Intervention de Catherine Tasca

Réunion du 16 septembre 2013 à 15h00
Égalité entre les femmes et les hommes — Discussion d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Catherine TascaCatherine Tasca :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, madame la présidente de la délégation, mesdames les rapporteurs, mes chers collègues, la Haute Assemblée est aujourd’hui saisie d’un projet de loi dont je me réjouis qu’il mette la politique des droits des femmes au cœur des priorités du Gouvernement.

Au cours du siècle dernier, de nombreuses étapes ont été franchies en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes. Je veux ici rendre hommage à toutes ces femmes qui se sont battues durant des années, des siècles même, pour obtenir l’égalité, une égalité de droits, une reconnaissance d’un statut social égal ou encore une véritable liberté, par exemple celle de s’affranchir de l’autorité du mari ou de disposer de son corps.

Je pense en particulier à ces militantes courageuses et déterminées qui ont œuvré pour une véritable égalité sur le plan civique, certaines, comme Jeanne Valbot, allant jusqu’à s’enchaîner dans les tribunes de cet hémicycle. Elles ont obtenu finalement la reconnaissance du droit de vote pour les femmes, un suffrage véritablement universel à la Libération, étape évidemment essentielle.

Vinrent ensuite les droits économiques et sociaux des années soixante-dix et quatre-vingt. La légalisation de l’interruption volontaire de grossesse avec la loi Veil de 1975 fut l’une des réformes de société les plus importantes de notre République et la consécration de l’une des libertés les plus précieuses de la femme.

Trente années après la loi Roudy du 13 juillet 1983 concernant l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, la pratique révèle que le chemin est encore long pour atteindre une situation satisfaisante en matière d’égalité entre les femmes et les hommes dans notre société.

De fait, si les inégalités les plus visibles semblent avoir aujourd’hui diminué, elles sont devenues plus insidieuses. La question se pose donc de savoir quelle réponse serait la plus adaptée pour lutter contre celles qui demeurent.

La loi n’est certes pas le seul instrument pour mettre en place ce que l’on peut considérer comme une troisième génération des droits des femmes. Il est avant tout nécessaire d’assurer l’effectivité des droits acquis en effectuant un véritable travail d’éducation et de changement des mentalités et des comportements pour agir de manière durable sur la racine des inégalités.

Cependant, force est de constater que certaines évolutions législatives demeurent indispensables.

La détermination du Président de la République et du Gouvernement et l’engagement personnel de Mme la ministre Najat Vallaud-Belkacem pour rendre enfin possible une égalité réelle et pérenne entre femmes et hommes sont concrétisés par le présent projet de loi. Annoncé par le Président de la République à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, le 8 mars 2013, il est le fruit d’un travail de concertation de longue haleine avec les partenaires sociaux et les représentants de la société civile, selon la méthode faisant l’honneur de ce gouvernement, qui privilégie le consensus social sur chaque texte important.

Il s’agit d’un texte audacieux et pragmatique visant à répondre de manière concrète aux problèmes qui maintiennent les femmes, à tous les niveaux de notre société, en situation d’inégalité.

Madame la ministre, je veux saluer les mérites de ce texte, son originalité, qui tient à une large concertation, à la volonté de traduire l’objectif de parité dans la vie réelle de nos concitoyens, à une approche globale, transversale, dans laquelle doivent s’impliquer toutes les autorités publiques, enfin à une préoccupation de formation des intervenants.

Ce texte, bâti autour de quatre titres, nous permet d’espérer que les inégalités, les clichés et les stéréotypes ne soient plus, un jour prochain, qu’une trop longue erreur appartenant à l’Histoire.

L’article 1er pose le principe d’une approche intégrée pour la mise en œuvre d’une politique de l’égalité entre les femmes et les hommes, cela à tous les échelons de l’action publique, que ce soit au niveau de l’État, des collectivités territoriales ou des établissements publics.

Ensuite, le titre Ier de ce projet de loi a l’ambition de favoriser la mise en œuvre de cette politique de l’égalité dans la vie professionnelle avec une mesure emblématique et incitative de réforme du congé parental visant à favoriser le partage du congé par les deux parents.

Cette réforme du complément de libre choix d’activité, renommé « prestation partagée d’accueil de l’enfant », sur l’initiative de la rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, consistera, pour les familles avec un seul enfant, en six mois supplémentaires pour le second parent, qui s’ajouteront aux six mois actuels déjà prévus par le code de la sécurité sociale. Et pour les familles avec deux enfants et plus, qui choisissent une interruption d’activité de trois ans, six mois seront réservés au second parent.

Il s’agit là d’accroître le niveau de retour à l’emploi des femmes, en favorisant un meilleur partage des responsabilités parentales. Toutefois, cette réforme ne prendra tout son sens qu’avec le progrès réel et rapide de l’égalité salariale et le renforcement de l’offre d’accueil de la petite enfance, annoncé par le Premier ministre le 3 juin dernier, avec 275 000 nouvelles solutions d’accueil sur cinq ans.

Une autre mesure forte vise à interdire aux personnes ayant été condamnées pour des motifs liés à la discrimination et au non-respect des dispositions prévues par le code du travail en matière d’égalité professionnelle de soumissionner les marchés publics.

Le régime de protection du contrat de collaboration libérale est lui aussi amélioré en préservant la continuité du contrat pendant les congés de maternité et de paternité.

Sur la proposition de notre collègue René Teulade, le groupe socialiste défendra deux amendements fortement symboliques, mais aussi très concrets, pour favoriser l’égalité salariale entre les femmes et les hommes. Ces amendements tendent à reprendre les dispositions principales de la proposition de loi relative à l’égalité salariale entre les hommes et les femmes, adoptée le 16 février 2012 par le Sénat, qui n’a jamais été inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale.

Le premier amendement vise à ce que les entreprises qui, au 1er janvier 2015, ne seraient pas couvertes par un accord relatif à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes ne puissent bénéficier de réductions de cotisations sociales ni de réductions d’impôt.

Le second amendement tend à imposer la transmission par l’employeur à l’inspecteur du travail, du rapport de situation comparée entre les femmes et les hommes ainsi que de l’avis du comité d’entreprise, sous peine de pénalité financière.

Il ne s’agit ni plus ni moins que de permettre l’application de la loi, pour laquelle, malheureusement, trop d’entreprises tardent encore. Je sais, madame la ministre, que nous reviendrons sur ce sujet qui a été au cœur de la concertation avec les partenaires sociaux.

Le titre II traite de la lutte contre la précarité, qui malheureusement touche de plus en plus de femmes. Il vise à créer progressivement une garantie publique contre les impayés de pensions alimentaires, en fixant un montant de pension alimentaire minimal et en renforçant les dispositifs de recouvrement sur les débiteurs défaillants.

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