Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, en 2012, le Président de la République, à l’occasion de son discours devant le congrès de la Mutualité française, a rappelé avec force la place des mutuelles au sein de notre système de protection sociale. Il s’était livré, dans son intervention, à une analyse très approfondie de notre système de protection sociale et de notre système de santé, en affirmant que le seul objectif était de garantir un égal accès à des soins de qualité à l’ensemble de nos concitoyens.
C’est dans ce cadre qu’il a pris l’engagement de permettre aux mutuelles de mettre en place des réseaux de soins, tels que définis dans la présente proposition de loi, à l’heure où les mutuelles se trouvent dans une situation d’inégalité à l’égard des compagnies d’assurance complémentaires et des caisses de prévoyance.
C’est dans cet esprit d’approche globale de notre système de protection sociale que nous devrions aborder l’examen de ce texte.
Je remercie M. le rapporteur général de son analyse approfondie du fonctionnement de notre système de protection sociale. Il a mis en évidence l’importance du secteur complémentaire : il représente à lui seul 26 milliards d’euros, à mettre en regard des 138 milliards d’euros de financement public, soit 13, 7 % des dépenses totales de santé. Les mutuelles représentent 55 % du secteur complémentaire.
Je le remercie par ailleurs de nous avoir rappelé que trois secteurs très différents présentent deux points communs : des prix libres et des remboursements de l’assurance maladie très minoritaires. Je veux parler des soins dentaires, de l’audioprothèse et de l’optique, en rappelant, concernant ce dernier domaine, le caractère symbolique de l’intervention de l’assurance maladie à un taux d’environ 4°% au regard des 45°%° financés par les systèmes complémentaires.
Nous ne pouvons nous satisfaire de ce constat, et il n’y a pas de fatalité à ce qu’il perdure. Loin de moi la volonté de faire preuve d’un angélisme béat. Aussi, je ne réclame pas aujourd’hui, malgré le déficit de l’assurance maladie, de contribution supplémentaire – même si la question reste d’actualité. Je considère, en revanche, qu’il est indispensable que l’assurance maladie participe activement au débat sur les conditions d’existence des réseaux.
L’exigence de qualité au meilleur prix, les conditions d’accessibilité aux meilleurs soins quel que soit le territoire, les procédures de traçabilité, l’évaluation des dispositifs médicaux proposés, l’information et la responsabilisation de nos concitoyens sont des sujets essentiels.
L’assurance maladie, si péremptoire dans son ordonnance d’économie afin de réduire son déficit – je pense notamment à ses préconisations concernant la prise en charge des pathologies thyroïdiennes et des cancers de la thyroïde – ne peut s’exonérer de ses responsabilités, alors que, par exemple, 30 % de nos jeunes de moins de vingt ans souffrent de problèmes de vision et portent des lunettes.
Je remercie, enfin, les complémentaires et les mutuelles d’avoir pris la responsabilité de s’investir avec compétence dans ce débat ô combien fondamental.
Les complémentaires ont mis en place des réseaux de soins et se sont, de fait, autorégulées. Je ne vais pas leur en faire grief ; leur rôle est essentiel. Néanmoins, j’estime que les pouvoirs publics doivent participer à l’évaluation de la qualité du dispositif proposé. Ils doivent également être vigilants quant à la façon dont les conventions sont passées entre les usagers et les organismes complémentaires. Nous avons d’ailleurs débattu de cette question ce matin en commission et nous y reviendrons très certainement.
Monsieur le rapporteur général, vous avez accompli un travail considérable de réécriture des articles 1er et 2 de la proposition de loi, en particulier en mettant l’ensemble des complémentaires à un même niveau de droits et de devoirs. Vous avez également largement amélioré le concept de réseau de soins.
Pour autant, lorsque vous inscrivez dans le texte la possibilité d’existence de réseaux fermés pour l’optique, arguant d’une offre qui, du fait de son abondance, mérite régulation, le débat reste, à nos yeux, ouvert. Il s’agit d’une réalité, mais des tarifs différenciés de remboursement heurtent l’exigence d’un traitement égalitaire pour nos concitoyens, même si le libre choix de ces derniers est clairement acté.
À titre personnel, je ne suis pas favorable à ces réseaux fermés, et j’ai pu constater que, au sein même de la Mutualité française, les avis divergeaient sur cette question. Je relève par ailleurs la chaleur, la qualité et la sincérité des relations que j’ai pu entretenir avec les différents acteurs de la Mutualité. Et vous pouvez imaginer qu’ils ont été nombreux !
À mon sens, si surabondance d’offre en matière d’optique il y a, elle doit être traitée en amont, notamment au stade de la formation, avec la possibilité par exemple de proposer des formations complémentaires aux étudiants. La démographie médicale des ophtalmologues pose en effet problème dans beaucoup de nos territoires.
Madame la ministre, nous connaissons votre énergie, votre compétence et votre détermination. Vous travaillez aujourd’hui sur de nombreux sujets, parmi lesquels l’évolution des contrats solidaires et responsables. Notre débat aurait pu s’inscrire dans ce cadre.
Malgré le travail très important accompli par M. le rapporteur général, je regrette l’approche encore trop contrainte, en matière d’organisation des réseaux de soins, de cette proposition de loi.
Aussi, je ne participerai pas au vote du présent texte. §