Cette réflexion sur la mobilité mêle traditionnellement les questions de la crise climatique et de la crise énergétique, et elle doit intégrer la question de la crise sanitaire. L'expression « crise sanitaire » n'est pas encore passée dans les moeurs, néanmoins il faut caractériser de cette façon la croissance des maladies chroniques, non seulement dans les pays développés, mais sur l'ensemble de la planète.
En France, cette crise sanitaire se manifeste par le fait que 83 % des dépenses de santé sont liées aux maladies chroniques : cancer, maladies cardiovasculaires, maladies métaboliques, maladies respiratoires principalement. 25 millions de personnes sont concernées directement par ces maladies chroniques. Et si l'on regarde les Affections de longue durée (ALD), d'après les chiffres du régime général, 63 % des dépenses de santé sont liées à ces maladies chroniques qui concernent 9 millions de personnes, avec une progression de 4 à 5 % par an.
La crise sanitaire est donc majeure. Elle a pour conséquence de faire imploser le système de santé aujourd'hui. Si l'on compare les dépenses pour ces ALD en 2009 par rapport à 2003 pour ces trois grandes catégories de maladies, on est à 10 milliards d'euros, c'est-à-dire dans l'ordre du déficit de l'assurance maladie.
Alors tout n'est pas lié au transport. Mais nous disposons aujourd'hui d'éléments qui permettent de penser que le transport est important, principalement à travers l'étude Aphekom, pilotée en France par l'Institut national de veille sanitaire (INVS), qui évalue le coût sanitaire sur 25 villes totalisant 39 millions d'habitants, dont 9 villes françaises totalisant 12 millions d'habitants. Les niveaux de coûts liés aux particules PM2.5 sont en moyenne dans une ville comme Marseille à 18,5, à Paris à 16,4. En termes de maladies chroniques, le coût, pour les personnes de +65 ans, est composé à 32 % de maladies coronariennes, 25 % de broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) et 18 % d'asthme. Ces aspects ne sont pas du tout marginaux. Ils sont majeurs.
Selon le calcul fait par Aphekom sur l'ensemble des 25 villes, le respect de la norme à 10 microgrammes/m3 (10 ug/m3) de PM2.5 permettrait d'éviter 19 000 décès, dont 15 000 causés par des maladies cardiovasculaires. Le bénéfice économique associé au respect de cette valeur est estimé à 31,5 milliards d'euros par an. Cette estimation sur 25 villes nous donne une idée du coût à l'échelle de la France, où à peu près la moitié de la population vit en zone urbaine.
Autre élément important à prendre en considération, c'est l'espérance de vie. Selon le discours dominant, elle progresse. Effectivement, l'espérance de vie des générations anciennes continue à progresser. Mais les générations suivantes n'auront vraisemblablement pas la même espérance de vie. Un premier signe, c'est que l'espérance de vie diminue en France. Selon l'étude Aphekom, pour un Marseillais de 30 ans, l'espérance de vie baisse de 7,5 mois à cause de la pollution particulaire. Pour Paris et Lille, cette baisse est de 5,8 mois. À titre de comparaison, à Londres, la baisse est de 2,5 mois. On doit certainement pouvoir se fixer comme objectif la situation londonienne.