...observant que la vitalité des services financiers constituait une des conditions du maintien de La Poste dans les zones rurales et les zones urbaines sensibles.
Ce point est important. En effet, nous pouvons craindre que les lieux où pourront s'effectuer la totalité des services financiers ne préfigurent le réseau postal. A cet égard, je rappellerai deux chiffres connus. Le réseau bancaire de proximité du Crédit Agricole - établissement dont je reparlerai ultérieurement au sujet de la concurrence bancaire - compte 7 500 points. La comparaison avec les 17 000 points postaux ne laisse pas de nous inquiéter quant à la maquette future du réseau de La Poste, dont nous craignons, à terme, la normalisation. Je pense donc que les deux problèmes sont liés.
J'observe du reste que, dans les protocoles qui sont soumis aux élus - je dispose du projet de convention territoriale d'une commune avec le directeur départemental de La Poste de Seine-et-Marne -, la présence des services financiers n'est pas explicitement mentionnée.
Notre deuxième inquiétude concerne la fermeté du Gouvernement pour résister à la pression du secteur bancaire, lequel conteste ouvertement, et depuis longtemps, le projet de banque postale - j'ai cité le Crédit Agricole parce qu'il nous a écrit et je suppose que la question est sur la place publique.
Cette inquiétude est renforcée par l'absence de référence explicite, dans le texte, à l'accès immédiat à tous les services financiers de droit commun, évoquée par mon collègue Jean-Pierre Sueur : je veux parler des crédits à la consommation. En effet, au cours de l'audition du 1er mars, le président Bailly indiquait que la possibilité pour La Poste de délivrer des crédits immobiliers sans épargne préalable - « sans apport personnel » dit-on dans le jargon du métier - permettrait à peine de stabiliser la perte annuelle de clients estimée à 70 000 et représentait la seule manière de régénérer la clientèle, notamment chez les jeunes.
Dès lors, on peut s'interroger sur la viabilité, à terme, de l'établissement que vous voulez créer ! Je rappelle le calendrier qui nous a été indiqué : l'établissement de crédit devra être agréé par le CECEI avant que s'opère le transfert des services financiers, prévu avant le 1er janvier 2006.
Ne s'agit-il pas, de la part du Gouvernement, de faire droit à une revendication ancienne de La Poste en donnant une base juridique à la banque postale, prévue dans le contrat de plan 2003-2007, mais de ne pas lui donner les moyens de sa viabilité ? Agir ainsi, je le dis tout net, c'est faire une très grande confiance au marché et, d'une certaine manière, se laver les mains de l'avenir de La Poste !
C'est cette ambiguïté fondamentale dans la position du Gouvernement qui nous inquiète profondément et qui nous conduira, si nos amendements sont rejetés, à voter contre l'article 8. Mais, monsieur le ministre, il n'est pas tout à fait minuit : vous pouvez encore vous expliquer davantage que vous ne l'avez fait tout au long de ce débat parlementaire !