Intervention de Claude Bérit-Débat

Réunion du 29 mai 2013 à 14h45
Accélération des projets de construction — Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Claude Bérit-DébatClaude Bérit-Débat :

Enfin, mes chers collègues, je rappelle que nous aurons aussi un contrôle total sur le texte final des ordonnances au travers de la procédure de ratification.

Pour toutes ces raisons, j’approuve sans hésitation le recours à la procédure des ordonnances dans ce cas d’espèce. Au demeurant, ayant été le rapporteur de la loi relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social, je suis bien placé pour témoigner du rôle central joué par le Parlement, depuis un an, dans la définition et l’impulsion de la politique du logement.

Nous avons en effet discuté et voté plusieurs mesures à la fois concrètes et très ambitieuses : je pense notamment au renforcement des obligations en matière de construction de logements sociaux, à la mise à disposition des terrains de l’État pour construire des logements sociaux, à l’augmentation des aides à la pierre et à la création d’un nouveau dispositif d’investissement locatif. Cette liste, qui n’est pas exhaustive, témoigne d’une implication totale du Parlement sur la question du logement.

Par ailleurs, vous le savez, mes chers collègues, une deuxième séquence parlementaire s’ouvrira dans les semaines à venir. Au cours de l’été, sera déposé un nouveau projet de loi pour infléchir les politiques publiques en matière d’aménagement et d’urbanisme, et ainsi concilier plus harmonieusement l’objectif de construire davantage et mieux avec celui de préserver les espaces naturels et agricoles. Là encore, le Sénat et l’Assemblée nationale exerceront sans restriction ni délégation leurs compétences législatives.

C’est donc dans l’intervalle entre ces deux séquences parlementaires fortes, les lois Duflot 1 et 2, madame la ministre, que prend place le projet de loi d’habilitation. Certaines des mesures qu’il envisage permettront d’améliorer ponctuellement la situation. D’autres en revanche ont une portée plus structurelle.

C’est le cas de la procédure intégrée pour le logement. Elle permettra, vous l’avez dit, madame la ministre, de modifier en une fois l’ensemble des documents d’urbanisme et des plans et schémas issus de législations connexes lorsqu’ils font obstacle à un projet de construction de logements. Nous avons longuement évoqué ce point en commission, qui pourrait permettre de diviser par deux la durée des procédures de modifications qui aujourd’hui s’empilent et se répètent.

C’est le cas aussi du géoportail national de l’urbanisme, qui permettra à terme de prendre connaissance par une simple connexion à internet de l’ensemble des droits à construire relatifs à une parcelle donnée.

C’est le cas enfin de la réforme du contentieux de l’urbanisme. Il s’agit d’une demande ancienne, tant des porteurs de projets que des élus locaux. La question avait été abordée notamment lors des débats sur la loi Duflot 1. Nos collègues centristes, je pense particulièrement à Daniel Dubois, avaient été très actifs sur ce thème. La ministre, après avoir indiqué qu’elle travaillait sur cette question, s’était engagée à avancer rapidement des propositions dans ce domaine. Le Gouvernement a donc demandé à un groupe de travail présidé par un conseiller d’État de lui faire des propositions. Le rapport du président Labetoulle a été rendu public au début du mois et ses propositions apportent des solutions que j’estime innovantes et équilibrées.

Il aurait été ridicule de garder dans les tiroirs toutes ces mesures à la fois très utiles et complètement détachables du futur projet de loi, alors que leur adoption répond aux besoins de nos concitoyens et des entreprises du pays ! Leur élaboration par ordonnances permettra en effet de gagner plusieurs mois, voire même un an. Dans la conjoncture actuelle, c’est un temps précieux. Retarder leur adoption serait une erreur économique tout autant que sociale et politique, car stimuler la construction et la rénovation de logements est non seulement un impératif humain pour tous les ménages qui ont du mal à se loger, mais aussi un formidable moyen de soutenir le secteur de la construction et d’appuyer le tissu des TPE et des PME du bâtiment, qui irriguent tout le territoire.

D’ailleurs, je relève un certain accord sur le bien-fondé des mesures envisagées. Lors de l’examen en commission la semaine dernière, aucun des groupes politiques n’a voté contre l’adoption du texte, les réserves qui se sont exprimées sur certains points aboutissant seulement à une abstention dont la tonalité m’a semblé plutôt bienveillante.

Je me félicite de cette approche constructive et pragmatique. Elle constitue la reconnaissance que les dispositions envisagées marquent un net progrès vers plus de proximité, de simplicité et de réactivité de l’administration. Nous avons là un bel exemple du choc de simplification appelé de ses vœux par le Président de la République. C’est ce que nos concitoyens attendent ; c’est ce dont notre économie a besoin.

