Intervention de Frank Pacard

Délégation sénatoriale à la prospective — Réunion du 4 juin 2013 : 1ère réunion
Réunion de la délégation : Audition de M. Frank Pacard directeur général adjoint chargé de l'enseignement de l'école polytechnique

Frank Pacard, directeur général adjoint chargé de l'enseignement de l'École polytechnique :

L'hypothèse de l'absorption des classes préparatoires par les universités est un sujet complexe. Ce qui fait la force des très grandes écoles, c'est tout de même la sélection. L'École polytechnique envoie en quatrième année ses élèves dans tous les grands établissements mondiaux : Stanford, MIT, EPFL, l'École polytechnique fédérale de Zurich, - l'ETH -, l'Institut royal de technologie de Stockholm - KTH -, l'Imperial College, etc. Grosso modo, les polytechniciens de quatrième année sont bien meilleurs que n'importe quel étudiant de tous ces grands établissements. La plupart nous demande comment nous faisons. La réponse est simple : il y a un concours à l'entrée. C'est vraiment un dispositif que les autres, y compris les grandes universités américaines, nous envient.

La sélection des élèves à l'entrée permet d'avoir des promotions relativement homogènes, même si c'est de moins en moins vrai, et « un produit », à la sortie de l'école, sinon standardisé, du moins calibré. Les entreprises savent à quoi elles s'attendent quand elles embauchent un polytechnicien.

Quant à savoir s'il faut faire disparaître les classes préparatoires ou les transférer à l'université, je pense que tout dépend à quel niveau on se place. À celui de la France, ce serait une erreur phénoménale que de casser un système qui, finalement, malgré de gros défauts, notamment au niveau de la parité - 20 % de filles seulement -, présente deux avantages.

Premièrement, dans la mesure où les filières scientifiques universitaires connaissent une crise réelle, sans les classes préparatoires et les écoles d'ingénieurs, encore plus d'étudiants se seraient détournés des études scientifiques. Deuxièmement, un tel système permet à la France de produire les ingénieurs dont l'économie a besoin. Que ces ingénieurs se dirigent vers la finance et le conseil, c'est un autre problème.

Je tiens à ouvrir une parenthèse : il est extrêmement difficile de lutter contre les entreprises de conseil ou de la finance, qui disposent d'énormément de pouvoirs et ont besoin d'ingénieurs bien formés, auxquels elles font faire totalement autre chose.

Je suis donc quelque peu inquiet. Je perçois bien les problèmes qui se posent à l'université, mais il y aurait, pour la France, un danger énorme à détruire un système qui, malgré ses défauts, fonctionne relativement bien.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion