Intervention de Henri Tandonnet

Réunion du 11 juin 2013 à 14h30
Débat sur les déserts médicaux

Photo de Henri TandonnetHenri Tandonnet :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, alors que la demande de soins primaires ne cesse d’augmenter sous l’effet du vieillissement de la population, la présence médicale telle que mise en perspective par notre groupe de travail témoigne d’inégalités profondes dans la répartition territoriale de l’offre de soins.

Comme l’ont déjà souligné mes collègues, ce phénomène inquiétant menace certaines zones, notamment les bassins ruraux, tels que le Lot-et-Garonne, et les perspectives d’amélioration spontanée de la situation sont quasiment nulles.

Il existe aujourd’hui des écarts énormes entre les départements en matière d’installation des médecins, pouvant aller de un à huit pour les médecins spécialistes. Autre chiffre préoccupant, 63 % des étudiants en médecine n’envisagent pas d’exercer dans les zones rurales.

Cette situation prouve qu’il importe d’agir rapidement et d’ouvrir de nouvelles pistes de réflexion. À cet égard, je salue les propositions formulées par mon collègue centriste Hervé Maurey dans son rapport d’information sur les déserts médicaux.

De ce dernier, je retiens essentiellement que la solution ne viendra que d’une évolution volontariste de la formation des étudiants en médecine, qui doit constituer l’axe majeur de réflexion face à la situation actuelle. Tant que les étudiants resteront concentrés dans les CHU, et donc dans les métropoles, durant leur phase d’apprentissage, l’objectif de rééquilibrage entre les territoires ne pourra pas être atteint.

Si un effort a été réalisé pour valoriser la médecine générale comme une spécialité à part entière, on ne lui a pas donné une place correspondant aux besoins en instituant un corps professoral suffisant et une formation initiale généralisée à tous les étudiants dans les premières années.

La formation doit être dispensée en situation réelle, c’est-à-dire dans les hôpitaux régionaux ou chez les généralistes formateurs, avec des stages professionnalisants dans des cabinets médicaux en milieu rural.

En matière de formation, le deuxième volet consiste à engager un solide effort de communication en direction des jeunes médecins sur les mesures existantes, qui demeurent peu lisibles pour la profession.

En effet, des dispositifs intéressants existent, mais ils ne sont pas connus des étudiants. Je pense notamment à celui de la loi Fourcade du 10 août 2011 : celle-ci, en créant les sociétés interprofessionnelles de soins ambulatoires, les SISA, a ouvert un nouveau cadre juridique favorisant l’exercice regroupé pluri-professionnel, dans des maisons de santé par exemple. Ces mesures, trop peu connues, sont de nature à lever les réticences des jeunes médecins à s’installer en zone rurale.

L’exercice individuel de la médecine en zone rurale est dépassé. Le médecin de campagne indépendant, notable local, n’existe plus. C’est pourquoi la constitution d’un réseau de professionnels de santé pour assurer une bonne prise en charge des patients devient essentielle. Les pôles et maisons de santé sont, à ce titre, des structures à multiplier. Favoriser la coopération entre le médical et le paramédical permettra aux médecins de sortir de l’isolement et aux patients de bénéficier de soins adaptés à leurs besoins. Il faut tendre vers un parcours de soins allant de la prévention à l’accompagnement, afin de permettre le maintien à domicile.

Face à la crise de la démographie médicale, les collectivités territoriales se trouvent confrontées à une sollicitation très forte de la population. Depuis l’entrée en vigueur de la loi de 2005 relative au développement des territoires ruraux, elles sont autorisées à attribuer des aides aux maisons médicales, mais ce système peine à trouver une réelle efficacité. Il montrera rapidement ses limites devant la pénurie de médecins généralistes.

Mon collègue Pierre Camani et moi-même devons inaugurer dans quinze jours une maison de santé à Duras. Ce projet s’inscrit dans la démarche vertueuse de la CODEM, la commission départementale de la démographie médicale. Cette structure regroupera un dentiste, des aides à domicile, des infirmières, mais pas, pour l’instant, de médecin…

Les investissements immobiliers nécessaires sont très élevés, tandis que les solutions apportées par les collectivités s’avèrent parfois précipitées et ne sont pas toujours adaptées. Il faut un véritable projet de santé. Il me semble nécessaire que les professionnels prennent part à ces investissements immobiliers et que les collectivités ne soient pas les acteurs uniques des projets, mais jouent plutôt un rôle de facilitateurs entre les professionnels et les patients.

La création de maisons médicales sera une solution pertinente lorsqu’elle permettra de mutualiser des moyens, afin par exemple de décharger les médecins de tâches administratives jugées très contraignantes ou de partager les dossiers médicaux et administratifs. Ces outils ne pourront, bien entendu, être mis en place sans une bonne couverture numérique de nos territoires par fibre optique.

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