Intervention de Christian Favier

Réunion du 6 juin 2013 à 15h00
Modernisation de l'action publique territoriale et affirmation des métropoles — Vote sur l'ensemble

Photo de Christian FavierChristian Favier :

Madame la présidente, mes chers collègues, à l’issue de ce long et passionnant débat, je voudrais en premier lieu vous remercier, madame la ministre, malgré nos différences d’appréciation, de votre écoute et de votre respect du travail parlementaire.

Je veux également saluer M. le rapporteur, mais aussi MM. les rapporteurs pour avis, ainsi que M. le président de la commission des lois pour le travail réalisé et les évolutions qu’ils ont permis au texte d’enregistrer.

Permettez que, pour expliquer le vote des membres groupe CRC sur le texte issu de nos travaux, je revienne d’abord sur la suppression par notre assemblée des articles qui contraignaient les communes d’Île-de-France à se regrouper dans des intercommunalités de très grande taille et sur ceux qui instituaient une métropole parisienne.

Les désaccords qui se sont exprimés dans de très nombreux domaines, en lien avec ces questions, et le manque évident d’enthousiasme, et même de soutien, en faveur des propositions contenues dans ces articles sont responsables de ce rejet.

Pour des raisons parfois très différentes, les mesures prévues dans ce projet de loi n’ont pas rencontré de majorité.

Maintenant, le texte sur lequel nous allons nous prononcer ne comporte plus rien concernant ces questions. Est-ce pour autant que les problèmes auxquels nous sommes confrontés sont réglés ? Évidemment, nous ne le pensons pas. Même si, de façon étonnante, la vie de nos concitoyens a été peu présente dans nos débats, j’ose espérer que chacun avait cette question en tête.

Devant la monté du chômage et de la précarité, face à la désindustrialisation de notre économie, compte tenu de la crise du logement et eu égard aux déséquilibres territoriaux qui se développent, allons-nous doter nos collectivités territoriales des moyens pour répondre enfin à l’attente sociale ? Allons-nous faire face aux besoins qui se font jour pour un grand nombre de nos concitoyens, souvent de façon plus prégnante qu’auparavant, comme l’ont particulièrement souligné ces derniers jours nos collègues élus des petites villes de France ?

Tel est le défi auquel nous sommes confrontés aujourd’hui. L’objectif primordial est de le relever, dans le cadre d’un débat citoyen ouvert à tous.

Sur cet enjeu, je formulerai une remarque : même si nos collectivités territoriales jouent un rôle irremplaçable – nous avons été nombreux à le rappeler –, elles ne peuvent à elles seules être la réponse et ne pourront jamais se substituer à l’action de l’État, à Paris, à Lyon, à Marseille, comme partout en France.

Or la place de l’État n’a pas été abordée au cours de nos travaux, alors que la situation que nous vivons exigerait, dans bien des domaines, un renforcement de sa présence. Il ne faut pas qu’il se replie sur ses seules fonctions régaliennes.

Mais, pour en revenir à la situation des collectivités territoriales, sont-elles confrontées d’abord et avant tout à un problème de gouvernance dans la mise en œuvre des réponses qu’elles doivent apporter aux besoins de nos concitoyens, comme pourrait le laisser penser ce texte ? Franchement nous ne le pensons pas.

En revanche, il est évident qu’elles ont besoin de démultiplier leurs actions dans de nombreux domaines, en particulier pour lutter contre le développement des inégalités sociales et territoriales.

Il nous semble qu’il leur faut, pour y parvenir de façon la plus efficace possible, trouver le chemin de la mise en commun et de la coopération.

Nous en avons la conviction pour toutes les communes de France et sans doute encore plus particulièrement pour les communes d’Île-de-France, compte tenu de l’ultra-urbanisation de cette région, où les bassins de vie se mêlent, où les géographies se mélangent, au gré des conditions de vie et de travail de chacun, où les phénomènes d’exclusion se renforcent.

Dans ce cadre, il faut sans aucun doute structurer cette mise en commun au sein d’intercommunalités volontairement construites à partir d’un territoire de projet, sans pour autant forcer quiconque à y participer, pour respecter la libre administration des communes, fondement de notre démocratie locale qui assure à nos populations que leurs élus de proximité disposent des pouvoirs pour répondre à leurs besoins.

Telle est notre conviction. Si cela vaut pour toutes les communes de France, c’est tout particulièrement vrai pour celles d’Île-de-France.

C’est pourquoi nous avons proposé, pour répondre aux spécificités des trois départements de la petite couronne, et comme le demande le syndicat mixte d’études Paris Métropole, que ces intercommunalités prennent la forme de « coopératives de ville » reposant sur des principes d’égalité des territoires, sur des modes de travail et de décision collaboratifs – proposition du bureau de Paris Métropole –, en fondant cette collaboration sur la recherche du consensus.

Malheureusement, cette proposition ne fut pas réellement étudiée en commission. J’espère qu’elle pourra être entendue à l’Assemblée nationale et en deuxième lecture au Sénat.

Pour notre part, nous ne pouvions accepter l’autoritarisme dont on a fait preuve pour que des villes soient contraintes de se regrouper avec d’autres sans qu’il y ait de réels projets communs.

Qui plus est, ces intercommunalités devaient atteindre, de façon dérogatoire aux règles communes, un seuil de population exorbitant, ne recouvrant aucune réalité objective et mettant en cause in fine l’expression du pluralisme, sans assurer leur réelle mixité.

S’agissant de la métropole parisienne, nous proposions, sur le même modèle que celui de l’intercommunalité, de créer une « coopérative métropolitaine » ouverte aux départements, aux régions, aux intercommunalités et aux communes qui le souhaitaient, pour coordonner leur action à l’échelle de l’unité urbaine et gérer en commun des compétences déléguées par leurs membres, par décision concordante.

Pour respecter chacun, une gouvernance fondée sur trois collèges – ville, intercommunalité et région-département – permettait la représentation de tous.

Cette proposition s’inspirait, chacun peut mieux le mesurer aujourd’hui, des préconisations, une nouvelle fois, de Paris Métropole.

La preuve est ainsi faite que nous voulons dépasser le statu quo. Malheureusement, les conditions d’examen de ce texte ont abouti au résultat que nous connaissons. Dans ces circonstances, si nous nous félicitons du retrait des mesures contenues dans ces articles supprimés, nous ne sommes pas satisfaits que ces questions ne soient pas traitées.

Aussi, même si nous étions en désaccord avec le contenu de ces articles, leur suppression ne saurait être un motif pour changer notre avis global sur ce texte. C’est pourquoi nous voterons contre.

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