Monsieur le Président, Monsieur le rapporteur général, Mesdames et messieurs les sénateurs, Messieurs les directeurs, je vous remercie tout d'abord vivement de cette invitation à présenter et à commenter les travaux que la Cour a menés à la demande de la commission des finances. Je ne suis pas accompagné aujourd'hui par Alain Lambert qui n'était pas disponible, mais il a été un contre-rapporteur extrêmement attentif et très vigilant tout au long de nos travaux.
Je suis accompagné de M. Dominique Pannier, rapporteur général auprès de la formation interchambres « Exécution du budget et comptes de l'Etat » ainsi que de M. Gabriel Ferriol, auditeur, et de M. Laurent Zérah, expert, qui ont participé à la réalisation de l'enquête.
Comme vous le savez, celle-ci porte sur le recensement et la comptabilisation des engagements hors bilan de l'Etat. Il s'agit là d'un thème aride, au sein d'une matière qui ne l'est pas moins, je veux parler de la comptabilité publique.
Pour aride qu'elle soit, la question du recensement et de la comptabilisation des engagements hors bilan n'en recouvre pas moins des enjeux essentiels pour l'Etat.
Les engagements hors bilan mesurent en effet l'incidence financière éventuelle d'obligations potentielles s'imposant à l'Etat. Ils représentent donc l'ampleur des aléas financiers auxquels ce dernier est exposé et, corrélativement, les risques potentiels pesant sur sa trajectoire budgétaire.
A l'heure actuelle, leur suivi étroit est d'autant plus une exigence que les marges de manoeuvre dont dispose l'Etat au plan budgétaire se sont considérablement réduites.
En ce sens, la demande adressée à la Cour par votre commission des finances arrive à point nommé pour permettre au Sénat d'être informé sur l'efficacité des procédures en place ainsi que sur la qualité de l'information mise à sa disposition.
Vous avez rappelé, Monsieur le Président, qu'il s'agit d'une préoccupation ancienne de votre commission, comme en témoignent les amendements qu'elle avait introduits lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 2003. A l'époque déjà, elle s'efforçait de renforcer l'information du Parlement sur les engagements hors bilan.
Pour sa part, la Cour porte également de longue date une attention particulière aux passifs éventuels, qu'elle a examinés non seulement dans le cadre d'enquêtes particulières, par exemple son récent rapport sur les coûts de la filière électronucléaire, mais aussi dans le cadre plus général de ses travaux portant sur les finances publiques, notamment l'acte de certification des comptes de l'Etat, le rapport sur les résultats et la gestion budgétaire et le rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques.
Je profite de cette occasion pour vous confirmer que les éditions 2012 de ces trois rapports vous seront présentées par le Premier président de la Cour, le 29 mai prochain. Les données présentées dans l'enquête sont donc les dernières disponibles.
Si elle s'inscrit dans le prolongement de travaux antérieurs de la Cour, cette étude n'en présente pas moins des apports novateurs :
- pour la première fois, elle porte un regard rétrospectif sur les données de comptabilité générale que les services comptables de l'Etat établissent depuis 2006. Elle met ainsi en perspective la situation actuelle avec celle prévalant avant la crise financière ;
- nous essayons de confronter les données de la comptabilité générale et celles issues de la comptabilité budgétaire, en mettant en évidence leurs différences d'approche, tout en illustrant les bénéfices à tirer de leur comparaison ;
- enfin, l'enquête met en lumière d'autres engagements que les engagements de retraite, qui, même s'ils représentent en masse la majeure partie des engagements hors bilan de l'Etat, font l'objet d'un suivi spécifique dans le cadre des différentes réformes intervenues en matière de pensions.
L'enquête de la Cour examine notamment les engagements pris dans le cadre d'accords bien définis, par exemple la dette garantie, la garantie de protection des épargnants ou le soutien au commerce extérieur. Ces dernières années, ces engagements ont connu une croissance considérable de leurs encours puisque de 400 milliards d'euros à fin 2006, ils sont passés à près de 1 000 milliards d'euros fin 2012.
Dans le même temps, les travaux de la Cour ont rencontré certaines limites que je crois utile de rappeler à ce stade.
En premier lieu, si elles peuvent éclairer l'évolution de la situation française en comparaison de celles connues par d'autres Etats, les comparaisons internationales ne permettent pas, à ce jour, de comparer les niveaux des engagements hors bilan dans différents Etats.
