Intervention de Christiane Taubira

Réunion du 16 juillet 2013 à 14h30
Attributions du garde des sceaux et des magistrats du ministère public — Article 2

Christiane Taubira, garde des sceaux :

Indépendamment de toute considération sur la navette parlementaire, j’entends les préoccupations de M. Mézard.

Je le répète, l’adaptation n’est pas une notion vide de sens, ou un terme dont l’élasticité interne serait telle que nous pourrions l’interpréter à notre guise.

Je sais à quel point il est parfois nécessaire d’être précis. Nous avons déjà eu des discussions, tout à fait légitimes et passionnantes, de sémantique générale ou sur l’acception de notions juridiques incluses dans des textes de loi qui pouvaient faire l’objet d’interprétations différentes.

Ce n’est pas le cas en l’occurrence, car aucune ambiguïté n’est possible : les mots « adapter » et « adaptation » existent dans notre droit, et nous savons ce qu’ils signifient.

Le terme d’ « adaptation » n’autorise pas à aller au-delà de l’acception retenue dans le texte et vise les priorités définies par rapport au ressort.

La circulaire générale de politique pénale concerne l’ensemble du territoire et l’ensemble des types de délits ou de crimes. Le procureur général exercera donc le pouvoir d’adaptation en fonction de son ressort.

Je vous en ai donné quelques exemples : si les différences d’interprétation sont trop importantes, et si l’adaptation retenue est trop éloignée des orientations indiquées, nous publierons des circulaires territoriales.

J’entends vos préoccupations, monsieur le sénateur, mais la rédaction actuelle du texte ne justifie pas une telle inquiétude. L’adaptation est nécessaire et indispensable pour améliorer l’efficacité de la justice.

Nous disposons d’ailleurs, d’ores et déjà, d’instruments d’adaptation de la politique pénale. Je reprendrai l’exemple des groupes locaux de traitement de la délinquance, les GLTD, qui permettent d’adapter le contenu de la politique pénale dans un ressort en se concentrant sur un type particulier de délit ou de criminalité, avec une mobilisation particulière dans le cadre défini par la loi. Les GLTD mobilisent ainsi, au-delà du parquet, le maire, les services sociaux, la police municipale, l’éducation nationale, et dans certains cas le monde de la culture. C’est cela, l’adaptation !

Le procureur général n’invente pas d’autres incriminations, une autre procédure pénale : il ajuste la loi pénale pour qu’elle soit encore plus efficace dans son ressort.

Cette adaptation se fait souvent pour une période donnée. C’est en effet le propre d’un dispositif efficace de permettre de relâcher les efforts au terme d’un certain délai.

Vos inquiétudes, que je comprends, monsieur Mézard, n’ont pas lieu d’être. J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.

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