Intervention de Éric Bocquet

Commission des affaires sociales — Réunion du 15 mai 2013 : 1ère réunion
Normes européennes en matière de détachement des travailleurs — Présentation d'un rapport d'information de la commission des affaires européennes

Photo de Éric BocquetÉric Bocquet, rapporteur de la commission des affaires européennes :

La question de fond est en effet celle de l'harmonisation sociale. Elle n'est clairement pas à l'ordre du jour, bien qu'elle soit liée à celle de l'harmonisation fiscale. Nous serions bien inspirés d'en faire un objectif majeur de la construction européenne.

L'instauration d'un espace de concurrence libre et non faussée entre des Etats présentant de fortes disparités dans leurs systèmes de protection sociale, surtout depuis le grand élargissement, ne peut avoir d'autre conséquence que la croissance du phénomène de détachement. La DGT, qui constate sa progression, ne dispose pas de prévision chiffrée. Nous l'observons en tout cas sur le terrain : les PME sont parfois directement sollicitées sur internet. Le rapport reproduit une annonce offrant explicitement de la main d'oeuvre, par exemple dans le secteur du bâtiment. Il nous faut agir rapidement, car la crise aggrave le phénomène. Sur ce sujet, le Gouvernement français est très volontaire. Ce n'est pas le cas de tous nos partenaires.

Nous avons d'abord besoin de plus de moyens humains : contrôler suppose d'aller sur les chantiers, et de vérifier minutieusement les documents. Cela demande du temps. Il faut aussi renforcer la prévention, en adaptant la réglementation en amont.

L'Union européenne n'a pas formulé de réserves sur les dispositifs relatifs à la sous-traitance adoptés en Espagne et en Allemagne. Nous militons pour leur extension à l'échelle européenne. Si celle-ci présente des difficultés, la législation nationale devra limiter le nombre de sous-traitants.

Compte tenu de l'ampleur du phénomène, les effectifs d'inspection sont insuffisants. Les bureaux de liaison transfrontaliers au sein des Direccte sont indispensables. Notre administration souffre surtout d'un manque de coopération, certains de nos partenaires considérant le détachement comme une réponse au chômage en ces temps de crise. On le voit, au sein de l'Union européenne, la solidarité a des limites... Reste que dans le combat contre les salariés low cost, la France peut avoir un rôle pilote et exprimer une exigence politique.

La liste de l'article 9 est en effet une pierre d'achoppement. Il y a deux minorités de blocage : les pays qui veulent aller plus loin, et ceux qui ne veulent toucher à rien. Ces derniers sont essentiellement les nouveaux entrants, servis à court terme par la pratique du détachement de travailleurs. Sans naïveté aucune, le soutien du Sénat à la position officielle de la France donnerait à celle-ci un poids susceptible d'infléchir le rapport de force en notre faveur.

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