Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'article 1er constitue en quelque sorte le point d'équilibre auquel sont parvenus les députés en rédigeant cette proposition de loi relative aux droits des malades et à la fin de vie.
Il tend à préciser, en effet, que les actes pratiqués par les médecins ne doivent pas « être poursuivis par une obstination déraisonnable ». C'est donc autour de cette idée que se situe le point d'équilibre du texte qui nous est soumis.
A cet égard, nous sommes sensibles à la qualité du travail qu'a réalisé l'Assemblée nationale et que notre rapporteur nous propose de retenir comme guide de ce qui pourrait devenir, demain, la loi dans notre pays.
Je dois dire que cette idée du refus de l' « obstination déraisonnable » m'apparaît juste. Elle va suffisamment loin dans le sens de ce qui peut être souhaitable, tout en respectant l'essentiel, à savoir la qualité de l'être humain, quelle que soit la situation dans laquelle l'individu considéré se trouve, et la dignité de la personne humaine, qui doit, selon nous, être la mesure de toute chose dans ce domaine.
La règle « guérir si possible, prendre toujours soin » doit sans aucun doute être mise en oeuvre par les médecins, par la famille, par tous ceux qui entourent la personne malade, étant entendu qu'il s'agit là, bien sûr, non d'une règle juridique, mais tout simplement d'un devoir d'humanité.
La valeur intrinsèque et la dignité personnelle de tout être humain restent intangibles, quelles que soient les conditions concrètes de sa vie. Un homme, une femme, même s'ils sont gravement malades ou empêchés dans l'exercice de leurs fonctions les plus hautes, sont et seront toujours un homme, une femme, et ne deviendront jamais un végétal ou un animal. Les médecins, la société ont donc envers ces personnes des obligations morales, nées de la solidarité humaine.
Nous pouvons faire nôtre l'idée de la suspension d'un traitement inutile, disproportionné, ou se limitant à permettre la survie artificielle du malade.
Néanmoins, cet article soulève, selon nous, un vrai problème, celui du traitement.
Nous considérons en effet que, quel que soit l'état de la personne concernée, le fait de lui administrer de l'eau et de la nourriture, même à travers des voies artificielles, représente encore et toujours un moyen naturel de maintien de la vie, et non pas un acte médical.
Par ailleurs, sans être médecin ni particulièrement savant dans ce domaine, je crois qu'on ne peut pas exclure a priori que le fait de priver le sujet malade d'hydratation ou d'alimentation puisse lui causer de profondes souffrances. §Cela ne peut être exclu, c'est tout ce que je veux dire !
Par conséquent, je souhaite affirmer nettement que, si nous sommes d'accord pour rejeter l'obstination déraisonnable, le respect de la dignité de la personne humaine, quel que soit l'état dans lequel se trouve l'homme ou la femme concerné, nécessite que l'on continue à lui administrer de l'eau et de la nourriture, fût-ce de façon artificielle, à la seule condition de ne pas avoir recours à l'alimentation forcée.
En d'autres termes, si l'on peut utiliser des voies artificielles, il ne doit pas être permis de pratiquer, par exemple, de gastrectomie afin de nourrir de façon forcée une personne en fin de vie.