Intervention de Daniel Dubois

Réunion du 2 novembre 2010 à 14h30
Débat sur les conclusions de la mission commune d'information sur le traitement des déchets

Photo de Daniel DuboisDaniel Dubois :

Le sujet est compliqué et les objectifs chiffrés du Grenelle sont ambitieux. Je les rappelle : la diminution de 15 %, d’ici à 2012, des tonnes enfouies ou incinérées ; la réduction de la part d’ordures ménagères et assimilés de 7 % par an dans les cinq prochaines années ; enfin, l’augmentation du recyclage matière et organique pour aboutir à 35 % recyclés en 2012, et 45 % en 2015.

Ces objectifs, non plus, ne sont pas simples à atteindre !

Or, aujourd’hui, la France n’est pas complètement exemplaire en matière de traitement des déchets. Nos infrastructures atteignent les limites de leurs capacités.

En outre, Dominique Braye l’a dit avec force tout à l’heure – pour ma part, je le rejoins et j’y reviendrai –, l’opinion publique n’accepte pas la construction d’incinérateurs, pas plus d’ailleurs, il faut le dire, que celle de centres d’enfouissement techniques.

Cela signifie que le chemin à parcourir sera long et compliqué. Le rapport de la mission commune d’information peut servir à le baliser et permettre d’apporter un certain nombre de réponses.

Deux points ont particulièrement retenu mon attention dans le cadre de la valorisation des déchets.

Premièrement, j’ai été surpris de la faible capacité du parc d’incinérateurs, qui représente à peine un tiers des capacités de nos voisins allemands, ainsi que l’a relevé le président de la mission commune d’information.

Ce type de traitement permet de valoriser l’énergie dégagée de la combustion, pour alimenter des réseaux de chaleur ou fabriquer de la vapeur pour certaines industries. Faut-il le rappeler, la vapeur représente 7, 2 % des énergies utilisées, essentiellement par les industries du papier carton, de l’imprimerie et du secteur de la chimie, du caoutchouc et des plastiques.

Il est donc urgent, à mon sens, de réhabiliter dans l’opinion publique ce mode de traitement des déchets.

Chacun en est bien conscient, il existe une chaîne globale complète du traitement des déchets, dont l’incinérateur est l’un des maillons. Ce dernier souffre aujourd’hui d’une méfiance qui semble durablement installée sur les territoires.

Les experts reconnus doivent donc se saisir de cette problématique afin de rendre plus transparentes les incidences réelles liées à l’incinération.

À l’heure actuelle, nous sommes englués dans ce problème de l’incinération. Si nous ne nous employons pas à le reposer de façon transparente, nous aurons énormément de mal à nous en sortir, alors même qu’il s’agit là d’un outil essentiel.

Deuxièmement, le traitement biologique des déchets nécessite une attention accrue.

Il permet en effet une valorisation de la partie fermentescible des déchets, que ce soit sur le plan organique, avec la fabrication de compost, ou sur le plan énergétique, au travers de la production d’électricité et de chaleur.

Dans cette démarche, il semble particulièrement nécessaire d’être attentif, bien sûr, à la qualité du compost ; en effet, on le retrouve dans les champs, et donc dans le produit des récoltes.

En outre, concernant les installations qui sont mises en œuvre aujourd’hui, les élus ont, me semble-t-il, besoin d’un horizon à la fois lointain et stable pour prendre leurs décisions. Le conseil technique sur les investissements engagés par les élus dans ce domaine reste parfois insuffisant, alors qu’il est absolument nécessaire.

En effet, il y a de vrais risques à installer des équipements dont l’achat s’amortit sur trente ou quarante ans, dans la mesure où, cinq ou six années après leur première utilisation, ils peuvent se révéler inadaptés quand bien même ils auraient coûté très cher au contribuable ; une telle situation peut réellement poser problème.

Pour prendre un peu de recul par rapport au débat, j’insisterai sur trois préoccupations : l’efficience, la différenciation et l’obligation, à laquelle, de toute façon, nous ne pourrons pas nous soustraire, de limiter la production de déchets.

La première préoccupation concerne la nécessaire efficience avec laquelle il faut aborder la question de la gestion des déchets. Pour faciliter les comportements éco-citoyens, il est indispensable, comme les différents intervenants l’ont dit et répété, de ne pas faire peser sur le contribuable une charge financière trop importante.

À l’instar d’autres collègues ici présents, je préside un syndicat de traitement et de gestion des ordures ménagères et j’entends de plus en plus fréquemment des administrés, en milieu rural, mettre en cause l’utilité du tri en tenant ce discours : « Plus je trie, plus c’est cher. J’ai envie d’arrêter ! »

Le tri ne se décrète pas, en particulier en zone rurale ; il repose sur des comportements citoyens, qu’il faut inciter. En ce sens, il importe de favoriser des solutions de traitement des déchets qui s’autofinancent dans la mesure du possible – cela reste compliqué –, notamment par la valorisation énergétique du traitement ou encore par le recyclage.

Ma deuxième préoccupation porte sur la nécessaire différenciation à opérer dans le traitement des déchets entre les ménages, qui ne produisent que 3, 6 % des déchets, et les entreprises, mais aussi et surtout entre territoires ruraux et territoires urbains.

Chacun le sait très bien, les territoires ruraux sont plutôt efficaces en amont : dès lors que les élus font preuve d’une certaine pédagogie et que les outils adéquats sont mis à leur disposition, les usagers trient bien, se rendent aux points d’apport volontaire et font du compost individuel assez facilement.

Certains me répondront que la TGAP règle le problème : les territoires ruraux apportent moins de déchets au centre d’enfouissement puisque le tri a été effectué efficacement en amont ; ils devraient donc payer des factures moins élevées.

Un tel raisonnement n’est pas tout à fait exact, car un élément n’est, à mon avis, pas suffisamment pris en compte, madame la secrétaire d’État : les kilomètres ! Efficience et différenciation se trouvent donc alors liées.

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