Nous allons changer d'échelle. Quand on n'a ni soleil ni vent, il nous faut quand même de l'électricité. Je propose donc que nous nous situions au niveau du système complet production-distribution-transport. Cela nécessite une approche systémique et pluridisciplinaire. Nous sommes dix chercheurs à plein temps à travailler sur ces sujets-là dans le cadre d'une grosse chaire Supélec/Centrale financée par EDF.
Réduire la consommation, cela nécessite une évolution technique et une révolution culturelle et sociale, ce que nous appelons « la ré-évolution ». Jusqu'à présent, les systèmes de production et de distribution étaient des opérations passives. Nous avions quelques centres de production, une quinzaine, et puis les flux de distribution vers les clients étaient uniques. Actuellement, rien que pour le photovoltaïque, nous avons 40 000 points de production supplémentaires, qui font que les flux sont bilatéraux, et donc on va restituer de l'énergie. Cela pose énormément de problèmes pour la gestion intelligente de toute cette complexité.
Il y a de la complexité structurelle. Elle est liée à l'hétérogénéité des composants entre photovoltaïque, éolien, etc. La dimensionnalité : 40 000 points de production photovoltaïque. Je ne vous dis pas combien on aura de points quand le véhicule électrique va se déployer à grande échelle. Cela se comptera par centaines de milliers, voire des millions. Avec la stricte nécessité d'avoir couplé les systèmes informatiques temps réel, de disposer des données qui vont bien pour le pilotage de ces outils. C'est tout le problème de la sûreté du fonctionnement lié à ces éléments. Le piratage des données informatiques sera aussi important que la défaillance d'une installation ou d'un composant électrique du réseau. EDF nous dit : aidez-nous pour que nous ne devenions pas le fournisseur de Google, et que ce ne soit pas Google qui dispose de toutes les données nécessaires à la gestion de ces réseaux ainsi qu'à leur sécurité.
Nous devons donc avoir une fiabilité couplée, structurelle et systémique. Et ensuite, il y a de la complexité dynamique opérationnelle. En temps réel, il ne suffit plus de gérer quelques tranches de centrales nucléaires à arrêter ou à mettre en route, mais des millions de points. Nous faisons des recherches sur tous ces sujets. Je pense que le niveau de sécurité de ces systèmes doit au moins être comparable à celui des centrales nucléaires.