J'ai été nommée directrice de l'Opéra de Lille en 2001. Je suis la seule femme directrice d'opéra en France. Je n'ai jamais rencontré d'obstacles dans mon parcours qui seraient liés au fait que je sois une femme. Quand j'ai découvert les chiffres des rapports de Reine Prat, j'ai donc dû analyser la situation, davantage vis-à-vis de mon équipe, très féminine, que de moi-même. Je travaille avec un orchestre en résidence à l'opéra de Lille dirigée par une femme, Emmanuelle Haïm ; avec un certain nombre de chanteuses ; et avec des permanents. Dans mon équipe, les postes à responsabilité sont tenus par des femmes.
S'agissant des stéréotypes, je ne partage pas entièrement le constat qui a été fait sur la place de la femme dans le répertoire classique. Je crois que certains textes anciens montrent des personnages de femmes magnifiques - d'ailleurs interprétés par de grandes tragédiennes qui sont elles-mêmes extraordinaires - qui cherchent à exister et luttent contre la pression qui leur est imposée. Ce ne sont en aucun cas des personnages caricaturaux qui seraient cantonnés à exprimer la souffrance de la femme.
De même, je ne suis pas sûre que la place des femmes dans l'opéra contemporain soit la plus intéressante... on tombe dans d'autres types de caricatures, me semble-t-il. Au contraire, la place des femmes dans l'opéra classique est belle et valorisante.
Dans la danse, il y a un mouvement magnifique, d'ailleurs porté par des chorégraphes femmes, mais on rencontre aussi de nombreux stéréotypes, même dans la danse contemporaine, auxquels je m'oppose. Dans le rapport de la danse avec le public, tout ne devrait pas être revendiqué dans la création artistique.