Intervention de Nicolas Dufourcq

Commission des affaires économiques — Réunion du 15 mai 2013 : 1ère réunion
Doctrine d'intervention de la banque publique d'investissement bpi — Audition de M. Nicolas duFourcq directeur général de la bpi

Nicolas Dufourcq, directeur général de la Banque publique d'investissement :

Toutes ces questions sont fondamentales. La doctrine, c'est la loi de l'entreprise : elle n'est pas indicative, elle est contraignante. Elle est validée par le Parlement et actée définitivement par un prochain conseil d'administration, ce sera la « loi » de la branche fonds propres de bpifrance. Il est prévu que, pour des cas très exceptionnels, un débat puisse avoir lieu en conseil d'administration qui devrait alors se prononcer à l'unanimité.

Elle est, de plus, très importante dans le dialogue que nous avons engagé avec la Commission européenne. Ce dialogue n'est pas terminé. Je retourne à Bruxelles à la fin du mois de mai afin de présenter la doctrine. Je précise qu'il ne s'agit pas d'une notification, au sens formel mais d'un échange de questions/réponses qui pourra d'ailleurs se poursuivre dans les semaines qui viennent.

Par conséquent, je m'autorise à lancer bpifrance en juin, partout en France, sans trop attendre. A partir du 3 juin, nous commencerons un déplacement dans les vingt-deux régions françaises. Nous n'allons pas seulement inaugurer des locaux, nous allons lancer officiellement l'incarnation de bpifrance en régions.

S'agissant du lien avec la doctrine de l'APE, qui est notre actionnaire, je crois savoir que David Azéma, commissaire aux participations de l'État, présentera bientôt un projet de doctrine. Sans dévoiler les travaux de l'Agence, vous pourrez constater qu'il y a un emboîtement très propre entre les activités de nos institutions.

En l'occurrence, nous sommes là pour nous occuper des PME et des ETI. C'est notre rôle fondamental. Actuellement, à l'intérieur du FSI - dont la marque disparaît dans quinze jours pour devenir France investissement - vous avez des investissements dans des petites entreprises (Viadeo, Dailymotion, etc.) jusqu'à Eramet. Et vous avez beau publier doctrine sur doctrine, on peut facilement penser que le FSI n'en a pas puisqu'il investit dans tout type d'entreprise.

Par conséquent, à l'intérieur de ce qui s'appelait le FSI, nous allons créer un fonds commun de placement à risques (FCPR), sur 99 ans, 100 % fonds propres BPI, consacré exclusivement aux ETI françaises et qui sera doté de 3 à 4 milliards d'euros. Non seulement nous avons une doctrine, mais nous l'incarnons en sanctuarisant le fléchage des fonds vers les différentes lignes de la doctrine. Le fonds « ETI 2030 » aura sa propre équipe de gestion.

De même, à l'intérieur de l'actuel FSI, il y a une petite équipe qui fait du capital-risque très risqué. Ce sont des tickets de 10 à 30 millions d'euros dans des toutes petites sociétés. Nous allons également l'isoler dans un FCPR de 500 millions d'euros, avec une équipe exclusivement consacrée à sa gestion. Ce fonds s'appellera « large venture » - capital-risque profond. Là encore, ce n'est pas le domaine d'intervention de l'APE, avec laquelle nous travaillons sur une base quotidienne.

Sur la question des rendements, la politique de dividende de BPI sera décidée en septembre 2014. J'ai convaincu nos deux actionnaires qu'il fallait attendre d'avoir terminé un exercice entier de bpifrance avant d'arrêter une politique de dividende. D'ailleurs, ce sujet dépend pour partie des assurances que nous obtenons de notre actionnaire État sur les dotations budgétaires dans les années qui viennent pour financer l'innovation et la garantie. Nous avons reçu, à ce titre, pour 2013 environ 350 millions d'euros de dotations budgétaires. S'agissant de la garantie, il n'y avait rien dans le budget, il a fallu que j'aille convaincre le Président de la République de nous octroyer, sur fonds du Programme d'investissement d'avenir (PIA), 150 millions d'euros pour alimenter le fonds de garantie. Si nous avons la certitude, à moyen terme, d'obtenir ces dotations, nous pourrons alors remonter d'importants dividendes. Dans le cas contraire, nous devrons conserver une partie de nos bénéfices pour financer notre mission d'intérêt général.

En ce qui concerne les ambitions affichées sur les rendements et le retour sur capitaux propres, aujourd'hui, nous atteignons 4 %, avant dépréciation de notre participation dans France Telecom, soit 2,8 milliards d'euros, ce qui détruit bien évidemment le ROE de l'année 2012, qui sera négatif.

Est-ce que 4 % est le bon chiffre ou non ? Nos actionnaires, État et Caisse des dépôts, sont en train d'en discuter. Nous aurons probablement des objectifs spécifiques par métier. Pour la garantie et l'innovation, cette question n'a pas de sens puisqu'il s'agit d'activités subventionnées. Pour le crédit, en revanche, on peut se poser la question de savoir s'il faut s'aligner sur les niveaux proches de ceux de BPCE (5,5 %). Dans le domaine de l'investissement, j'ai donné les chiffres et, pour l'instant, on en reste là. Mais il est possible que nos actionnaires nous demandent de faire plus.

Pour ce qui concerne la durée de nos investissements, nous ne nous fixons pas de minimum ; dans certains cas précis, il pourrait être opportun d'aller vite. En tout cas, ce n'est pas uniquement le critère financier qui guidera notre décision de sortir. Pour prendre l'exemple récent de la cotation en bourse de la société Constellium, nous aurions pu réaliser une plus-value très substantielle. Mais nous avons préféré rester au capital de cette entreprise prometteuse, et même accroître notre part, afin de protéger les sites français et le centre de recherche et développement, qu'une prise de contrôle par un groupe étranger aurait pu menacer. Pour autant, nous sortirons un jour car notre portefeuille, qui n'est pas indéfiniment extensible, doit « tourner » sur une base de temporalité moyenne de sept ans.

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