Cette situation doit être absolument corrigée. Je sais que le ministre de la défense, qui, dès les premiers mois de sa prise de fonctions, a immédiatement perçu le problème, y consacre toute son énergie.
Les évolutions mises en œuvre seront assorties des mesures incitatives indispensables à leur réussite, dans le cadre d’une politique de ressources humaines favorisant une gestion active des carrières. Elles s’appuieront sur un dialogue social enrichi et sur une rénovation du dispositif de concertation au sein des armées. Nos soldats et nos officiers doivent se sentir pleinement soutenus et respectés : c’est aussi dans leur vie quotidienne que s’exprime la reconnaissance de la Nation.
De même, la réflexion fructueuse, qui a associé défense et justice pour prévenir une judiciarisation excessive de l’action militaire, se traduira dès la future loi de programmation.
J’ai pleine confiance dans l’engagement des hommes et des femmes de la défense pour faire vivre et réussir ce nouveau modèle. Les opérations récentes soulignent la qualité de cet engagement. Elles nous en rappellent non seulement l’exigence, mais aussi la valeur. En cet instant, je leur renouvelle l’hommage de la Nation tout entière.
Nos soldats doivent bénéficier d’un entraînement conforme aux exigences de leurs missions et qui fera l’objet de toute notre vigilance. Ils doivent pouvoir mettre en œuvre, avec une disponibilité suffisante, des équipements performants. Leur renouvellement se poursuivra selon les priorités retenues en faveur des capacités de dissuasion, de renseignement et de projection. Aux lacunes relevées lors des dernières interventions répond l’effort engagé dans les domaines du transport aérien, du ravitaillement en vol, ainsi que des moyens de renseignement.
Mesdames, messieurs les sénateurs, ce modèle d’armée consolide une démarche de modernisation raisonnée, sans que soient sacrifiés les effectifs nécessaires à l’action, et alors que les conditions d’activité sont assurées. Il nous permet de maintenir l’excellence de notre outil de défense. Il prépare et préserve l’avenir.
Telle était notre préoccupation dans le domaine de l’industrie de défense. La vitalité de ce secteur est une condition de la souveraineté et de l’autonomie stratégique de la France. Avec plus de 4 000 entreprises de haute valeur ajoutée fortement exportatrices et environ 165 000 emplois, cette branche d’activité est aussi un atout majeur pour le dynamisme de notre économie, en premier lieu de notre industrie.
Les choix qui ont été faits préservent l’essentiel. Le rythme de renouvellement des équipements sera ajusté, mais nous avons veillé à éviter toute rupture et à garantir ainsi le maintien de l’excellence et du potentiel de notre industrie de défense. De même, les efforts de recherche seront maintenus au niveau atteint en 2013.
Enfin, dans le strict respect de nos engagements européens et internationaux et avec un souci de transparence accru envers le Parlement, nous apporterons un soutien actif aux exportations de défense.
Ce projet conforte aussi la démarche que nous menons pour tirer parti de la construction européenne et de notre place dans l’OTAN.
Il nous permettra de poursuivre la mobilisation pour construire l’Europe de la défense. Certes, nous en connaissons les limites actuelles, mais nous en mesurons aussi tout le potentiel, dans un contexte où la contrainte financière suggère davantage de synergies. Pour répondre à des menaces largement communes, nous avons tout à gagner à des interdépendances librement consenties.
Nous allons donc progresser là aussi avec pragmatisme, en favorisant les opérations communes, en développant ensemble des capacités propices à la mutualisation, comme le transport aérien, le ravitaillement en vol, les drones ou les satellites d’observation, en favorisant des programmes en coopération, en relançant le rapprochement de nos industries de défense, dont l’intégration dans la filière des missiles offre un exemple réussi. Nous devons construire des champions européens et leur permettre un meilleur accès à certains marchés internationaux.
Notre démarche s’appuiera sur des partenariats d’excellence ; celui que nous avons noué avec le Royaume-Uni doit en inspirer d’autres.
Elle doit aussi affirmer une dynamique à l’échelle de l’Union européenne tout entière. Celle-ci s’est donné rendez-vous au Conseil européen de décembre prochain pour aborder le sujet.
