Intervention de Bernard Julien

Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques — Réunion du 19 mars 2013 : 1ère réunion
Deuxième Audition publique ouverte à la presse sur « les nouvelles mobilités sereines et durables : concevoir des véhicules écologiques »

Bernard Julien, ENS-Cachan :

D'après les statistiques, le parc automobile de plus de vingt ans était de 400 000 véhicules en 1994. En 2008, on était déjà à 1,3 million. On ne pourra pas résoudre la question écologique si la question du rajeunissement du parc n'est pas également posée. Et si les technologies alternatives génèrent des surcoûts d'acquisition, alors le problème se posera de la même manière.. Il y a là une sorte de gare de triage pour sélectionner les technologies où l'on a envisagé la trajectoire qu'il convient de reposer.

La deuxième question essentielle pour formuler le cahier des charges, c'est la question de l'emprise au sol. Elle est rarement posée. Il y a au moins deux manières de la résoudre. Premièrement, c'est la taille du véhicule. Cela a été évoqué par les offreurs qui considèrent qu'il y a aussi ce problème. Les encombrements sur le périphérique parisien ne seraient pas les mêmes si chacun roulait en Smart, et s'il y avait moins de véhicules de 2,5 tonnes manoeuvrés par des personnes seules. Cette question doit donc être posée. Deuxièmement, la question du partage se pose aussi. Quitte à poser la question de l'auto-mobilité, demandons-nous si l'on veut continuer à avoir un parc développé de manière extensive, avec une incapacité notoire à le renouveler et à en contrôler les caractéristiques. Est-ce qu'on maintient ce système, avec des véhicules en propriété gérés comme bon leur semble par des ménages ? Ou est-ce qu'on en profite pour le changer partiellement ou totalement, avec des systèmes qui soient davantage partagés ? Là encore, les technologies et leur faisabilité se posent de manière très différente selon que l'on raisonne dans un système ou dans un autre.

Je termine par la question de la gouvernance des parcs. On l'a bien vu à travers la question de la taxation du diesel ces temps-ci. Évidemment le parc est devenu ingouvernable. Pourquoi ? Parce qu'il est extrêmement hétérogène, il fait peser sur les ménages des contraintes très disparates. Selon que je puisse m'équiper de manière alternative ou non, le péage urbain m'est supportable ou insupportable. Selon que je puisse aller vers un véhicule hybride ou électrique, ou non, la taxation du diesel m'est ou non supportable. Si l'on n'a pas la faculté d'homogénéiser a minima le parc et ses usages, ou en tout cas de calibrer les solutions que l'on retient ou que l'on privilégie en fonction de ces questions, alors on aura tendance à développer des modèles qui ne seront pas politiquement soutenables. Et je crois qu'il convient de remettre en permanence sur le tapis ces trois questions : la question sociale, la question de l'emprise au sol et la question de la gouvernance des systèmes de mobilité, en particulier les parcs automobiles qu'on installera à cette occasion.

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