En effet, la grande majorité des Etats n'établit tout simplement pas de comptes en droits constatés certifiés. Dans la zone euro, la France est le seul pays à s'être doté d'une comptabilité générale certifiée par un auditeur externe, en l'occurrence la Cour des comptes. Ni l'Italie, ni l'Allemagne ne publient de données comparables.
Du reste, les Etats qui produisent des comptes en droits constatés le font, à l'heure actuelle, sur la base de normes de comptabilisation locales qui, même si elles sont généralement dérivées des normes International Public Sector Accounting Standards (IPSAS), sont trop hétérogènes pour que des comparaisons puissent être facilement établies entre leurs situations. Les référentiels comptables ne permettent donc pas d'établir des comparaisons, même quand les données en droits constatés sont disponibles.
Face à ces limites, Eurostat et les autres services de la Commission européenne ont initié des réflexions afin harmoniser le suivi des passifs éventuels des administrations publiques au niveau européen. Cette démarche s'inscrit dans un cadre plus large visant à inciter les Etats membres à produire chaque année des comptes en droits constatés, comprenant un bilan, un compte de résultat et une annexe aux comptes. La France y prend actuellement une part importante, et j'y reviendrai en conclusion.
En second lieu, la Cour a rencontré des difficultés à recueillir et à exploiter certaines données à l'échelle nationale. Ainsi, elle n'a ainsi pas pu comparer les engagements hors bilan de l'Etat avec ceux des autres administrations publiques, faute de données fiables sur ces secteurs.
Les engagements hors bilan des collectivités territoriales et des organismes de sécurité sociale ne sont pas disponibles sous une forme agrégée, même si certains progrès sont à relever en ce qui concerne leur suivi.
Permettez-moi tout d'abord de rappeler les trois principaux constats opérés par la Cour, avant de présenter ses recommandations.
Le premier constat de la Cour porte sur la qualité du recensement et de la comptabilisation en eux-mêmes.
Notre jugement est sur ce point plutôt positif. Sous les réserves que la Cour fera apparaître dans le prochain acte de certification des comptes de l'Etat, la France dispose d'une information riche et fiable sur le niveau et l'évolution pluriannuelle des engagements hors bilan de l'Etat.
Dans ce domaine, la qualité de l'information disponible en France est comparable à celle publiée par les Etats du monde les plus en pointe en matière de transparence comptable et financière. Elle est même supérieure à celle que l'on observe dans la plupart des Etats européens.
Ce constat est principalement imputable aux efforts accomplis, chacune pour ce qui la concerne, par les administrations impliquées dans le recensement et la comptabilisation des engagements hors bilan.
Il doit également beaucoup à la mise en place de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) et à la démarche de certification des comptes de l'Etat qu'elle a organisée.
Pour autant, tout n'est pas parfait et la Cour, dans son rôle de certificateur des comptes de l'Etat, a été régulièrement amenée à constater que des progrès restent à accomplir en matière de suivi des engagements hors bilan.
Les travaux menés dans le cadre de la présente enquête ont confirmé la persistance de certaines imperfections : le suivi des engagements en comptabilité générale et son pendant en comptabilité budgétaire ne sont pas suffisamment articulés ; les comptables ne disposent pas toujours des informations nécessaires à la comptabilisation en droits constatés ; les procédures d'inventaire, de confirmation des encours ou de comptabilisation des intérêts de la dette garantie présentent, elles aussi, des insuffisances.
De façon générale, si les administrations concernées ont, prises individuellement, accompli des progrès dans leur champ de responsabilité, elles doivent désormais davantage travailler ensemble pour renforcer la qualité du suivi des engagements, tout au long de la chaîne de la dépense. La rédaction d'un guide de procédures régissant leurs rôles respectifs pourrait y contribuer.
Le deuxième constat de la Cour porte sur les encours des engagements hors bilan qui, comme vous le savez, augmentent.
Le premier compte général de l'Etat au format « LOLF » portait sur l'exercice 2006, le recul est donc réduit pour apprécier l'évolution pluriannuelle des encours des engagements hors bilan.
L'analyse des données disponibles depuis 2006 montre toutefois que les encours des engagements hors bilan ont connu, dans la période récente, une croissance extrêmement soutenue.
