Un indicateur des inquiétudes qui se sont fait jour sur l'avenir et la pérennité des RASED est reflété par l'effondrement des effectifs en formation de spécialisation. Durant l'année scolaire 2008-2009, 879 stagiaires avaient suivi une formation au CAPA-SH E et G et au DEPS. Pour l'année scolaire 2012-2013, ces effectifs ne s'élevaient plus qu'à 28 pour les maîtres E, moins de 30 pour les maîtres G (les statistiques étant incomplètes pour un tiers des départements) et 82 pour les psychologues scolaires.
D'autres dépenses que celles de personnel concourent au fonctionnement des RASED. A cet égard, il est dommage que la nature des crédits de fonctionnement relatifs aux RASED, à hauteur de 3 millions d'euros par an, ne soit pas précisée dans la justification au premier euro qui figure dans les projets annuels de performances annexés aux projets de lois de finances initiales et dans les rapports annuels de performances annexés aux projets de loi de règlement. Cette lacune des documents budgétaires devra être comblée. Par ailleurs, les frais de déplacement des intervenants des RASED ne sont pas toujours intégralement remboursés, ou ce remboursement intervient trop tard.
Sur un plan plus qualitatif, un groupe de travail intercatégoriel a été mis en place par la direction générale de l'enseignement scolaire et l'inspection générale de l'éducation nationale pour réfléchir à des aménagements du régime des RASED. Sur la base de ces travaux, une concertation doit s'engager cet automne en vue d'une mise en oeuvre des réformes à la rentrée 2014. Nos travaux entendent contribuer à cette réflexion.
Tout d'abord, il importe de conforter la place des maîtres des RASED par rapport aux différents acteurs du monde de l'éducation.
Ainsi, un besoin de coordination apparaît au sein de la communauté éducative. Nous préconisons d'identifier un temps hebdomadaire unique, de trois heures, consacré à l'aide personnalisée et à la concertation, alors qu'aujourd'hui les obligations réglementaires de service des professeurs des écoles dissocient l'aide personnalisée d'une part et les travaux pédagogiques en équipe d'autre part. L'objectif serait de permettre une intervention dans des délais resserrés auprès des élèves en difficulté.
Les RASED ont donné lieu à une mobilisation dès 2009 des parents d'élèves. Cependant, ils souffrent toujours d'un manque de visibilité, alors qu'un des objectifs de la refondation de l'école est de pleinement impliquer les parents dans le processus éducatif. A cet égard, les maîtres des RASED jouent souvent un rôle de médiateur irremplaçable entre les professeurs des écoles et les parents. C'est pourquoi nous recommandons de présenter la place et le rôle des RASED dans le guide des parents distribué au sein des écoles lors de la rentrée scolaire.
Enfin, l'échec scolaire englobe un ensemble de facteurs, notamment sociaux, culturels et familiaux. Tenant compte de cette situation, les associations de rééducateurs de l'éducation nationale ont proposé de faire évoluer les objectifs et les missions des RASED qui deviendraient des pôles spécialisés dans la prévention et la réussite à l'école, par un travail en réseau avec les parents et les autres dispositifs sociaux et médico-sociaux. Une telle évolution apparaît effectivement souhaitable.
Des aménagements au régime des RASED impliquent également de réaffirmer la place de l'enfant dans le système éducatif, alors que les exemples étrangers - en Scandinavie, en Corée ou au Japon - nous montrent la nécessité d'une école inclusive où la recherche de l'excellence doit se combiner avec un soutien aux élèves les plus fragiles. Il s'agit d'élever le niveau d'exigence pour l'ensemble des élèves. Tel est le principe du socle commun de compétences inscrit au projet de loi de refondation de l'école.
Par ailleurs, la réforme introduite par la circulaire du 10 juillet 2009, a favorisé la sédentarisation des maîtres pour qu'ils restent dans la classe. Ce choix a permis de ne pas stigmatiser les élèves des RASED et de maintenir une continuité avec l'enseignement dispensé à l'ensemble des élèves. Toutefois, comme l'ont déploré les syndicats, l'expérience des maîtres sédentarisés n'a pas profité à l'ensemble des élèves qui auraient eu besoin de l'intervention des RASED.
Il serait donc utile de conduire une évaluation de la sédentarisation des maîtres suite à la réforme de 2009, au regard du nombre d'élèves aidés et de l'efficacité d'un dispositif resserré sur certaines écoles.
Il pourrait ainsi être envisagé une sédentarisation dans les zones d'éducation prioritaire où le suivi des élèves, par petits groupes, devrait davantage être approfondi et s'inscrire dans la durée. En toute hypothèse, la sédentarisation devrait être ciblée pour ne pas priver certaines zones, plus isolées, de toute intervention des RASED. Elle devrait s'appuyer sur une évaluation des besoins des élèves, appréciés par les maîtres, les enseignants spécialisés et les corps d'inspection.
Enfin, les données conduites au cours de l'année scolaire 2010-2011 ont montré que les interventions des RASED avaient bénéficié en premier lieu aux élèves de CP et de CE1, qui ont représenté 45 % de l'ensemble des élèves aidés. Certes, les retards dans les connaissances de base sont plus difficiles à combler après le CE1. Mais les années d'école maternelle n'en sont pas moins déterminantes pour la réduction des inégalités scolaires et le repérage des élèves en difficulté. C'est pourquoi nous préconisons de réaffirmer, dans les textes réglementaires, que le champ d'intervention des RASED doit couvrir l'ensemble des classes de maternelle et du primaire.
En conclusion, les RASED ont répondu à l'objectif de réduire l'échec scolaire par rapport aux dispositifs qui les ont précédés. La baisse du taux de redoublement a été un indicateur de cette amélioration. Cependant, les RASED ont souffert de réductions de postes beaucoup plus importantes que dans le reste de l'éducation nationale et l'atout qu'ils constituent pour la réussite scolaire de tous les élèves a été fragilisé.
A présent, il nous appartient donc de nous donner pleinement les moyens de renouer avec une ambition qui fasse des RASED le vecteur de la réussite éducative de l'ensemble des élèves. Les moyens devront être adaptés aux situations locales. A cet égard, je crois fondamentalement à la complémentarité des RASED et du programme « plus de maîtres que de classes ». Les zones d'éducation prioritaire et les secteurs ruraux isolés ont vocation à être les premiers bénéficiaires d'une ambition de réussite partagée par tous les acteurs du système éducatif.