E-Cube est un cabinet d'études spécialisé dans l'énergie. Mes domaines de prédilection sont plutôt les systèmes électriques, les systèmes énergétiques, pas forcément le transport. Mais nous avons été amenés à travailler pour des constructeurs automobiles et également des grands énergéticiens autour de la problématique du lien entre le transport et les systèmes énergétiques, en particulier sur le lien entre le véhicule électrique et les systèmes électriques.
Je suis un peu mal à l'aise avec l'étude RTE/ADEME qui a été citée, que je ne connais pas, et qui prévoit une augmentation des pics de consommation. Mais du point de vue de la technologie existante et de l'économie, quand on analyse les véhicules électriques par rapport au système électrique, on arrive plutôt à identifier des valeurs pour le système électrique.
Ces valeurs, M. Antoni en a expliqué certaines. La première, c'est la capacité à pouvoir reporter de la consommation électrique d'une maison à un autre moment, en s'appuyant sur la batterie du véhicule électrique pour l'autoconsommation. C'est quelque chose de possible, et pas uniquement avec du photovoltaïque. Dans le cas d'un déplacement travail-domicile, le véhicule, quand il revient au domicile à 18 heures, n'a pas épuisé ses 120 km d'autonomie. Il lui reste encore suffisamment de capacité pour pouvoir éventuellement subvenir, en partie, aux besoins de consommation de la maison, et ainsi effacer la pointe. La valeur d'effacement de pointe sera donc de plus en plus rémunérée, puisque la loi vise à rémunérer davantage les capacités de façon à passer la pointe électrique. Ce service sera de plus en plus rémunéré, et donc plus intéressant à mettre en place.
Deuxièmement, à l'horizon 2020-2025, il se peut qu'en France on dispose d'un million de véhicules électriques ou hybrides qui seraient connectés à une charge de 3 kW. Potentiellement, 3 gW seraient donc mobilisables. Ils ne seraient jamais mobilisables à un instant T, tous en même temps, mais avec des modèles cascado-cycliques, avec le foisonnement, on est capable d'en mobiliser une certaine partie. Et l'on est capable de subvenir à des besoins d'équilibrage en permanence de RTE pour assurer le fonctionnement du système électrique français. Là encore, cela se rémunère, et de nouveau il y a une valeur qu'on pourrait monétiser dès aujourd'hui sur le système électrique français.
La troisième valeur, c'est la deuxième vie de la batterie. Il est prévu d'arrêter la batterie en mode embarqué quand on arrive à un niveau d'efficacité de la charge de la batterie de l'ordre de 80 %. Que va-t-on faire de ces batteries par la suite ? Il y a deux modèles. Cette batterie, on peut la transformer en mode stationnaire, éventuellement en la mettant dans le domicile de la personne qui a acheté le véhicule électrique. Les ordres de grandeur de cette transformation de batterie embarquée en batterie stationnaire sont de l'ordre de 600 à quelques milliers d'euros. Il y a beaucoup de différences sur la valorisation actuelle. Mais si on arrive à faire ce type de transformation, on a de nouveau une valeur qui est liée au stockage décentralisé. Le second modèle, c'est un opérateur qui choisit de reconstituer un stockage centralisé extrêmement important. Pour cela, il connecte l'ensemble des batteries pour constituer une sorte de barrage hydro-électrique mobilisable sur simple demande, et selon le même mode opératoire qu'un barrage, c'est-à-dire en écoulant sa capacité de production au moment où les prix sont les plus chers, et en se chargeant sur le réseau au moment où les prix sont les moins chers.