Ainsi, entre 2007 et 2012, les encours d'engagements de retraite sont passés de 1 091 milliards d'euros à 1 679 milliards d'euros soit une hausse de près de 54 %. Cette hausse est toutefois peu significative sur le fond, car essentiellement liée à des variations du taux d'actualisation utilisé pour calculer cet engagement.
Pour dire les choses simplement, plus les taux d'intérêt auxquels l'Etat emprunte diminuent, plus le montant des engagements de retraite et des engagements viagers sur longue période augmente. Ce paradoxe est dû au fait que le taux d'actualisation utilisé dans ces calculs dépend du taux d'emprunt de l'Etat, et qu'en mathématiques financières, plus le taux d'actualisation est réduit, plus la valeur actualisée augmente, surtout sur des durées d'actualisation aussi longues (plus de 100 ans). Le montant des engagements de retraite doit donc être interprété avec prudence.
Sur la même période, les encours des engagements pris dans le cadre d'accords bien définis faisaient plus que doubler, croissant de 458 milliards d'euros à 978 milliards d'euros.
A elle seule, la garantie de protection des épargnants, c'est-à-dire la garantie en liquidité et solvabilité accordée au Fonds d'épargne, a vu son encours plus que doubler, passant de 165 milliards d'euros à fin 2006 à 394 milliards d'euros à fin 2012. Sur la même période, la dette garantie a triplé, passant de 56 milliards d'euros à 163 milliards d'euros.
Récemment, la participation de la France aux différents plans de stabilisation financière en zone euro s'est traduite entre fin 2011 et fin 2012 par une hausse de 187 milliards d'euros des engagements hors bilan portés par l'Etat dont une hausse de 50,8 milliards d'euros au titre de la dette garantie du Fonds européen de stabilité financière (FESF), une augmentation de 9,8 milliards d'euros au titre du capital appelé du Mécanisme européen de stabilité (MES) et une progression de 126,4 milliards d'euros au titre de son capital appelable.
Intégrés au champ des engagements hors bilan pour la première fois fin 2011, les engagements découlant de la mission de régulateur économique et social de l'Etat représentaient, fin 2012, 434 milliards d'euros, en hausse de 110,6 milliards d'euros sur un an.
Cette hausse s'explique pour l'essentiel par un changement de norme comptable. Certains passifs d'intervention, tels que l'allocation aux adultes handicapés ou les aides au logement, qui étaient jusqu'alors comptabilisés au passif sont désormais intégrés au hors bilan de l'Etat. Ce mouvement illustre les liens qu'entretiennent bilan et hors-bilan, et la porosité qui existe entre ces deux notions.
En définitive, fin 2012, l'agrégat total des engagements hors bilan excédait 3 090 milliards d'euros soit 152 points de PIB. Il dépasse largement le passif total de l'Etat (1 859 milliards d'euros) et encore plus le montant de sa dette financière (1 412 milliards d'euros).
Même si ce montant recouvre des obligations éventuelles dont les horizons temporels et les risques potentiels sont très variables, il n'en reste pas moins que l'effet de levier de l'Etat est plus élevé qu'autrefois.
Cette situation justifie que les procédures de suivi des engagements hors bilan évoluent vers une plus grande exigence. Notre avons essayé de faire ressortir comme fil d'Ariane que, après avoir longtemps constaté le niveau des engagements hors bilan, les pouvoirs publics doivent désormais davantage le surveiller, afin que son évolution n'ait pas d'impact systémique.
En dernière analyse en effet, et c'est là le troisième constat de la Cour, les risques que font peser les engagements portent en premier lieu sur le budget de l'Etat, tant en dépenses qu'en recettes.
Si leur exécution varie considérablement d'un exercice à l'autre, les crédits du programme 114 - Appels en garantie de l'Etat n'ont pas connu une hausse comparable à celle enregistrée par les encours des garanties dont ils financent les appels éventuels. Sur la période 2006-2008, leur moyenne annuelle s'est établie à 265 millions d'euros. Entre 2009 et 2011, elle a légèrement augmenté, passant à 303 millions d'euros.
