Intervention de Geneviève Fioraso

Réunion du 3 juillet 2013 à 14h30
Enseignement supérieur et recherche — Adoption des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire

Geneviève Fioraso :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la commission mixte paritaire a établi et voté une nouvelle version du projet de loi relatif à l’enseignement supérieur et à la recherche. C’est cette version enrichie par nos débats qui est soumise à vos délibérations.

Ce texte, cela vient d’être souligné, a traversé de nombreuses étapes sans que soient jamais compromises les priorités qui le fondent : la réussite étudiante et une nouvelle ambition pour la recherche. En revanche, de chacune de ces étapes, il est sorti enrichi et précisé ; nous avons trouvé un équilibre qui permettra d’atteindre les objectifs fixés avec plus d’efficacité.

La première des priorités, la réussite des étudiants, de tous les étudiants, est sortie renforcée des débats parlementaires. Le projet de loi mise sur l’avenir de la jeunesse et fait reposer cet avenir sur le haut niveau de qualification des générations actuelles et futures. Il fait en sorte que tous les jeunes aient le droit de réussir, en compensant les inégalités dès le début et tout au long des cursus de formation.

Cette politique d’éducation supérieure commence donc non pas après le bac, mais au tout début de la scolarité obligatoire, avec une formation des enseignants ambitieuse, complète et efficace. Les écoles supérieures du professorat et de l’éducation, les ESPE, ne figurent pas dans le texte que je porte, mais dans la loi pour la refondation de l’école de la République. Elles sont néanmoins mentionnées dans le présent texte, et nous verrons tout à l'heure qu’une mise en cohérence des deux textes de loi vous sera proposée.

Dans le texte qui vous est soumis aujourd’hui, toutes les conditions de la réussite étudiante sont améliorées : l’orientation et la continuité bac-3/ bac+3, la diversification des méthodes pédagogiques, avec un plan numérique ambitieux, le rapprochement entre les différentes filières de formation, la spécialisation progressive au cours du cycle de licence et l’amélioration de l’insertion professionnelle grâce à l’intégration à la formation elle-même des expériences en entreprise ; à cet égard, je pense à l’alternance et à des stages encadrés intervenant plus tôt dans le cursus de formation. Cet ensemble de mesures sera mis en œuvre en coordination avec tous les autres ministères qui gèrent également une partie de l’enseignement supérieur, sous la forme d’une stratégie nationale d’enseignement supérieur.

En ce qui concerne la recherche, qui constitue la seconde priorité du projet de loi, tout est maintenant réuni pour proposer et soutenir une nouvelle ambition collective. Il existe désormais une stratégie nationale de la recherche portée et développée par les cinq alliances thématiques, fortement cohérente avec la stratégie européenne exprimée dans les priorités Horizon 2020 et principalement déclinée en neuf défis sociétaux compréhensibles par le plus grand nombre.

Notre ambition est également de préserver notre recherche fondamentale, dont la qualité, reconnue dans tous les domaines, nous place en sixième position mondiale ; je rappelle d'ailleurs que le CNRS est de loin le premier publiant au monde. Enfin, nous souhaitons améliorer la transformation des découvertes scientifiques en innovations – en la matière, nous ne sommes qu’au vingtième rang mondial – dans tous les domaines – sociétaux, culturels, environnementaux et économiques –, avec à la clé des emplois pour notre pays, qui a bien besoin d’en créer, ne serait-ce que pour offrir des perspectives aux 25 % de jeunes qui sont au chômage.

Pour mettre en œuvre ces priorités, deux objectifs relevant de l’organisation de l’enseignement supérieur et de la recherche ont également été confortés.

Le premier est la simplification des procédures d’accréditation et d’évaluation, des strates structurelles – le fameux mikado si souvent décrié au cours des Assises de l’enseignement supérieur et de la recherche – et des statuts d’établissements.

Le second objectif est la coopération la plus large et la plus stratégique possible au cœur d’une gouvernance territoriale de l’enseignement supérieur et de la recherche, qui prolongera en les améliorant les PRES actuels, sous la forme de fusions, communautés ou associations, fédérales ou confédérales – l’autonomie sera donc au rendez-vous, puisque les territoires pourront décider de leur organisation –, et avec la mise en place des contrats de site, qui responsabiliseront à la fois l’État, les établissements et les régions.

