En d’autres termes, agir pour la défense de l’intérêt général ne doit pas permettre une accumulation de richesses personnelles déconnectée de la réalité. Nous souscrivons naturellement à ce point de vue, car là est le cœur du débat sur la moralisation de la vie publique.
Or, qu’entendons-nous lorsque nous allons au contact de nos administrés – ce que nous faisons tous, parce que nous avons la chance, pour la plupart d’entre nous, d’être à la fois des élus locaux issus du terrain et des parlementaires ? Que, sur la base de rares mauvais exemples, nombre de nos concitoyens considèrent que l’intérêt financier est le vecteur de l’engagement public, alors que la majorité des Français travaillent dur pour vivre.
Au-delà de la caricature parfois simpliste, il nous faut rappeler que ce sont les questions d’argent qui déterminent très souvent l’image du politique dans l’imaginaire collectif.
Ce bruit de fond de la société n’est pas sans rappeler certaines époques troublées, et c’est bien pourquoi il faut aujourd’hui déminer cette critique en agissant et en expliquant fortement, publiquement, qu’il ne faut pas confondre cumul des mandats et cumul des indemnités.
Le plus souvent, nos concitoyens se disent opposés au premier en pensant en réalité au second. Un cumul des mandats sans cumul des indemnités ne leur poserait, en définitive, aucun problème, car il autoriserait à la fois la proximité avec les élus et l’assurance de faire entendre la voix de leur territoire par les pouvoirs publics.
Dans son excellent rapport, notre collègue Pierre-Yves Collombat nous rappelle comment est née historiquement la rétribution des élus de la Nation. On peut également se remémorer que, déjà à Athènes, le misthos institué par Périclès permettait de rétribuer ceux qui occupaient une fonction publique.
De fait, les conditions matérielles d’exercice d’un mandat parlementaire doivent répondre à un double objectif : d’une part, permettre la représentation de la diversité sociale et, d’autre part, mettre les parlementaires à l’abri des pressions extérieures, afin qu’ils puissent exercer leur mandat en toute indépendance, aussi bien intellectuelle que morale.
Au regard de ces principes essentiels, les indemnités dont bénéficient aujourd’hui députés et sénateurs doivent remplir ce double objectif. Le rapport de la commission détaille précisément l’ensemble des éléments d’indemnisation dont bénéficient les parlementaires et éclairera, à n’en point douter, nos concitoyens.
Il ne faut pas craindre d’affirmer, monsieur le ministre, mes chers collègues, que, dans une démocratie, les élus doivent avoir les moyens matériels d’assurer leurs fonctions et leur indépendance.
La peur viscérale de tous les gouvernements successifs, toutes étiquettes confondues, dès qu’il est simplement question de procéder à l’indexation du montant de l’indemnité parlementaire est révélatrice du malaise qui entoure ce problème dans notre République. Et quand on veut aller vers la moralisation, vers la transparence, parfois à l’excès, parfois à l’extrême, on se retrouve souvent aller à l’encontre de l’idée même que l’on souhaitait développer.
Il faut dire les choses, il faut dire que les parlementaires doivent être indemnisés de telle manière qu’ils puissent faire correctement leur travail. Cela n’a rien à voir avec le cumul des indemnités ! Il faut que l’indemnité parlementaire soit à la hauteur de la charge et de la nécessité d’indépendance que justifient ces fonctions honorables.
Les parlementaires titulaires d’un mandat local ou d’une fonction exécutive non élective peuvent aussi bénéficier, à ce titre, d’une indemnité aujourd’hui plafonnée à une fois et demie le montant de l’indemnité parlementaire de base, comme le prévoit l’article 4 de l’ordonnance du 13 décembre 1958 portant loi organique relative à l’indemnité des membres du Parlement.
Ce cumul des indemnités n’a pas de justification, dès lors que la seule indemnité parlementaire suffit à assurer un revenu suffisant et doit permettre aux parlementaires d’assurer leur indépendance de décision, en rendant impossible tout mandat impératif.
La gratuité des fonctions électives locales pour les parlementaires permet de couper court à toute suspicion d’enrichissement personnel, …