Le projet de loi que nous avons à examiner est, comme vous avez pu le constater, un texte complexe et privé d'unité. Certes, les « DDADUEs » sont réputés être de nature purement technique et ne poser aucune difficulté, s'agissant de simples transpositions de directives, qui ne laissent guère de marge de manoeuvre au législateur national. Mais vous savez comme moi que ce n'est pas toujours aussi simple.
D'abord, ce texte, que nos deux commissions ont regardé dans le détail, est particulièrement copieux. De surcroît, certains de ses articles présentent une structure « gigogne », ratifiant, en une seule disposition, plusieurs ordonnances de transposition différentes.
Il comportait 31 articles dans sa version initiale. A l'Assemblée nationale, vous l'avez complété par 11 articles additionnels. Au Sénat, nous lui avons ajouté encore 5 articles, et en avons supprimé un ; nous avons adopté conformes 18 articles.
Une deuxième difficulté est venue du calendrier d'examen particulièrement contraint. A ce propos, je tiens à remercier nos collègues députés pour le travail considérable qu'ils ont accompli en amont de la première lecture au Sénat, réécrivant complètement certains articles. Si, à l'initiative principalement de votre rapporteur Philippe Plisson, vous n'aviez pas apporté au DDADUE des améliorations considérables, qui ne sont pas que rédactionnelles, nous aurions été bien en peine au Sénat de sortir un texte propre dans les délais d'examen extrêmement brefs qui nous ont été laissés par le Gouvernement.
Au-delà de ces observations de forme, je vois, sur le fond, un triple motif de satisfaction pour nous, députés comme sénateurs, d'avoir pu adopter en première lecture ce texte important.
Premièrement, nous devons nous féliciter, en tant que parlementaires nationaux, de pouvoir contribuer à réduire le retard pris par la France dans la transposition des directives européennes. La crédibilité de notre pays au sein de l'Union européenne et, partant, son influence réelle, dépendent aussi de sa capacité à transposer en temps et en heure l'abondante législation communautaire, pour l'appliquer effectivement.
Deuxièmement, je constate avec une grande satisfaction que ce DDADUE « développement durable » consacre, par son appellation même, l'émergence du développement durable comme un champ majeur d'action des pouvoirs publics. Ce texte épouse presqu'exactement les contours du champ de compétences de nos commissions du développement durable, de création récente - la nôtre plus encore que la vôtre. Il recouvre trois rubriques principales : l'environnement, les transports et l'énergie.
Troisièmement, et c'est un sujet qui m'est cher, je suis particulièrement heureuse que nous ayons pu oeuvrer à la transposition de la directive de 2009 qui transcrit dans le code des transports le « socle » des normes sociales applicables aux gens de mer résultant de la convention du travail maritime de 2006 signée dans le cadre de l'Organisation internationale du travail (OIT). La mise en place de règles sociales minimales, dès lors qu'elles seront effectivement contrôlées, contribuera à rétablir de la loyauté dans la concurrence en mer, sans gêner les navires qui respectent déjà les droits sociaux des marins. Ce qui est le cas de la flotte sous pavillon français.
En ce qui concerne, plus précisément, les apports du Sénat à ce texte, ils sont finalement peu nombreux en dehors des améliorations rédactionnelles ou de cohérence.
En commission, nous avons cherché, à l'article 10, à sécuriser l'ordonnance relative à la refonte des polices administrative et judiciaires de l'environnement. Un article 10 bis a été ajouté à l'initiative de notre collègue Ronan Dantec pour corriger certaines imprécisions qui auraient pu avoir pour effet de réduire le champ de compétences des agents commissionnés et assermentés des réserves naturelles.
Nous avons complètement réécrit l'article 20, relatif aux outre-mers, afin de corriger des erreurs de références, procéder à des coordinations manquantes, et étendre le dispositif de certification des navires en matière sociale à la Nouvelle Calédonie, Wallis-et-Futuna et aux Terres Australes et Antarctiques Françaises.
Nous avons supprimé l'article 27 A qui remplaçait le terme « biocarburants » par le terme « agrocarburants » dans l'ensemble des textes de nature législative en droit national français. Deux considérations principales nous ont conduits à préférer maintenir le terme « biocarburants » :
- d'une part, « biocarburants » est le terme reçu dans les directives européennes et consacré par l'usage courant. En changer au profit d'« agrocarburants » poserait à la fois des difficultés juridiques de compatibilité de la législation nationale avec la législation communautaire, et des difficultés pratiques de compréhension par les consommateurs et les citoyens ;
- d'autre part, alors que tous les agrocarburants sont des biocarburants, tous les biocarburants ne sont pas des agrocarburants : c'est le cas, notamment, des biocarburants issus de la biomasse forestière ou des algues. Les deux termes ne sont donc pas exactement substituables.
En séance publique, le Sénat a encore adopté quatre articles nouveaux.
L'article 6 bis, adopté à mon initiative, assure la coordination nécessaire entre l'article 6 du projet de loi, relatif à la réglementation applicable aux produits biocides, et la loi du 1er août 2008 relative à la responsabilité environnementale.
L'article 10 bis A, adopté à l'initiative de notre collègue Ronan Dantec, sanctionne pénalement comme une infraction commise en bande organisée le trafic d'animaux appartenant à des espèces protégées.
L'article 16 bis, adopté à l'initiative du Gouvernement, vise à modifier à la marge une disposition introduite par la loi portant diverses dispositions en matière d'infrastructures et de services de transports, qui vient d'être adoptée par le Parlement.
L'article 28 bis, adopté également à l'initiative du Gouvernement, instaure un régime particulier d'accès au réseau de gaz naturel pour les industries gazo-intensives. Cet article, présenté assez tardivement par le Gouvernement, nécessite d'être un peu recadré et je vous proposerai, en commun avec Philippe Plisson, une proposition de rédaction nouvelle.
Au final, le Sénat a adopté ce projet de loi touffu et technique, mais consensuel, à l'unanimité moins une abstention.
Il est maintenant de notre responsabilité, chers collègues, d'adopter définitivement et sans plus tarder ce texte qui contribuera à mettre notre pays en règle avec la législation communautaire dans ces domaines essentiels pour le développement durable de la France, et de l'Europe.
Je ne doute pas que nous parviendrons sans difficulté à un accord, à l'issue de cette commission mixte paritaire.