Cet engagement européen résolu va de pair avec une participation pleine et entière à l’OTAN. Comme l’a souligné le Président de la République, la France y conservera son identité et son autonomie. Elle doit aussi intensifier son influence dans ce cadre, en veillant à ce que les initiatives qui y sont développées confortent la dynamique européenne.
Cette dernière est également présente dans les autres dimensions de la sécurité nationale, de l’analyse des risques jusqu’aux actions civilo-militaires de prévention, de stabilisation ou de gestion de crise.
Sur le plan national, un contrat général interministériel fixera et préservera les capacités civiles nécessaires à ces missions, en complément des moyens militaires mobilisables en cas de crise grave. Une attention particulière sera portée aux outre-mer et à la combinaison des capacités militaires et civiles nécessaires à la protection de chaque territoire.
Par ailleurs, le Livre blanc entérine un effort prioritaire et indispensable en faveur du renseignement, qui est d’ailleurs l’une des clés de l’autonomie stratégique de la France. Il est essentiel à notre sécurité, notamment dans la lutte contre le terrorisme. Le renforcement des moyens humains et techniques des services s’accompagnera d’une extension des prérogatives du Parlement, afin qu’il puisse pleinement exercer son contrôle de la politique gouvernementale dans ce domaine.
Enfin, le Livre blanc définit une stratégie ambitieuse en matière de cyberdéfense. Elle permettra de renforcer le niveau de sécurité des systèmes d’information vitaux, et le Parlement sera saisi de mesures en ce sens. Elle permettra aussi de développer nos capacités à identifier les attaques et, le cas échéant, à riposter de manière adéquate.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, ces choix reflètent une double exigence : le maintien d’un effort de défense volontariste et le retour à l’équilibre de nos comptes publics en 2017. En euros constants, la Nation consacrera à la défense 364 milliards d’euros entre 2014 et 2025, dont 179, 2 milliards d’euros sur la période de la future loi de programmation militaire.
Les premières années de cette programmation, nous maintiendrons un effort financier annuel de 31, 4 milliards d’euros, soit le montant auquel nous l’avons stabilisé en 2012 et 2013. Le retour à l’équilibre des comptes publics nous permettra ensuite d’accentuer cet effort. Il conjuguera crédits budgétaires et ressources exceptionnelles, qui sont identifiées et qui seront intégralement affectées à la mission « Défense ». Le projet de loi de programmation militaire sera transmis au Parlement cet été.
Le Président de la République le rappelait dans son récent discours sur la défense à l’Institut des hautes études de défense nationale : « Plus que jamais, la France a besoin d’une défense forte. D’abord, pour rester ce qu’elle est : un pays indépendant, un allié fiable, une puissance » qui porte à l’échelle mondiale des responsabilités éminentes.
Je sais, monsieur le président de la commission, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous partagez cette ambition. D’ailleurs, les réflexions que vous avez conduites en témoignent, ainsi que l’implication de vos représentants au sein de la commission, dont je salue la qualité, qui ont eux-aussi contribué à la préparation du présent Livre blanc.
Au terme des choix que nous avons arrêtés avec le Président de la République, ce Livre blanc dessine un modèle renouvelé mais fidèle à nos ambitions et porteur d’avenir.
Notre défense, il faut en être fier, parce qu’elle est en cohérence avec ce qu’est notre pays. Elle restera au premier rang en Europe. La France demeurera l’une des seules puissances au monde à disposer à la fois d’une dissuasion nucléaire autonome, d’une capacité d’intervention extérieure éprouvée et modernisée et d’une industrie de défense performante.
Sa défense est forte, à la mesure non seulement de son statut de membre permanent du Conseil de sécurité, mais aussi de l’ambition que notre pays porte pour lui-même et pour ses partenaires, en Europe et au service de la paix dans le monde.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite que le présent débat permette de renouveler l’adhésion des représentants de la Nation à cet ambitieux projet, auquel, je le sais, vous êtes tous attachés. Je vous remercie à l’avance de l’appui que vous apporterez à cette nouvelle étape de l’histoire de la défense nationale. §