Intervention de Alain Jeanroy

Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques — Réunion du 19 mars 2013 : 1ère réunion
Deuxième Audition publique ouverte à la presse sur « les nouvelles mobilités sereines et durables : concevoir des véhicules écologiques »

Alain Jeanroy, directeur général, Confédération générale des betteraviers :

La politique française en matière de biocarburants a été initiée dans les années 90, je le rappelle, notamment avec la production et l'incorporation d'abord de TPE dans les essences. Elle a ensuite été accélérée à partir de 2005, en écho à la directive « Promotion des biocarburants » qui a été adoptée par l'Union européenne en 2003, fixant des objectifs indicatifs à 5,75 %. Cette politique répondait à deux objectifs : réduire les émissions de gaz à effet de serre et réduire les dépenses énergétiques de l'Union européenne.

Ces objectifs restent pleinement d'actualité - et d'ailleurs les thématiques de cette table ronde l'illustrent -, avec l'adoption du « Paquet Énergie-Climat » en 2009, et notamment la directive européenne sur les énergies renouvelables (ENR) qui établit l'objectif contraignant, d'une part, de 10 % d'énergies renouvelables dans les transports en 2020, et l'objectif du Grenelle, d'autre part, de 23 % d'énergies renouvelables dans la consommation totale d'énergie du pays.

C'est pourquoi il importe de poursuivre l'impulsion donnée voilà maintenant huit ans. Les filières françaises ont répondu en investissant massivement : 1 milliard d'euros par filière, et en créant, ou en maintenant, des milliers d'emplois dans notre pays : 8 900 emplois directs, indirects et induits pour la seule filière éthanol.

La France occupe aujourd'hui les tout premiers rangs européens. En matière de production de bioéthanol, elle est à la première place, loin devant l'Allemagne ou l'Espagne. En matière de production de biodiesel, elle occupe le deuxième rang derrière l'Allemagne.

Le bilan environnemental a été totalement mis à jour en 2010 sous l'égide de l'ADEME, avec des résultats probants, tant en termes de réduction des gaz à effet de serre que d'efficacité énergétique. Depuis 2010, des critères de durabilité ont été imposés par Bruxelles : réduction minimale des gaz à effet de serre, statut des terres utilisées, protection de la biodiversité et des forêts primaires. Le respect de ces critères est effectif, documenté par une certification exemplaire en matière de durabilité.

Reste la question du changement d'affectation des sols indirect, qui est en cours d'instruction à Bruxelles sur la base d'une proposition de directive faite par la Commission européenne en octobre 2012. Malheureusement, vous savez qu'aucun expert international n'a le même avis.

Dès lors, on peut considérer que les biocarburants ont fait la preuve qu'ils répondent en tous points aux objectifs qui leur ont été fixés.

En ce qui concerne la concurrence avec l'alimentation, rappelons ici deux éléments d'importance : la production française d'éthanol nécessite de consacrer seulement 1 % de toutes les surfaces agricoles. Chaque hectare apparemment consacré au biocarburant fournit en moyenne l'équivalent d'un demi-hectare pour l'alimentation animale. Il y a donc complémentarité et non pas opposition.

Depuis 2010, l'objectif d'incorporation est fixé à 7 % et il peine à être atteint, en particulier par l'éthanol, alors que tous les moyens sont réunis pour que ce soit le cas. Je vous rappelle qu'il existe un certain nombre de dispositifs visant à rendre obligatoire cette incorporation.

Nous étions prêts à faire des investissements en 2012. Malheureusement, ces investissements dans de nouvelles unités de production, avec des créations d'emplois en zone rurale, ont été arrêtés, du fait de la décision de la France de faire une pause. Jusqu'à quand ? Je ne le sais pas.

La voie des biocarburants est donc à ré-explorer pour permettre d'apporter des réponses aux grands enjeux dans les secteurs des transports. Les objectifs établis pour 2020 doivent bien sûr être préparés dès aujourd'hui. Et j'ajoute qu'il n'y aura pas de deuxième génération sans la première génération. Je pense que ce point est très important. Nous-mêmes, ceux qui avons investi des milliards d'euros dans la production de biocarburants en France, nous sommes dans la deuxième génération.

Un autre point doit également ne pas être oublié. La France pourrait avoir un rôle stratégique à l'avenir, en devenant la productrice de référence de biocarburants en Europe.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion