Intervention de Jacques-Bernard Magner

Réunion du 19 juin 2013 à 14h30
Enseignement supérieur et recherche — Suite de la discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Jacques-Bernard MagnerJacques-Bernard Magner :

Madame la ministre, les réponses que vous apportez aujourd’hui, au travers de ce projet de loi, sont sans aucun doute dans l’intérêt de nos étudiants, de nos universités et de notre recherche. Ce texte est le fruit des nombreuses consultations menées dans le cadre des assises de l’enseignement supérieur et de la recherche que vous avez organisées.

Le projet de loi est marqué par une double volonté de simplification et de cohérence. Par son ambition, il répond aux défis que nous devons relever pour notre jeunesse, notre société et notre économie. Il s’inscrit, dans une certaine mesure, dans la continuité du projet de loi pour la refondation de l’école de la République. Il exprime la même volonté de s’occuper pleinement de la priorité du quinquennat : la jeunesse. Il représente lui aussi une réforme d’ampleur préparée par une grande concertation. Il témoigne d’une même détermination à relever le défi de la démocratisation et de la réussite de tous.

Ce projet de loi touche de nombreux domaines, car il aborde l’enseignement supérieur et la recherche de manière globale. De même que le projet de loi pour la refondation de l’école de la République mettait l’enfant au cœur du système et donnait la priorité au primaire, une réforme de l’enseignement supérieur doit être centrée sur la réussite étudiante, notamment dans les premiers cycles, au cours desquels les taux d’échec sont beaucoup trop importants.

La priorité donnée à la réussite étudiante se traduit par l’objectif ambitieux de parvenir en 2020 à 50 % des jeunes d’une même classe d’âge diplômés du supérieur. Cette priorité inspire de nombreuses orientations du projet de loi : continuité entre le lycée et l’enseignement supérieur, constitution progressive par l’étudiant de son projet personnel et professionnel, instauration d’un cadre national des formations, rapprochement des classes préparatoires et des universités, meilleure orientation des bacheliers professionnels et technologiques.

Nous souhaitons ainsi affirmer dans la loi l’importance de la pluridisciplinarité dans les premiers cycles universitaires. C’est ce qui doit permettre une spécialisation progressive des études et améliorer le processus d’orientation. Des filières excessivement cloisonnées nuisent au choix des étudiants, qui, à la sortie du lycée, peuvent ne pas avoir définitivement construit leur projet personnel.

Ce texte a également pour ambition de remettre l’État au cœur de la politique universitaire et de recherche de notre pays. En effet, pour la précédente majorité, l’autonomie des universités, qui a certes son utilité et que nous défendons, devait passer par l’effacement de l’État. Pour nous, une autonomie des universités bien comprise passe par un lien avec un État qui définit, aux niveaux national et international, les priorités de la recherche et de l’enseignement supérieur. Ce lien doit se nouer par le contrat. Il est essentiel de le rétablir par le biais de ce texte, comme le souhaitent un grand nombre d’universitaires et de chercheurs.

Par ailleurs, le projet de loi s’attache à définir la gouvernance des universités. Comment concilier le pouvoir présidentiel, utile au sein de l’université, et un travail collectif et démocratique ? Un juste équilibre a été trouvé en la matière.

Le texte aborde également le rapport avec les territoires. La régionalisation des universités n’est pas une bonne chose. L’État doit pouvoir travailler avec des universités autonomes, en rapport étroit avec les collectivités locales, en particulier les régions. La création des communautés universitaires concourt à cet objectif. Une des limites de la loi LRU était qu’elle reposait sur une carte universitaire de la France insatisfaisante, avec d’un côté des pôles d’excellence, de l’autre des premiers cycles dans beaucoup d’universités.