Certes, toutes les dépenses budgétaires liées à des engagements hors bilan ne transitent pas par le programme 114. Je pense notamment aux apports en capital financés par le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'Etat » à des entités bénéficiant, par ailleurs, de la garantie de l'Etat. Tel était par exemple le cas dans la récente opération de recapitalisation du groupe franco-belge Dexia. La garantie de l'Etat lui apporte des recettes et a peu de chances d'être appelée, mais la recapitalisation de la fin de l'année 2012 retrace l'impact budgétaire de cette garantie.
Dans l'ensemble, toutefois, l'analyse de la Cour la conduit à estimer que la hausse des encours des engagements hors bilan ne s'est pas accompagnée d'une augmentation concomitante du niveau des dépenses de l'Etat.
En revanche, sur le volet recettes, la Cour a constaté que la hausse des encours a coïncidé avec un repli des recettes tirées des engagements.
Alors que leur montant annuel avoisinait 4 milliards d'euros en 2006, il n'était plus que de 2 milliards d'euros en 2009 et 2011 puis 1 milliard d'euros en 2012. Cette évolution s'explique par l'effet combiné :
- de l'impossibilité pour l'Etat de prélever sur le résultat net du Fonds d'épargne un montant supérieur au besoin de ce dernier de renforcer ses fonds propres, compte tenu des règles prudentielles actuellement applicables ;
- du repli du résultat du compte des procédures publiques gérées par la Coface, du fait du tarissement des recettes exceptionnelles tirées de consolidation de dette en Club de Paris mais aussi de la hausse de la sinistralité de certaines procédures ;
- de la baisse de la part des dettes garanties rémunérées dans l'ensemble de la dette garantie, du fait notamment du caractère massif des émissions du Fonds européen de stabilité financière.
La période récente s'est ainsi caractérisée par un « effet de ciseau » : alors que les encours des engagements hors bilan de l'Etat ont progressé, la rémunération perçue par ce dernier à leur titre s'est repliée. Autrement dit, plus la protection de l'Etat a été recherchée et moins elle a été, en réalité, rétribuée par les entités qui en bénéficiaient.
La Cour note ainsi que certaines entités n'offrent aucune contrepartie à l'Etat en échange de sa protection. Tel est par exemple le cas de la société de gestion du Fonds de garantie à l'accession sociale à la propriété (40,8 milliards d'euros de dette garantie) ou du Fonds européen de stabilité financière (58,1 milliards d'euros).
J'en viens maintenant à la dernière partie de mon exposé, qui est consacrée aux recommandations formulées par la Cour. Avant de vous en présenter en détail le contenu, permettez-moi de revenir sur les risques qui s'attachent à l'heure actuelle aux engagements hors bilan et sur l'esprit dans lequel la Cour a formulé ses recommandations.
Les risques associés aux engagements hors bilan de l'Etat ne se limitent pas à une hausse des dépenses ou à un repli des recettes non fiscales.
Le niveau et la dynamique des engagements hors bilan sont en effet de plus en plus perçus comme des indicateurs de la capacité de l'Etat à rembourser ses dettes. Compte tenu du niveau atteint par ces dernières, la maîtrise des engagements hors bilan recouvre désormais une dimension systémique.
S'il n'existe pas de limite en théorie à leur enveloppe globale, il appartient aux pouvoirs publics de s'assurer en pratique qu'ils n'entament pas la crédibilité de la signature de l'Etat.
Pour cela, et c'est là une conviction forte de la Cour, il importe, non pas de maintenir l'opacité ou la discrétion sur la nature et le niveau des engagements hors bilan, mais, bien au contraire, de fournir à leur sujet une information approfondie et transparente, conformément à l'esprit de la Constitution et de la LOLF.
Cette exigence de transparence doit toutefois être adaptée aux contraintes de l'action publique, à la nature diverse - pour ne pas dire disparate - des engagements portés par l'Etat et aux différents niveaux de risques qui s'y attachent.
La Cour a estimé qu'il ne serait pas opératoire de recommander un plafonnement de l'enveloppe globale des engagements hors bilan. Toute séduisante qu'elle soit sur le plan conceptuel, l'analogie entre dettes financières et passifs éventuels présente des limites.
En effet, comme on l'a vu, la hausse des encours ne signifie pas nécessairement une progression des risques et, encore moins, un surcroît de dépenses budgétaires. Les engagements hors bilan de l'Etat présentent, par nature, un caractère aléatoire qui les distingue de ses dettes financières.
