Dans le droit-fil de ce que nous avons exposé au cours de la discussion générale, cet amendement vise à définir les différentes circonstances permettant à une personne de bénéficier d'une assistance médicalisée à sa propre mort. L'expression « exception d'euthanasie », qui correspond en fait à l'euthanasie active, est malencontreuse ; l'Assemblée nationale, avec votre accord, monsieur le ministre, a déjà retenu l'euthanasie indirecte, l'euthanasie passive.
Il y a le cas de Vincent Humbert, mais il y a également le cas de ceux qui sont inconscients et qui méritent d'être traités de la même manière.
Nous demandons alors que soient prises des précautions multiples : la liberté de conscience des médecins doit être respectée, un médecin pouvant refuser d'apporter une aide médicalisée pour mourir et suggérer au patient de faire appel à l'un de ses confrères.
Nous demandons que soit prise une décision collégiale par trois médecins, dont au moins un occupe des fonctions hospitalières. Nous avons rappelé que tel était déjà le cas avant la loi Veil en matière d'avortement thérapeutique.
Nous demandons également un temps de réflexion obligatoire pour tous. Ainsi, avant de prendre la décision, chacun pourra infirmer ou confirmer sa volonté d'accomplir l'acte.
Un compte rendu devra être soumis à une commission régionale de contrôle. Celle-ci pourra saisir une autorité nationale de contrôle, laquelle examinera la question. Bien entendu, si les conditions de la loi n'ont pas été respectées, l'autorité régionale ou l'autorité nationale pourra transmettre au parquet.
Enfin, nous demandons la tenue d'un registre national automatisé des directives anticipées. Avec Internet, il n'est en effet pas difficile à un médecin d'appuyer sur un bouton pour savoir si, oui ou non, des directives anticipées ont été prises.
Voilà le système que propose notre amendement. Je le répète, il dépasse le seul cas de Vincent Humbert, qui ne serait paradoxalement pas réglé par la proposition de loi, alors que c'est tout de même à la suite de cette affaire que l'Assemblée nationale a créé une mission d'information, puis une commission spéciale. La plupart des députés l'ont d'ailleurs évoqué.
Pour votre part, vous n'en avez pas parlé, monsieur le ministre, et Mme la secrétaire d'Etat aux personnes âgées non plus. Vous avez cependant reçu Mme Humbert, à la différence de la commission des affaires sociales du Sénat.
Toujours est-il que les députés, en évoquant le cas de Vincent Humbert, ont reconnu que la proposition de loi en découlait et ont rendu hommage à l'acte d'amour, de compassion réalisé par Mme Humbert et par le docteur Chaussoy. Il faut donc régler le cas Humbert. C'est ce à quoi vise l'amendement n° 62, en prenant de multiples précautions.
En Belgique, une évaluation a déjà eu lieu. A cette occasion, on s'est rendu compte que cette loi n'a été appliquée à aucune personne âgée et que les dérives tant redoutées ne se sont pas produites.
Si nous devons bien sûr prendre des précautions, il ne faut pas avoir peur de saisir les problèmes à bras-le-corps. En l'occurrence, M. le Premier ministre avait d'abord estimé qu'il ne fallait pas légiférer pour régler ce genre de questions. Mais il a changé d'avis, comme ce n'est d'ailleurs pas la première fois que cela lui arrive ! Quoi qu'il en soit, vous avez su le convaincre, monsieur le ministre, mais vous n'êtes pas allé assez loin. C'est pourquoi nous proposons d'aller au bout du problème.