Enfin, le projet de loi est centré sur l’avenir des étudiants, la lutte contre l’échec et l’amélioration de l’orientation. Toutes les propositions qui sont faites aujourd’hui participent de cette volonté de lutter contre l’échec universitaire, qu’il s’agisse des quotas, de l’orientation envisagée ou encore des licences pluridisciplinaires.

Le projet de loi comporte d’autres avancées. Il favorise la continuité des enseignements entre le lycée et l’enseignement supérieur. Il garantit aux bacheliers des filières professionnelles et technologiques une meilleure insertion dans les instituts universitaires de technologie, en leur accordant notamment un quota minimal d’accès prioritaire.

L’article 15 du projet de loi, qui vise à amender les dispositions de l’article L. 611-2 du code de l’éducation relatives aux liens nécessaires entre les enseignements supérieurs et les milieux professionnels, doit permettre de renforcer ces liens, au bénéfice de l’intégration effective des jeunes sur le marché du travail à l’issue de leur parcours universitaire. Cet article prévoit notamment l’intégration des stages, y compris dans le domaine de l’économie sociale et solidaire, au sein du parcours de formation.

Madame la ministre, vous avez évoqué à plusieurs reprises l’importance que vous accordez au développement de l’alternance, l’objectif étant le doublement du nombre de jeunes formés par cette voie d’ici à 2020. Certaines universités ont déjà des taux de recours à l’alternance extrêmement élevés, dépassant parfois 20 %. Le développement de l’alternance est un élément important, car cette voie permet d’augmenter considérablement les chances d’insertion professionnelle réelle sur le terrain. L’alternance ouvre les universités sur leur écosystème économique.

Cependant, l’alternance – c’est encore plus vrai pour les stages – doit être intégrée dans un parcours de formation et avoir une justification pédagogique. Le lien entre l’alternance et la qualification doit être totalement avéré. L’article 15 du projet de loi tend à imposer une cohérence entre le stage et la formation suivie par l’étudiant. Les conseils de perfectionnement des formations participent à la définition des programmes. Ils ont pour objectif d’apprécier la pertinence du projet de formation au regard de l’évolution des compétences et des métiers. Pour le Gouvernement, il est important de développer la mise en place des conseils de perfectionnement, qui constituent l’interface entre le monde académique et les milieux professionnels, comme le rappelle l’article L. 611-2 du code de l’éducation.

Les stages doivent donc être en cohérence avec la formation suivie par l’étudiant et faire l’objet d’un suivi pédagogique approprié, afin d’éviter que les entreprises n’en fassent une utilisation abusive. La nouvelle procédure d’accréditation impose que le stage soit intégré dans une formation, ce qui sécurisera énormément les choses et découragera toute velléité de commettre des abus. Le développement des stages doit être au cœur de la stratégie de tous les établissements d’enseignement supérieur, et pas seulement des universités.

Je tiens à rappeler que le projet de loi pour la refondation de l’école de la République, dont la formation des enseignants est un des piliers, prévoit la création des écoles supérieures du professorat et de l’éducation, les ESPE, composantes à part entière de l’université. Dès la rentrée 2013, ces écoles seront accréditées conjointement par le ministre de l’éducation nationale, Vincent Peillon, et vous-même, madame la ministre, sur la base du cahier des charges établi par vos deux ministères. Les ESPE permettront d’offrir enfin une véritable formation professionnelle à tous les futurs enseignants. Elles déploieront progressivement leur offre de formation pour l’ensemble des métiers de l’éducation et de la formation. Grâce au processus d’accréditation des ESPE, les projets de formation des masters « métiers de l’éducation et de la formation » seront en cohérence au niveau national et les futurs enseignants pourront bénéficier des avancées de la recherche et des innovations pédagogiques.

L’enseignement supérieur et la recherche sont au cœur du modèle de société que nous voulons construire. Ils participent de la volonté d’émancipation de chacun et font le pari de l’intelligence. Votre projet de loi, madame la ministre, s’attache à reconstruire nos universités, mises à mal sous le précédent quinquennat.

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