Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, c’est une certitude, les travaux des deux assemblées ont été guidés par la volonté d’aboutir à l’adoption d’une réforme de l’enseignement supérieur et de la recherche à la fois opérante et ambitieuse. Sur toutes les travées, nous visons les mêmes objectifs : la réussite de nos étudiants, le soutien à la recherche et à l’innovation, l’excellence pour nos universités. En dépit de divergences sur les modalités requises pour atteindre ces objectifs, les travaux de la commission mixte paritaire sont l’aboutissement d’un compromis.
Le groupe du RDSE se félicite donc que la CMP ait convenu de la nécessité de maintenir la procédure de qualification par le Conseil national des universités pour le recrutement des enseignants-chercheurs et le suivi de leurs carrières. Comment avait-il d’ailleurs pu être sérieusement envisagé de la supprimer ? Nous avons ainsi ouvert le débat, avec un rendez-vous pris dans deux ans.
En ce qui concerne la gouvernance des universités, point très cher aux membres de mon groupe comme à la communauté universitaire, le seul rétablissement de l’article 25 relatif aux compétences du président de l’université ne suffit pas à nous rassurer pleinement. Le texte de la CMP n’a pas conservé l’amendement du RDSE, adopté par le Sénat sur l’initiative de notre excellent collègue Jean-Pierre Chevènement, qui prévoyait que la présidence du conseil académique revenait au président de l’université ou à un délégataire désigné par lui. Sans cette disposition, nous redoutons des conflits de gouvernance et des affrontements entre les deux structures résultant de cette dyarchie au sommet de la hiérarchie de l’université.
Bien évidemment, il ne nous a pas échappé que, dans la version définitive qui nous est aujourd’hui proposée, les statuts pourront prévoir la possibilité que les deux présidences, celle du conseil d’administration et celle du conseil académique, soient confondues. Ce que nous voulions rendre obligatoire est désormais une possibilité, comme le prévoit précisément la rédaction de l’article 27 issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Si nous saluons l’évolution du système universitaire vers un fonctionnement plus démocratique et plus collégial, nos interrogations persistent sur la pertinence de l’instauration d’un exécutif bicéphale et sur les obstacles à la bonne gouvernance que peut constituer la cohabitation entre le président du conseil d’administration et le président du conseil académique. Au regard du rôle accru du conseil académique, une coordination de leur action nous semble donc indispensable.
Cela étant, vous venez de nous apporter les précisions que nous attendions, madame la ministre. La voie réglementaire sur laquelle vous vous engagez est de nature à nous rassurer, puisque son esprit et sa nature mêmes vont indéniablement dans le sens que nous souhaitons.
Ce point central du texte étant évoqué, nous approuvons donc les corrections apportées aux dispositions de la loi LRU et l’équilibre établi entre les deux conseils. Nous considérons, par exemple, que le transfert au conseil académique des compétences portant sur l’adoption des règles relatives aux examens ou sur la répartition des moyens consacrés à la formation et à la recherche, selon le cadre stratégique défini par le conseil d’administration, sera bénéfique. Comme l’ont dit d’autres intervenants, ce dernier doit pouvoir se concentrer sur ses fonctions stratégiques.
Sur les regroupements d’établissements, les apports de la seconde délibération de l’article 38 ont été entérinés, comme la possibilité d’adopter une organisation fédérale ou confédérale, une révision des statuts des communautés d’universités et établissements plus verrouillée en exigeant la majorité des deux tiers au conseil des membres, le renforcement de la place des enseignants, des chercheurs, des personnels et des usagers au sein du conseil d’administration ou la représentation d’au moins 75 % des établissements membres dans les listes des candidats.
Ces regroupements devraient favoriser la cohérence de l’offre de formation et contribuer à élaborer non seulement une stratégie de recherche sur le territoire, mais aussi la mise en place d’une véritable logique de coopération.
Les établissements étant liés à l’État par un seul contrat pluriannuel, le millefeuille institutionnel devrait être simplifié. Là où certains considèrent que l’État abandonne toute stratégie nationale, nous estimons, bien au contraire, que celle-ci est renforcée par la réduction du nombre de contrats de site. En outre, ces nouvelles formes de regroupement devraient contribuer à associer de plus près les organismes de recherche, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui avec les PRES.
En matière de valorisation de la recherche, l’obligation pour les personnes publiques de mettre à disposition l’innovation, en priorité au service d’entreprises de taille intermédiaire ou de PME qui prévoient une exploitation sur le territoire de l’Union européenne, est tempérée. La nouvelle rédaction rend cette disposition plus respectueuse du droit de la concurrence et assure ainsi une meilleure sécurité juridique.
Est également bienvenue la suppression des modifications apportées au crédit d’impôt recherche, dont les conséquences sont difficiles à mesurer, alors que son coût avoisine les 6 milliards d’euros et qu’il est préférable de le stabiliser, comme le recommande le rapport Gallois. À ce titre, nous attendons l’évaluation du dispositif par la Cour des comptes, qui devrait être publiée dans les prochaines semaines.
Outre les mesures relatives à l’encadrement des stages, à la simplification du paysage des formations, au rapprochement entre lycées et universités, à la correction à la marge de la loi LRU ou à l’amélioration de l’insertion professionnelle des titulaires d’un doctorat, c’est bien sûr le retour de l’État stratège qui doit retenir notre attention. En effet, il revient à l’État de poursuivre une politique d’aménagement du territoire qui fait encore défaut, afin de garantir l’égal accès de tous à l’éducation et de définir les grandes orientations en matière de recherche en vue de revitaliser le tissu industriel de notre pays, de créer les emplois à forte valeur ajoutée dont nous avons tant besoin et de répondre aux grands défis sociaux, économiques et environnementaux.
Voilà pourquoi, comme lors de la lecture du texte au Sénat, les membres du RDSE approuveront très majoritairement les conclusions issues des travaux de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l’enseignement supérieur et à la recherche.