Après le cours de droit constitutionnel que nous venons d’entendre, je tiens à rappeler qu’aucun principe ne présente une valeur absolue. Tous les principes fondamentaux de la République sont même, dans l’absolu, contradictoires : l’égalité, la liberté, le droit de propriété, etc. À cet égard, la loi, comme la jurisprudence du Conseil constitutionnel, ne fait qu’établir des compromis entre des principes contradictoires.
Pour les élections législatives, le Conseil constitutionnel a effectivement recommandé un tunnel de plus ou moins 20 %, avec des dérogations possibles, notamment pour l’outre-mer. Cependant, il a déjà admis que, pour des raisons territoriales ou institutionnelles, de fortes dérogations puissent être apportées au principe d’égalité dans la représentation du suffrage.
Lorsqu’on a mis en place les tableaux de la représentation de l’intercommunalité, le principe d’égalité devant le suffrage, dont vous défendez une interprétation absolue, aurait exigé un scrutin proportionnel avec une marge de plus ou moins 20 %. Or des aménagements ont été adoptés, comme la règle selon laquelle une commune ne peut en aucun cas être majoritaire au sein d’une intercommunalité. Ces aménagements constituent autant de dérogations – et celle que j’ai mentionnée est de taille – au principe d’égalité dans la représentation.
De surcroît, par une jurisprudence certes ancienne, le Conseil constitutionnel a lui-même largement tempéré ce principe, ne serait-ce que pour la détermination du corps électoral des sénateurs : le mode de calcul adopté est bien loin de respecter un strict principe d’égalité dans la représentation du suffrage, c'est-à-dire une totale proportionnalité. Et c’est précisément l’argument de la représentation des territoires et des collectivités moins peuplées qui a été alors avancé !
Ainsi, ce qui vaut pour une élection législative – et encore l’outre-mer peut-il faire exception ! – ne vaut pas nécessairement pour une élection territoriale. D’où ce constat terrible : le Parlement est en train de s’autocensurer, de présumer la jurisprudence du Conseil constitutionnel et, partant, de limiter lui-même ses propres pouvoirs en renonçant à la représentation des territoires ! §Or nous convenons à l’unanimité, du moins au sein de cette assemblée, de la pertinence de cette représentation !
Monsieur Richard, nous jugeons certes le présent texte constitutionnellement contestable, mais nous visons là le binôme et un certain nombre d’autres points, non la représentation des territoires ! Ce n’est pas sur ce sujet que nous formerons un recours ! Au contraire, nous pouvons fournir un argumentaire en faveur d’une meilleure représentation territoriale, surtout s’agissant d’élections locales.