Intervention de Martin Hirsch

Délégation sénatoriale à la prospective — Réunion du 16 juillet 2013 : 1ère réunion
Audition de M. Martin Hirsch président de l'agence du service civique et ancien haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté puis à la jeunesse

Martin Hirsch, président de l'Agence du service civique et ancien Haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, puis à la jeunesse :

Vous avez raison de souligner cette méfiance qui prédomine actuellement et qui est source de complexité. C'est lié au fait que, historiquement, on a pris le principe d'égalité au pied de la lettre. On est passé de la charité à la tête du client à la reconnaissance de droits spécifiques, qui, pour être mis en oeuvre, supposent de satisfaire à un certain nombre de critères. Tout est donc défini, écrit, ce qui est plus confortable pour le professionnel, car il peut s'appuyer sur tel ou tel article du code lorsqu'il ne peut répondre à une personne en difficulté. Comme prédomine cette crainte de voir l'État, les départements, les caisses, les travailleurs sociaux donner plus que ce qui est nécessaire, on ne délègue aucune possibilité de répondre en fonction, non pas de la tête du client, mais de la situation de l'usager.

Il faudrait introduire dans le système une certaine marge d'appréciation, d'ajustement et de responsabilité pour ce qui est de l'enveloppe financière. Cela pourrait se faire au travers de référents, comme vous le préconisez. Personne ne peut connaître complètement la législation, la réglementation, maîtriser toutes les questions, l'évolution des barèmes, etc.

Pour autant, aujourd'hui, si vous appelez n'importe quelle compagnie aérienne pour connaître les horaires d'un Paris-Hong Kong à tel jour et à telle heure, celle-ci saura vous répondre même si elle n'est pas spécialiste de l'Asie du Sud-Est ! J'imagine qu'il devrait être possible de trouver des personnes, au sein du service public de l'emploi, susceptibles de maîtriser le « logiciel », d'aiguiller les personnes en situation de pauvreté, d'être leur référent principal. Cette idée d'un interlocuteur unique, nous l'avions défendue au moment du RSA.

Encore une fois, il faut une volonté commune pour agir en ce sens. Et qui prendrait le leadership ? Le préfet ? L'Assemblée des départements de France a souhaité voir précisé dans la loi de 2008 que le département est le chef de file de l'insertion. Par conséquent, j'ai du mal à imaginer le préfet pouvoir imposer un quelconque mode d'organisation au président du conseil général.

En même temps, la décentralisation ne doit pas empêcher les expérimentations. Pourquoi, par exemple, ne pas s'appuyer sur ce qui existe en matière de délégations de compétences pour la gestion des aides à la pierre ? Ainsi, pendant deux ou trois ans, la région Pays-de-la-Loire pourrait décider de placer sous sa tutelle les agents de Pôle emploi et des caisses d'allocations familiales. Ceux-ci conserveraient leur statut d'agents de l'État, mais l'autorité serait décentralisée. Avec des moyens identiques, la région se verrait confier le management et serait alors en mesure de coordonner l'organisation et les actions des différentes agences sur le territoire, pour cibler, par exemple, tel ou tel public ou privilégier un mode de remboursement des indus par rapport à un autre. Voilà qui serait intéressant à faire.

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