Intervention de Valérie Létard

Réunion du 19 juin 2013 à 14h30
Enseignement supérieur et recherche — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Valérie LétardValérie Létard, rapporteur pour avis :

En outre, notre système d’évaluation reste perfectible, même s’il a évolué dans le bon sens depuis quelques années, sous la houlette de l’actuel président de l’AERES. Je reviendrai sur cette question lors de la présentation de nos amendements s’y rapportant.

Enfin, les mondes de la recherche et de l’économie sont encore trop séparés. Comme le relève encore la Cour des comptes, la France est « bonne en recherche » mais « nettement plus faible en innovation ». Elle s’inscrit, s’agissant de cette dernière, dans la catégorie des pays « suiveurs », à la vingt-quatrième place mondiale.

Nous nous occupons insuffisamment des retombées économiques de la recherche, qui sont peu prises en compte dans les indicateurs de performance de la dépense publique comme dans les évaluations des chercheurs et des équipes.

Pourtant, des instruments ont été mis en place pour établir des ponts entre les deux mondes. Comme nous le rappelait le commissaire général à l’investissement, M. Louis Gallois, la semaine dernière en commission des affaires économiques, une partie majeure des 35 milliards d’euros du programme des investissements d’avenir, le PIA, sont consacrés à l’enseignement supérieur et à la recherche.

À cet égard, je m’étonne de l’absence d’intégration, dans le projet de loi, de toutes les structures mises en place par le PIA pour faciliter le transfert, les instituts de recherche technologique – les IRT –, les sociétés d’accélération du transfert de technologies – les SATT – et les instituts d’excellence énergies décarbonées – les IEED.

Il est également étonnant de constater l’absence de référence directe à l’Agence nationale de la recherche, l’ANR, par laquelle transitent pourtant la moitié des crédits du PIA.

L’intégration de ces structures permettrait une meilleure cohérence ou, en tout cas, une meilleure explication au sein de ce texte, de l’organisation possible de ce « mikado ».

À ce propos, vous avez fait le choix, madame la ministre, d’établir une politique de vases communicants entre l’ANR et les grands organismes de recherche. Or, le financement sur projets ne représente qu’une faible part du financement total de la recherche, dont le niveau est d’ailleurs sensiblement inférieur à celui d’autres grands pays scientifiques.

Il permet pourtant de soutenir une recherche qui ne rentre pas forcément dans le champ des grands axes stratégiques définis au niveau national. La réduction du financement de l’ANR, prévue par la programmation triennale 2013-2015, affectera le dynamisme des équipes de recherche, ainsi que l’a clairement souligné la Cour des comptes. Pouvez-vous donc nous préciser, madame la ministre, au-delà de ce projet de loi, quelles sont les évolutions de plus long terme que vous souhaitez donner à cette structure, devenue centrale dans le paysage de notre recherche ?

J’en viens maintenant aux propositions que vous nous faites dans votre texte pour relever ces défis, madame la ministre, et aux améliorations que nous souhaitons y apporter.

Sur la gouvernance, vous mettez en place une stratégie nationale de la recherche. Passons sur le fait qu’elle remplace une stratégie nationale de la recherche et de l’innovation, qu’il aurait peut-être été préférable de réorganiser. Je vous proposerai, pour ma part, de l’étendre au transfert, dont l’aspect stratégique doit, de l’avis de la commission des affaires économiques, clairement apparaître.

À l’échelon territorial, sera élaboré un schéma régional de la recherche et de l’innovation. Je vous proposerai de mieux y associer les collectivités autres que la région qui, pour certaines d’entre elles, s’investissent amplement dans la recherche.

Je pense notamment aux intercommunalités, qui, dans mon territoire comme dans de nombreux autres, contribuent substantiellement au financement de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Les PRES sont supprimés au profit d’un nouveau type de regroupements : les communautés d’universités et établissements. Là encore, pourquoi mettre à bas ce qui existait pour le remplacer par quelque chose de finalement très proche ? En tout état de cause, je vous proposerai de renforcer leur statut de confédération – vous en avez parlé tout à l’heure, madame la ministre –, qui apporte davantage de souplesse, et de sécuriser leurs statuts par un vote à la majorité qualifiée des deux tiers. Cela apportera sans doute plus de stabilité et favorisera concertation et partenariat entre les membres d’une telle communauté, ce qui relève, me semble-t-il, du bon sens.

J’en viens à l’évaluation. Le texte remplace une entité qui montait en puissance et en qualité, l’AERES – certes, elle a suscité des difficultés en son temps –, par une nouvelle autorité administrative indépendante, le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur, ou HCERES. Nos auditions ont fait apparaître l’incohérence d’une telle démarche, qui entraînerait de coûts importants et retarderait les évaluations à venir. En effet, madame la ministre, si beaucoup souscrivaient à une telle idée au départ, ils ont changé d’avis, car l’AERES est précisément en train de se transformer, en corrigeant les éléments qui posaient problème.

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