De même, la Cour a choisi de ne pas recommander la création d'un compte d'affectation spéciale dédié aux opérations de l'Etat garant, sur le modèle du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'Etat ».
Malgré ses avantages en termes de lisibilité et de gestion prudentielle, cette solution conduirait à stériliser mécaniquement des recettes non fiscales venant abonder le budget de l'Etat, ce qui, dans la situation actuelle des finances publiques, paraît exclu.
Enfin, la Cour n'a pas jugé utile de recommander de modifier d'évolutions des normes comptables.
Inspirées de la comptabilité d'entreprise et adaptées aux spécificités de l'Etat, les normes actuelles constituent, en effet, un point d'appui solide pour le producteur des comptes comme pour le certificateur. En la matière, la France n'a rien à envier à d'autres pays puisqu'elle est l'un des Etats les plus en pointe dans la zone euro.
Il convient de convaincre nos partenaires européens d'adopter à leur tour des normes adaptées permettant de comparer les Etats membres et de mieux gouverner les finances publiques. La Commission européenne a publié un rapport sur ce thème en mars 2013, pour mettre en perspective l'édiction de normes européennes applicables aux comptes publics. Les magistrats de la Cour des comptes, et tout particulièrement son Premier président, sont extrêmement attentifs à ces enjeux, qui ne sont pas immédiats mais peuvent revêtir à terme une grande importance pour le pilotage des finances publiques de la zone euro.
Les recommandations formulées par la Cour à l'occasion de la préparation de ce rapport s'établissent sur trois plans distincts.
Tout d'abord, au plan administratif, la Cour préconise d'harmoniser le suivi budgétaire et comptable applicable aux engagements hors bilan et de renforcer les échanges entre les diverses administrations chargées de leur recensement et de leur comptabilisation.
Elle appelle également à ce que l'information détenue par les ordonnateurs circule de façon plus fluide le long de la chaîne de la dépense afin que le comptable puisse tenir sa comptabilité en droits constatés dans les meilleures conditions.
Çà et là, certaines « limites organisationnelles » que la Cour a pu identifier devront être dépassées afin que les administrations concernées travaillent mieux ensemble. Les responsables des administrations concernées voudront sans doute en dire un mot.
La Cour propose également de faire évoluer le plan comptable de l'Etat pour que les recettes et les dépenses liées aux engagements hors bilan puissent être davantage placées en regard.
Compte tenu des risques budgétaires qu'elle emporte, la dette garantie doit faire l'objet d'une attention particulière.
Ensuite, au plan budgétaire, la Cour propose de renforcer les procédures d'information du Parlement. Elle suggère la mise en place d'un double dispositif, comprenant, d'une part, une revue annuelle du stock des encours et, d'autre part, une alerte en temps réel sur leur éventuelle évolution :
- une fois par an, lors du vote de la loi de finances initiale, le Parlement serait informé de l'état du stock des engagements, par exemple sur la base des dispositions introduites par le Sénat lors de l'examen de la loi de finances rectificative pour 2003, mais censurées par le juge constitutionnel ;
- dès lors que la situation le justifierait, un mécanisme d'alerte en cours d'exercice viendrait informer le Parlement de la hausse rapide de l'encours d'un engagement hors bilan ou d'une hausse de sa probabilité de réalisation. Ce mécanisme d'alerte pourrait, par exemple, être matérialisé par une communication adressée aux commissions des finances des assemblées ;
- plus généralement, la Cour recommande de mobiliser davantage la comptabilité générale dans la procédure de vote du budget, notamment en s'appuyant sur les données qu'elle propose pour arbitrer, en toute connaissance de cause, entre le flux et le stock des engagements hors bilan.
Enfin, il conviendrait d'affecter ou de cantonner des actifs réalisables, c'est-à-dire des richesses immédiatement monnayables, pour faire face aux risques budgétaires liés aux engagements. Ce point suppose par exemple de fixer à un niveau adapté le montant des prélèvements opérés par l'Etat sur les réserves de trésorerie des bénéficiaires de sa garantie. Je pense ici notamment à la Coface.
Voilà qui conclut cette intervention. Je vous remercie de votre attention et suis à votre disposition, avec les rapporteurs qui m'entourent, pour répondre à vos questions.