Il nous faut avoir l'audace d'accompagner ce réel effort que vous nous proposez d'une modification, sans doute fondamentale, en créant, à partir d'un indice de pénibilité, la possibilité pour les entreprises de mieux payer ceux qui travaillent sur des durées et dans des conditions matérielles, climatiques ou psychologiques particulièrement difficiles. Ce sont précisément ces filières qui offrent des emplois : on le sait bien dans le secteur du bâtiment, dans celui de la restauration, dans les services et même, aujourd'hui, dans le secteur agricole qui manque, lui aussi, de salariés.
Par conséquent, je me permets de suggérer d'étudier cette piste pour compléter la réforme capitale et positive qui nous est proposée concernant l'apprentissage.
Vous m'excuserez, mes chers collègues, de dire, au vu des comportements qui s'observent dans certaines régions - je ne citerai pas celle à laquelle je pense - qu'on ne peut pas être dépendants de décisions, d'attitudes inacceptables et partisanes de nature à bloquer les projets des CFA ou des centres d'apprentissage. Il convient donc de prévoir une soupape de sécurité permettant une contractualisation entre l'Etat et les porteurs de projets pour éviter qu'ils ne soient bloqués au seul motif qu'ils ne seraient pas de la bonne couleur politique ou qu'ils ne résideraient pas dans le bon département.
C'est triste, mais je me dois de tenir ce langage à cette tribune. Je proposerai d'ailleurs un amendement tendant à ce que l'on puisse échapper à ce danger.
Quant aux maisons de l'emploi, elles doivent être aussi conçues à partir de ce qui existe. Des expériences ont été réalisées en matière d'information sur la formation et d'accueil des jeunes et des moins jeunes pour leur offrir un parcours de formation débouchant sur un emploi. Il comprend des examens psychologiques qui ne se résument pas à un passage par un guichet banalisé, mais qui évaluent, à partir d'un bilan de compétences, la capacité à étudier. Il faut pouvoir offrir de tels bilans pour, à la fois, cerner les objectifs des jeunes ou des moins jeunes et leur proposer le parcours susceptible d'assurer leur réussite ce qui, vous m'excuserez de le dire, n'est pas très facile.
Il convient de tenir compte des expériences qui ont été conduites dans telle ou telle région : vous me pardonnerez de citer la mienne, mais on y avait créé des liaisons entreprise-formation qui permettaient de proposer ces parcours de formation à 40 000 personnes par an. Je pense que, ce faisant, nous étions un peu utiles. Une telle démarche n'est ni de droite ni de gauche ; elle consiste simplement à concilier pour ces jeunes une ambition forte et une analyse objective des réalités.
Nous avons donc mieux à faire que de nous intenter mutuellement des procès d'intention : nous devons saisir la chance que vous nous offrez, mesdames et messieurs les ministres, de nous mobiliser tous ensemble pour montrer que l'on peut, dans cette société, répondre aux vrais problèmes.
Si nous voulons sortir les jeunes de la désespérance et de l'angoisse, si nous voulons éviter les risques de dérapages extrémistes, nous devons leur prouver que nous sommes capables d'étudier les vraies situations et d'offrir de vraies réponses.
Nous y parviendrons non pas en adoptant des solutions « parkings » ou provisoires, mais en entraînant le monde de l'entreprise : ne créons pas une fausse querelle entre les chefs d'entreprise, qu'ils dirigent des entreprises artisanales, des grandes entreprises ou des PME, et tous ceux qui peuvent espérer devenir des acteurs de l'entreprise. C'est là où il faut sortir de l'idéologie !
Nous pouvons démontrer - c'est ce que vous nous proposez et nous vous soutiendrons - que l'on peut croire à l'entreprise, mais que cette confiance passe aussi par la conviction que l'entreprise est un ensemble, qu'elle peut être le lieu du bonheur et de la réussite, non seulement pour les jeunes ou les moins jeunes, mais aussi pour les personnes handicapées que nous, nous n'avons pas oubliées. En effet, c'est ce Gouvernement qui a apporté, enfin, une amélioration au grand projet voté en 1975, dont nous pouvons nous enorgueillir et dont le rapporteur que j'étais à l'époque tire, en tout cas, une très grande fierté.