Le projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, déposé par le Gouvernement le 10 avril dernier, avait été profondément modifié par le Sénat, qui avait supprimé, malheureusement à mes yeux, les dispositions relatives au Grand Paris. Nous examinons aujourd'hui en deuxième lecture un texte voté le 23 juillet par l'Assemblée nationale, qui a réintroduit ces dispositions dans une version sensiblement différente. C'est la raison pour laquelle, une fois n'est pas coutume, notre commission s'est saisie pour avis en deuxième lecture.
Elle s'est saisie de l'article 12 relatif à la métropole du Grand Paris ; de l'article 13 sur l'élaboration d'un schéma régional de l'habitat et de l'hébergement (SRHH) en Île-de-France, qui nous a été délégué au fond par la commission des lois, et de l'article 13 A, article de conséquence ; de l'article 13 bis qui fusionne les établissements publics fonciers de l'État en Île-de-France ; de l'article 18 bis qui supprime l'établissement public d'aménagement de la Défense Seine Arche (Epadesa) ; enfin de l'article 19 bis, lui aussi délégué au fond par la commission des lois, qui transforme l'Établissement public de Paris Saclay (EPPS) en établissement public d'aménagement.
L'article 12 présente une métropole du Grand Paris bien différente de celle que le Sénat avait rejetée en première lecture. Il s'agissait alors d'un établissement public composé de la Ville de Paris et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre de l'unité urbaine au sens de l'INSEE. Le texte issu de l'Assemblée nationale prévoit un EPCI à fiscalité propre composé de Paris, des communes et départements de la petite couronne et des communes membres d'EPCI dont une commune au moins est dans la petite couronne. Je salue cette évolution. Le rejet en première lecture par le Sénat de ces dispositions, que j'ai regretté, cet électrochoc, a donc été bénéfique : d'une part, il ne s'agit plus de créer un étage supplémentaire ; d'autre part, le périmètre stable, citoyen, que constitue la petite couronne, est préférable à cette donnée statistique par nature mouvante que constitue l'unité urbaine. Je comprends la logique qui prévoit d'inclure les communes membres des EPCI dont une commune est dans la petite couronne ; mais il faudra veiller à ce que ce type d'exception ne fasse pas tâche d'huile, ce qui mettrait en cause l'équilibre au détriment de la grande couronne.
Il aurait été possible d'aller plus loin encore : la question de la pérennité des départements de la petite couronne se pose ; cette idée, qui rejoint la proposition de Philippe Dallier, ne constitue d'ailleurs pas un tabou pour le président du conseil général de Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel.
La possibilité pour la métropole du Grand Paris de déléguer certaines compétences à des « conseils de territoires » d'au moins 300 000 habitants - seuil qui permet d'éviter l'endogamie sociale des communes, ce péché mignon des EPCI franciliens - ne doit pas conduire à recréer une nouvelle couche du millefeuille.
Je me réjouis que le logement constitue la compétence majeure de la métropole du Grand Paris ; cela confirme la détermination du Gouvernement dans ce domaine particulièrement sensible en Île-de-France, où ne sont construits annuellement que 37 000 logements alors qu'il en faudrait 70 000, et où sont concentrés 60 % des recours DALO en matière de logement et près de 75 % en matière d'hébergement. Le schéma régional de l'habitat et de l'hébergement (SRHH) prévu à l'article 13 n'est plus élaboré par le Conseil régional mais par le Comité régional de l'habitat et de l'hébergement (CRHH), composé de représentants de l'État, de la région, des départements, de la métropole du Grand Paris et des EPCI franciliens hors du périmètre de cette dernière. J'espère que cette instance sera l'embryon d'une autorité organisatrice du logement en Île-de-France, que notre collègue Gérard Roche et moi-même avions appelé de nos voeux dans notre rapport sur le droit au logement opposable (DALO) au nom de la Commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois.
Je souhaite que le Sénat adopte conforme l'article 13 bis qui prévoit la fusion des établissements publics fonciers de l'État présents en Île-de-France, et qui avait été introduit à l'initiative de notre commission. Cela mettra en effet un terme à la coexistence de quatre établissements publics fonciers d'État, alors que le logement et l'aménagement réclament un traitement au niveau régional.
L'Assemblée nationale a inséré un article 18 bis, les articles 18 et 19, adoptés conformes, je vous le rappelle, visant à clarifier les missions de l'établissement public de gestion de la Défense (EPGD) et celles de l'établissement public d'aménagement de la Défense Seine Arche (Epadesa). La loi de 2007 déconnectait les deux activités en confiant à l'EPGD une gestion coûteuse jusqu'alors refusée par les collectivités locales et assumée par l'Epad en dehors de sa mission normale. Plus de six ans après, les deux établissements publics s'opposent quant à l'interprétation de la loi et l'État a engagé plusieurs contentieux contre des délibérations prises par l'EPGD. L'article 18 bis supprime au 1er janvier 2016 l'Epadesa et indique qu'avant le 31 juillet 2015, l'État et les collectivités territoriales déterminent d'un commun accord de nouvelles modalités d'aménagement et de gestion. C'est inopportun : tout d'abord, des opérations d'aménagement sont en cours et un vide juridique serait dangereux ; ensuite, il est irréaliste de prévoir que des adversaires devant le tribunal déterminent quoi que ce soit d'un commun accord ; il serait certes préférable de revenir au droit commun, soit la gestion de la Défense par les collectivités territoriales, mais pas dans ces conditions. Je propose donc de supprimer cet article.
L'article 19 bis, introduit en première lecture par le Sénat à l'initiative de Jean-Vincent Placé, transforme l'établissement public de Paris-Saclay (EPPS), créé en 2010 par la loi sur le Grand Paris, en établissement public d'aménagement. Cela renforce à juste titre la présence des collectivités territoriales au sein de son conseil d'administration. Les députés ont précisé que l'établissement reste sous la tutelle conjointe des ministres de l'urbanisme et de l'enseignement supérieur et de la recherche, ce qui répond aux inquiétudes que j'avais formulées en première lecture.