Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la version du texte que nous examinons cet après-midi en deuxième lecture est relativement allégée par rapport à la proposition de loi initiale.
En effet, l’article 1er, qui consacrait le principe de proportionnalité et d’adaptation des normes à la taille des collectivités, a été supprimé.
Le même sort a été réservé à des dispositions dont la portée était jugée trop incertaine juridiquement au regard des principes d’égalité ou de liberté contractuelle. Cela a été le cas de plusieurs mesures en matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire, relatives à l’institution de « secteurs de projet » – article 20 –, à la modernisation de la procédure de création d’une zone d’aménagement concerté – article 21 –, aux modalités d’opposabilité des clauses des cahiers des charges dans les lotissements – article 23 –, à l’autorisation de la conclusion d’une promesse de vente en lotissement avant la délivrance d’un permis d’aménager – article 24 –, aux dérogations à la réalisation d’aires de stationnement dans certaines zones géographiques – article 26 –, ou encore à l’encadrement de la signature de conventions d’archéologie préventive – article 27.
D’autres articles ont également été supprimés, car ils étaient redondants avec des dispositions figurant dans la proposition de loi de Jacqueline Gourault et de Jean-Pierre Sueur, adoptée voilà quelques semaines par le Sénat.
Il reste dans la présente proposition des dispositions que nous pensons consensuelles, à l’exception de deux d’entre elles sur lesquelles je serai particulièrement attentive car nous prendrons notre décision sur l’ensemble du texte en fonction de la teneur de la discussion.
Lors de la première lecture, nous avons tous dénoncé dans cette enceinte les conséquences de la prolifération normative et l’insécurité juridique qui en résulte.
En effet, mes chers collègues, nous ne pouvons que partager ce constat tant les difficultés rencontrées quotidiennement par les élus locaux, qu’ils soient, je le répète, de gauche, de droite ou du centre, sont réelles.
En tant que représentants des collectivités locales, nous nous devons de tirer le bilan de l’inflation législative sur l’action des politiques locales et d’apporter des solutions à ce problème. D’ailleurs, cela nous a été fortement rappelé par les élus locaux, notamment lors des états généraux de la démocratie territoriale.
Si nous sommes d’accord sur le constat, nous sommes en revanche divisés quant aux moyens préconisés en première lecture par la présente proposition de loi.
Pour notre part, nous avions voté dans un premier temps pour la motion tendant au renvoi à la commission et, ensuite, contre le texte, pour deux raisons principales.
La première d’entre elles n’a plus lieu d’être aujourd’hui eu égard au texte qui nous revient en deuxième lecture : effectivement, l’article 1er instaurant le principe de proportionnalité des normes a été supprimé. Nous nous réjouissons de cette suppression, même si cette disposition a été reprise en filigrane dans la proposition de loi précitée portant création d’un conseil national chargé du contrôle et de la régulation des normes applicables aux collectivités locales de nos collègues Jacqueline Gourault et Jean-Pierre Sueur.
Le principe de proportionnalité des normes est évidemment inacceptable, car son application ne reviendrait qu’à contourner le problème et à créer de nouvelles sources d’inégalité en fonction des richesses disponibles sur les territoires. Permettez-moi de rappeler une nouvelle fois que nous devrons veiller à ce que les recommandations du futur conseil national n’aboutissent pas à mettre en place une forme de déréglementation ou de dérégularisation dans laquelle les objectifs en matière d’accessibilité, de sécurité, de normes sanitaires et de protection de l’environnement seraient relégués.
La seconde raison qui nous avait incités à voter contre la présente proposition de loi tient à l’article 18, supprimé puis finalement réintroduit par notre commission. Cet article permet aux communes de moins de 1 500 habitants de se passer des centres communaux d’action sociale, les CCAS. Or, compte tenu de l’extension de la précarité dans notre pays, cette mesure est pour le moins dangereuse. Nous examinerons ultérieurement ce point, puisque nous avons déposé un amendement visant à supprimer de nouveau cet article. Je me permets d’y insister du haut de cette tribune : pour mon groupe, cette question est essentielle.
Pour en revenir à l’esprit du texte, je rappellerai la position de mon groupe sur la problématique des normes applicables aux collectivités locales : tout en notant la nécessité de clarifier l’arsenal normatif pesant sur les collectivités territoriales, mon groupe a toujours pris soin de souligner que derrière le rejet des normes par les élus se cache en réalité la difficulté de mettre en œuvre ces dernières, faute d’accompagnement technique par les administrations et de soutien financier par l’État, et cela ne date pas d’aujourd'hui.
Gardons ce fait à l’esprit : l’édiction de règles répond le plus souvent à un besoin essentiel de sécurité technique et juridique. La question qui doit être posée est donc celle des moyens financiers, car si les collectivités se retrouvent en difficulté, c’est en raison non pas tant de la prolifération législative, pourtant bien réelle, que du désengagement des gouvernements successifs, qui ont peu à peu restreint les soutiens de l’État, à savoir suppression des dotations et subventions, allégements fiscaux bénéficiant aux entreprises, transferts de compétences et nouvelles attributions aux collectivités sans les compensations financières exigées. Là se trouve, me semble-t-il, la principale source du problème.
Nous ne devons pas céder à la facilité et contourner la difficulté. Au contraire, nous devons l’envisager dans sa globalité, afin de répondre aux attentes non seulement des élus, essentiellement demandeurs d’expertise et de moyens, mais, plus largement, de l’ensemble de la population, puisque in fine c’est bien elle qui est concernée.
Cela étant dit, nous soutiendrons les quelques dispositions qui restent dans la présente proposition de loi et qui relèvent pour le coup de la simplification. Quant à notre vote sur l’ensemble du texte, nous le réservons pour l’instant, car il dépendra du sort donné à nos amendements, principalement à celui qui porte sur l’article 18. §