recoupe différentes modalités d'interactions. Celles-ci peuvent être un commentaire - j'aime, je n'aime pas -, une recommandation, une participation à un jeu ou à un vote pour des candidats, ou encore dans certains cas une possibilité de piloter un programme : par exemple, pour certains matchs de tennis, le téléspectateur peut, sur son second écran, regarder le match sous un angle différent, c'est assez extraordinaire.

La définition se décline d'abord sur des modalités d'interactions. Ensuite, elle peut se réfléchir dans des acceptions différentes selon la vision portée : soit avec une vision resserrée, considérant uniquement la télévision et les réseaux sociaux ; soit avec une vision plus large, comprenant tous types de services qui offrent un enrichissement et des interactions possibles avec les contenus télévisuels : télévision de rattrapage - MyTF1, Youtube -, reconnaissance des oeuvres musicales avec Shazam ou encore des applications vous permettant d'entrer directement en relation avec les personnes regardant la même émission - TV check -. Ainsi, la définition de télévision sociale n'est pas figée.

De plus, l'économie de ce secteur est en train de se construire. Tout évolue rapidement, nous allons d'un téléspectateur engagé vis-à-vis du programme à un éditeur qui tente de reprendre l'initiative sur l'activité sociale liée à ces contenus.

Nous avons choisi de vous présenter deux cas pratiques, le premier français, le second américain.

Le premier est The Voice saison 2, qui illustre le déroulement du processus de la télévision sociale en trois temps.

Le premier temps ou « avant l'émission ». Dès la fin de la saison 1, l'éditeur stimule les réseaux sociaux autour de l'actualité des membres du jury ou de l'ouverture du casting de la nouvelle saison. Cela permet de faire monter la pression, comme ce fut le cas lors de cette saison 2 sur MyTF1, Facebook et Twitter. Cent trente-deux bandes annonces ont été diffusées sur TF1 entre le 11 janvier 2013 et le 2 février 2013, plus une campagne publicitaire tous supports (affichage, presse radio, etc.) la semaine précédant le retour de l'émission. Ainsi, les moyens engagés pour essayer d'attirer les téléspectateurs vers la deuxième saison ont été importants. Le coût global net de l'opération est estimé entre 300 000 et 500 000 euros.

Le deuxième temps ou « pendant l'émission ». Lors de ce temps, les téléspectateurs sont invités, à travers les réseaux sociaux, à commenter les prestations des candidats, à faire des pronostics, à voter et à sélectionner des extraits de programmes pour les publier sur Facebook et Twitter. Par exemple, sur le second écran, où il faut préalablement vous connecter à l'application, vous pouvez vous synchroniser avec le contenu, puis accéder à des outils d'interaction pour ainsi extraire une partie de l'émission afin de partager par la suite cette vidéo avec tous vos amis, qui eux-mêmes la renverrons, etc. C'est un phénomène connu.

Le troisième temps ou « après l'émission ». Ce temps permet de poursuivre la relation avec le spectateur. Ainsi, grâce à la rubrique « commerce », les meilleures prestations des candidats peuvent être téléchargées au coût de 1,29 euro. Nous n'avons pas encore d'idée sur l'impact de cette dernière partie puisque ce processus a été mis en place pour la première fois lors de cette émission.

Pour résumer, l'intérêt des éditeurs pour le séquençage de la relation avec les téléspectateurs est le suivant :

- avant l'antenne, le but est de promouvoir le programme : comme dans toute opération de communication, l'évènement est annoncé pour créer un premier cercle de public ;

- pendant l'antenne, il s'agit de conserver l'audience pour éviter que les téléspectateurs zappent, d'agréger les publics, ou encore d'enrichir les programmes de télévision ;

- après l'antenne, l'objectif est de fidéliser le public en prévision des saisons à venir et d'élargir l'audience à de nouveaux publics en reformatant le contenu pour sa mise en ligne comme nous l'avons vu tout à l'heure avec les enregistrements proposés pour The Voice.

Le Super Bowl est le second cas d'école. C'est l'évènement ayant la plus forte audience télévisuelle au monde avec 108 millions de téléspectateurs. Pendant la finale du championnat du Super Bowl, 24,1 millions de tweets ont été échangés. À titre d'indication, lors de l'émission The Voice, nous avons compté 218 000 tweets, score élevé pour la France mais qui reste à un niveau faible au regard de celui suscité par le Super Bowl. Autre point remarquable, l'année dernière alors qu'il était diffusé sur une autre chaîne, le Super Bowl avait rassemblé 111,3 millions de téléspectateurs mais produit seulement 13,7 millions de tweets. D'une année sur l'autre, le nombre de tweets a pratiquement doublé alors que le nombre de téléspectateurs a baissé, c'est dire l'importance de ce phénomène.

Il va de soi qu'au CSA nous n'employons pas le terme tweet, nous parlons de « gazouillis » !

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