Je terminerai mon intervention en indiquant brièvement quelles sont, de mon point de vue, les améliorations qu’il me semble utile d’apporter au texte à ce stade de son examen et quels sont les principes fondamentaux sur la base desquels je fonderai les avis que je formulerai sur les différents amendements au cours de la discussion des articles.

Comme je l’ai indiqué précédemment, plusieurs points qui me semblaient devoir être précisés l’ont été par les députés au cours des débats à l’Assemblée nationale.

Concernant la création d’un régime du logement intermédiaire, les députés ont clairement recentré le dispositif sur les zones caractérisées par un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logements, afin d’éviter tout effet d’aubaine. Ils ont également précisé que le nouveau régime concernerait tant le parc locatif que les logements destinés à l’accession maîtrisée à la propriété. Ils ont par ailleurs fermé la possibilité d’inscrire dans les documents de planification des objectifs relatifs à la construction de logements intermédiaires aux communes faisant l’objet d’un arrêté préfectoral de carence au titre de l’article L. 302-9-1 du code de la construction et de l’habitation. Ils ont, en dernier lieu, imposé aux filiales des organismes d’HLM qui interviendront dans le nouveau régime du logement de respecter le principe « d’étanchéité » des fonds relevant du logement social, et ils ont conféré en séance publique une définition précise à cette notion d’étanchéité.

Toutes ces précisions sont très utiles. Il me semble toutefois qu’il faut rectifier la rédaction de l’alinéa 22, car elle interdit aux représentants des collectivités territoriales ou de leurs groupements de siéger à la fois dans le conseil d’administration d’un organisme d’HLM et dans celui de sa filiale dédiée au logement intermédiaire. Compte tenu des délais très courts de transmission du texte après son adoption en première lecture par l’Assemblée nationale, la modification nécessaire n’a pu être apportée lors de l’examen en commission. Cependant, je vous proposerai tout à l’heure une autre rédaction.

Concernant le point 5 de l’article 1er, à savoir les conditions dans lesquelles on peut apporter des dérogations aux règles des PLU afin de densifier le bâti, la commission des affaires économiques a adopté jeudi dernier l’amendement que je lui ai proposé : il précise que les dérogations aux règles des PLU prévues pour densifier seront une faculté ouverte aux communes, et non une obligation. Vous aviez apporté oralement cette précision, madame la ministre, mais nous avons préféré l’inscrire dans le texte.

Toujours en ce qui concerne la question des dérogations prévues au point 5, je trouve que la rédaction des alinéas 15 et 18 issue des travaux de l'Assemblée nationale n’est pas d’une grande clarté, si vous me permettez cet euphémisme, peut-être parce que les députés l’ont adoptée nuitamment... Je présenterai donc un amendement pour rendre ces dispositions plus aisément intelligibles.

Enfin, les débats à l’Assemblée nationale et devant la commission des affaires économiques du Sénat ont montré sinon une inquiétude, du moins une certaine vigilance quant à la nécessité d’opérer un arbitrage fin sur la question des obligations en matière d’aires de stationnement. Il est évident que les PLU doivent encourager la création de logements et le recours aux transports collectifs plutôt que de gaspiller le foncier disponible pour y réaliser des aires de stationnement individuelles. Cela étant, il faut veiller à trouver un équilibre entre cet objectif et celui de fournir aux habitants des disponibilités suffisantes en matière d’aires de stationnement, car un déficit dans l’offre de parking serait vraiment de nature à compliquer la vie quotidienne de nos concitoyens, qui n’en demandent pas tant.

Je voudrais dire à mes collègues, y compris ceux de l’opposition, qui ont soulevé ce point lors des débats en commission, que je les ai entendus. Je proposerai un amendement au paragraphe a) du point 5 afin de préciser que les conditions de dérogation aux obligations en matière d’aires de stationnement devront tenir compte de la qualité de la desserte en transports collectifs ou de la densité urbaine. Cela va sans dire, mais cela va mieux en le précisant !

Pour le reste, il me semble indispensable de maintenir sa cohérence et son unité au texte présenté par le Gouvernement. L’objectif est de faire avancer un certain nombre de sujets clairement identifiés, circonscrits et urgents, et non d’anticiper sur la loi « Duflot 2 », en ouvrant le débat sur des questions d’urbanisme à la fois fondamentales, complexes et potentiellement déstabilisantes du point de vue de la sécurité juridique et des collectivités en particulier.

Vous le savez, un texte sur l’urbanisme est toujours propice au dépôt et à la discussion d’un grand nombre d’amendements, qui répondent à des préoccupations louables et qui, parfois, apportent même des réponses juridiques pertinentes à telle ou telle situation précise, mais qui peuvent aussi aboutir à modifier le code de l’urbanisme par petites touches et sans cohérence.

Madame la ministre, je ne doute pas que la loi « Duflot 2 » permettra, à l’automne, de reprendre les questions soulevées par les divers amendements portant articles additionnels et de les traiter de façon plus satisfaisante dans le cadre d’une réforme globale.

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