L’Assemblée nationale a consolidé ces priorités et ces objectifs. Elle a aussi très nettement amélioré et renforcé le texte, notamment sur trois points importants. Elle a d'abord introduit dans l’article 2 des modalités d’encadrement des nouvelles dérogations à la loi Toubon en matière d’enseignement en langue étrangère ; j’y insiste, ces dérogations sont encadrées. Elle a ensuite renforcé le principe de la tutelle conjointe du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche sur l’ensemble des établissements d’enseignement supérieur. Elle a enfin prévu que, tous les cinq ans, les deux stratégies nationales de la recherche et de l’enseignement supérieur seront réunies en un seul Livre blanc, qui comprendra notamment une programmation des moyens associés à ces stratégies ; cette mesure était réclamée par de nombreux groupes.

Vous avez vous aussi, mesdames, messieurs les sénateurs, fortement enrichi des mesures déjà présentes, proposé et adopté de nouvelles mesures et introduit plusieurs garanties supplémentaires s'agissant de la gouvernance territoriale : des garanties en matière de collégialité, mais aussi des garanties pour que les établissements bénéficient des conditions leur permettant de déployer réellement leur autonomie au sein des nouveaux regroupements, les communautés d’universités et établissements.

Les missions de l’enseignement supérieur et de la recherche ont été complétées par le Sénat, notamment pour conforter la place des interactions entre les sciences et la société. La réforme de l’enseignement supérieur et de la recherche s’inscrit dans un projet de société et une vision humanistes de l’avenir de notre pays. Cela pouvait déjà se lire dans l’exposé des motifs, mais vous avez fait en sorte que cela soit également lisible dans le projet de loi.

Pour mieux identifier l’ensemble des établissements qui contribuent au service public de l’enseignement supérieur, vous avez souhaité que soit établi un statut d’établissement d’enseignement supérieur privé à but non lucratif concourant au service public. Ce statut vient concrétiser dans la loi un certain nombre de textes et de pratiques qui existent déjà, comme la reconnaissance des diplômes et les contrats pluriannuels. Il s’accompagne aussi de mesures visant à protéger les diplômes et grades nationaux et à prémunir les étudiants contre des pratiques abusives comme celles du centre universitaire Fernando Pessoa dans ses antennes de Béziers et Toulon. Je rappelle d'ailleurs que, par l’intermédiaire de ses recteurs, le ministère a porté plainte pour dénoncer les dérives constatées dans ces établissements.

La notion d’association elle-même a été révisée dans le sens d’une plus grande égalité de principe et de droit entre les établissements associés. Ce nouveau texte, amélioré par vos soins, rend ainsi plus aisée, pour une université ou une école qui ne souhaite pas être membre d’une communauté, la décision de participer à un regroupement par association. Ces évolutions vous ont conduits à une réécriture complète et plus convergente de l’article 38 ; soyez-en remerciés.

Le Sénat a également complété les dispositions concernant les régions, d’une part, en précisant les conditions du transfert de moyens pour accompagner la décentralisation de la compétence en matière de diffusion de la culture scientifique et technique, et, d’autre part, en associant systématiquement les régions à la préparation des contrats pluriannuels de site, ce qui n’exclut par l’intervention des métropoles et des autres collectivités qui contribuent au financement des projets des universités.

L’article consacré au transfert a été assoupli, afin que la priorité à l’exploitation des brevets et licences issus de la recherche publique en Europe et la priorité accordée aux PME et aux ETI soient non pas un obstacle mais au contraire une condition préférentielle. Il s'agit d’un élément important pour notre redressement industriel et économique. La notion de transfert – je l’ai déjà souligné – a également été élargie aux domaines sociétaux, culturels et environnementaux, prenant ainsi une nouvelle dimension.

Le Sénat a donc apporté des inflexions originales, utiles et profondes. Vous avez marqué ce projet de loi de votre empreinte, tout en consolidant toutes les dispositions essentielles pour la réussite étudiante et la nouvelle ambition pour la recherche, qui constituent nos deux priorités.

La commission mixte paritaire a alors pu rétablir des articles restés en suspens et tenir compte des réactions suscitées par certains amendements du Sénat. Elle a ainsi entendu l’appel de la communauté universitaire et rétabli la qualification par le Conseil national des universités dans le processus de recrutement des enseignants-chercheurs, tout en reconnaissant la nécessité d’améliorer à l’avenir les processus de qualification, en dialogue avec les acteurs concernés ; un point d’étape sera effectué dans deux ans.

La commission mixte paritaire a également écouté les étudiants en médecine et les professionnels de santé, en rétablissant le caractère national de l’examen classant, tout en étant consciente de la nécessité de lutter contre les déserts médicaux dans certains territoires.

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