Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le texte qu’il nous est proposé de discuter aujourd’hui est d’un abord complexe. Il comporte en effet de multiples entrées : transposition de six directives européennes, ratification de douze ordonnances transposant elles-mêmes chacune plusieurs directives européennes, et adaptation du droit national à une série de règlements... Seuls points communs de ces textes, ils émanent de l’échelon européen et concernent l’environnement.
Ce texte d’une trentaine d’articles aborde aussi bien les conditions de travail des gens de mer, que les transports routiers et aériens, les risques industriels, ou encore les réseaux d’énergie. Comme cela a déjà été dit, nous avons affaire à un texte touffu et dense puisqu’il prévoit la transposition en droit français de six directives et de plusieurs règlements ou directives déjà transposés, ainsi que la ratification de douze ordonnances. Les sujets abordés sont extrêmement disparates et le projet de loi n’en est que plus complexe.
La France, qui se doit d’être aux côtés de l’Allemagne l’un des moteurs de l’Europe, rencontre de sérieuses difficultés à transposer en temps et en heure les directives adoptées à Bruxelles. Notre pays a certes vu sa position s’améliorer récemment, mais il a longtemps figuré en queue du classement des États membres dans cet exercice : c’est malheureusement la triste réalité.
Le retard à transposer les directives entraîne plusieurs conséquences dommageables, comme l’insécurité juridique, la fragilisation de la position de la France à l’égard de la Commission européenne et de nos partenaires, mais aussi la multiplication des procédures contentieuses et le risque, à terme, d’être condamné au versement d’amendes ou d’astreintes. Cela s’est déjà malheureusement produit.
Le bilan annuel de gouvernance pour l’année 2011 publié par le commissaire européen chargé du marché intérieur et des services, notre ancien collègue Michel Barnier, montre une amélioration réelle. Toutefois, la position de notre pays reste finalement assez médiocre. Ainsi, la France atteint tout juste l’objectif de moins de 1 % de déficit de transposition, ce qui classe notre pays au quatorzième rang sur vingt-sept États membres, ex-æquo avec l’Espagne. La France se situe aussi au quatorzième rang pour les délais de transposition.
Comme je le dis souvent, nous aurions intérêt à nous inspirer de l’attitude des pays anglo-saxons, qui transposent a minima – nous y reviendrons au sujet de la traduction du mot « biofuel » – mais font preuve d’une forte implication très en amont de l’édification d’une directive, au travers de l’élaboration d’un Livre blanc ou d’un Livre vert.
Si l’on veut faire du lobbying afin d’écrire un texte comme on le souhaite, il faut s’y prendre dix ans avant son élaboration, et non pas après coup pour y ajouter des modifications.
Mais il ne suffit pas de transposer dans les délais, encore faut-il transposer correctement. À cet égard, la France présente un « déficit de compatibilité » de son droit national de 1, 3 %, qui la classe dans les tout derniers États membres, seuls le Portugal et l’Italie faisant moins bien.
Par ailleurs, vous me permettrez de regretter, mes chers collègues, les mauvaises conditions de l’examen de ce texte, qui ont été soulignées notamment par les rapporteurs. Cela ne nous paraît guère satisfaisant pour un texte comportant autant d’articles. Je crains que le souci du Gouvernement d’aller vite pour tenir les délais de transposition fixés à Bruxelles ne l’ait poussé à négliger quelque peu, encore une fois, les droits du Parlement, et particulièrement ceux du Sénat, ce que nous ne pouvons pas tolérer. Je pense d’ailleurs que mes collègues, toutes tendances confondues, s’accorderont sur ce point : le Sénat offre toujours, dans ce domaine comme dans beaucoup d’autres, une valeur ajoutée sur le plan législatif, procédant à une lecture plus précise et plus affinée que l’autre assemblée.