Les 2° et 3° de l'article 15 sont relatifs au décompte des effectifs dans l'entreprise.
Le franchissement de certains seuils d'effectifs ouvre droit pour les salariés à une représentation syndicale, mais aussi contraint l'entrepreneur à contribuer à la formation professionnelle, aux transports en commun, ou encore à l'allocation de logement. C'est sur ce point que le Gouvernement a choisi d'engager sa nouvelle bataille en essayant, depuis les ordonnances Villepin de cet été, de permettre aux entreprises de se dérober à leurs obligations dans ce domaine.
L'élection de représentants du personnel est obligatoire dans les entreprises qui emploient au moins vingt salariés ; l'élection d'un comité d'entreprise ou la constitution d'un comité d'hygiène et de sécurité sont obligatoires à partir de cinquante salariés : ces droits à la représentation au sein de l'entreprise apparaissent dans le discours du Gouvernement, repris par la commission, comme de simples coûts qu'il faut s'attacher à réduire.
Cette volonté de minorer les effectifs de l'entreprise afin de pouvoir contourner le droit syndical - faute de pouvoir directement légiférer contre la représentation du personnel dans les entreprises - est apparue avec l'ordonnance excluant les moins de vingt-six ans des effectifs des entreprises.
Le Conseil d'État a été saisi de cette question par les organisations syndicales dès le 10 août dernier ; le 19 août, il décidait de saisir la Cour de justice des Communautés européennes, dans la mesure où cette disposition française semble contrevenir à la directive européenne du 11 mars 2002. Cette directive prescrit, en effet, aux États membres d'organiser l'information des travailleurs dans les établissements qui emploient au moins vingt salariés ou dans les entreprises qui en emploient au moins cinquante, tout en renvoyant à chaque État membre le soin de déterminer le mode de calcul des seuils des travailleurs employés.
Depuis le 26 octobre, un troisième recours auprès du Conseil d'État a conduit à la suspension de l'application de l'ordonnance en raison du doute sérieux que son éventuelle incompatibilité avec la directive européenne fait peser sur sa légalité : dans l'attente de la décision de la Cour de justice, les entreprises doivent donc continuer à prendre en compte les salariés de moins de 26 ans dans leurs effectifs.
Le 3° de l'article 15 du projet de loi relève bien de la même démarche, puisqu'il tend à exclure les titulaires d'un CI-RMA du décompte des effectifs. Une telle disposition conduit à créer des sous-catégories de travailleurs : soit trop jeunes, soit trop peu intégrés... Elle participe aussi grandement de la volonté gouvernementale, soutenue par le MEDEF, de mettre en pièce la représentation des travailleurs et, par là même, le code du travail.
L'adoption de cet amendement visant à supprimer l'alinéa concerné nous permettrait de nous inscrire - c'est la moindre des choses - dans le cadre des recommandations du Conseil d'État.